La Comtesse du Lys

De Sefariane

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En 1676, dans la France du roi Louis XIV. Isabelle Constance Madeleine de Langlois, comtesse de Vauboyen, es... Mais

Avant-propos
I
II
III
IV
V
Les enfants légitimés de Louis XIV
VI
VII
VIII
IX
X
XI
XII
XIII
XIV
XV
XVI
XVII
XVIII
XIX
XX
XXII
XXIII
XXIV
Mot de la fin

XXI

393 20 5
De Sefariane

Remerciement à FanSALTLTRRtr09 pour ses commentaires.

Coup de tonnerre dans ce chapitre après presque une semaine d'attente ! Bonne lecture !

********************

« Si la nuit est noire, c'est pour que rien ne puisse nous distraire de nos cauchemars. »

Bill Watterson


Un coup de tonnerre retentit. Louise Françoise se redresse dans son lit en haletant, le front couvert de sueur. Ses yeux foncés s'ouvrent, écarquillés sur un monde que le délire vient voiler de flammes. L'air passe difficilement à travers sa gorge serrée. Miséricorde ! Qu'était-ce donc que cet affreux cauchemar ? L'impression que l'horrible songe n'est pas terminé, qu'elle est toujours hantée par la vision qu'elle vient de voir la laisse exsangue.

Des claquements contre les carreaux des fenêtres lui font tourner la tête vers celles-ci. Dehors dans la nuit, il vente fort. La pluie tombe avec fracas. Le son des gouttes s'écrasant sur le château de Vaugirard résonne avec force entre les murs. C'est comme si le temps était annonciateur de sinistres présages.

Mademoiselle de Nantes contemple alors la porte qui lui fait face quelques mètres plus loin devant elle. Il fait si sombre ici, à l'extérieur le ciel est si noir. Toutes couleurs lui semble avoir disparu dans la pièce. Il n'y a que des nuances obscures. Cette porte est d'un noir profond. Ce voile d'eau grisâtre au dehors est à l'image de ce qu'elle ressent en cet instant. Morose, triste, désolé...

Une partie de son esprit, son instinct, lui intime de ne pas rester coucher. Elle veut se lever mais ne fait que basculer lourdement au bas de son lit. Le sol carrelé est dur et froid. Son contact est douloureux mais parait donner une nouvelle énergie à la petite fille qui, lâchant une plainte déplorable, rampe vers la porte de sa chambre. Son corps et ses mains s'élèvent avidement pour saisir la poignée et la tirer avec ses maigres forces.

Parvenant enfin à se tenir debout sans que ses jambes ne la trahissent une nouvelle fois, elle avance à l'aveuglette dans les couloirs. Le bruit de ses pas précipités vibre faiblement entre les murs, se mêlant au tumulte provoqué par l'averse. Le ciel anormalement plombé déversait une pluie torrentielle depuis le début de la soirée. Non pas une ondée bienfaisante qui serait survenue en période estivale et qui aurait rafraîchit faune et flore. Mais une pluie froide s'échappant comme autant de larmes d'un firmament endeuillé, conférant au paysage habituellement ensoleillé de France une atmosphère sépulcrale.

Louise Françoise arrive enfin à sa destination. Elle tambourine contre la porte de sa gouvernante qui vient lui ouvrir, on ne peut plus étonnée de sa présence ici en pleine nuit. Elle s'empresse de soulever la petite dans ses bras en lui caressant tendrement le dos pour calmer ses sanglots. Puis elle va s'asseoir sur le bord de son lit, à la lumière de la bougie.

- Isabelle, j'ai peur... Gémit Mademoiselle de Nantes d'une voix tremblante.

- Ne pleurs pas, Fannie. Dis-moi ce qui te tourmente.

- Mère... Je l'ai vue... Elle me terrifiait ! Elle voulait te tuer !

L'acoustique de l'orage brouille les pensées de Louise Françoise, lesquelles s'évaporent en une fine brume flexueuse. Malgré ce tourbillon impétueux de mots et d'images cauchemardesques, un grain d'escarbille a réussi à s'échapper de la foule endiablée de pensées. Le dit grain poussiéreux se métamorphose sans tarder en un cristal. La pierre translucide laisse transparaître le cadavre de sa seule véritable mère. Mademoiselle de Nantes entreprend laborieusement de diluer cette idée cristallisée dans le maelström de son cerveau.

- Maintenant, je te ramène à ta chambre.

Isabelle amorce un mouvement pour s'écarter, mais se ravise bien vite lorsque sa protégée resserre sa prise autour de son cou, la tête toujours enfouit en son creux.

- Non ! Laisse-moi dormir avec toi ! Je t'en prie !

- Mon cœur, je ne vais pas disparaître.

- Mais que sera notre vie sans toi si jamais tu n'es plus là ?

Ce disant, le visage larmoyant de la petite est enfin visible à la comtesse. Cette dernière passe ses mains douces sur ses petites joues pour l'apaiser. Des yeux bruns se perdent dans des orbes d'un bleu toujours aussi pur, malgré le peu de luminosité, malgré les ténèbres de la nuit. Oublié son phantasme, envolée la femme qui lui a donné naissance... Seul compte cet enchevêtrement de regards dans lequel Louise Françoise se noie, éperdument fascinée par la femme auréolée d'or qui lui fait face. Avec le plus beau des sourires qui soient.

- Rien dans ce monde ne pourra changer l'amour que j'éprouve pour toi, pour vous tous. Je vous aime. De tout mon cœur et je te demande de ne jamais l'oublier.


Le petit déjeuner se compose essentiellement de fruits et de petits gâteaux en plus du set de thé habituel. Isabelle a tenu à éviter tous ce qui pouvait risquer la santé des enfants, notamment tous les types de plats contenant de la graisse et de la sauce. Force lui est d'admettre qu'elle s'est retenue de perdre les nerfs sur les domestiques en apprenant les mets excessivement calamiteux que Madame de Montespan ordonnait à manger pour ses enfants. La pauvre Louise Marie Anne est une fois tombée malade pendant deux jours à cause de cela.

Rien que ce détail a détruit le peu d'estime qu'il restait à la comtesse pour cette horrible femme qui disait veiller à ce que ses enfants aient une bonne constitution. Quand on parle du loup... On entend justement une porte qui s'ouvre dans le couloir menant à la salle à manger. Une voix mielleuse et malvenue retentit.

- Mes enfants ! Votre mère est là !

Le duc du Maine et Mademoiselle de Tours perdent immédiatement leur sourire. Mademoiselle de Nantes et le comte de Vexin agrippent fermement les bras de leur gouvernante. La marquise apparaît enfin sur le pas de la porte. Elle est venue seule.

- Allons, mes chers petits ! Venez donc m'embrasser !

À la surprise générale des deux femmes, les enfants ne se lèvent pas pour courir vers leur génitrice en feignant la joie de la voir. Ils vont au contraire se cacher derrière la longue robe de leur gouvernante – non, leur véritable mère – qui se met debout pour faire face à sa Némésis. Celle-ci fronce les sourcils et serre la mâchoire dans un rictus de colère. Son regard glacial ne laisse point le doute quand à ses intentions envers la comtesse.

- Madame, puis-je vous parler seule à seule ?

Isabelle adresse un sourire rassurant à ses petits protégés qui la fixent dans l'inquiétude. Elle les pousse avec douceur vers la porte. Sitôt qu'ils ont quitté la pièce, Athénaïs ne se prive plus pour laisser exploser sa mésestime. Elle s'approche à grands pas de sa vis-à-vis, ses chaussures tonnant sur le carrelage, et lui assène une gifle sonore.

- Misérable ! Comment osez-vous me voler mes enfants ?

La victime se remet droite, une main sur sa pommette endolorie et les yeux plein de fiel.

- Vous les « voler » ? Je n'ai jamais rien fait de tel. N'est-ce pas vous, Madame, qui êtes venue me trouver il y a bientôt deux mois dans mon propre château ? N'est-ce pas vous qui m'avez demandé en personne de m'occuper d'eux ?

- Surveillez vos paroles ! Je suis la favorite de sa Majesté ! La mère de ses enfants ! Et vous... Vous n'êtes rien ! Rien qu'une pauvre femme ayant tout perdu ! C'est à moi que vous devez votre nouveau bonheur !

Un regard sombre de courroux sourd et froid orne le visage de Madame de Langlois. Elle déclare d'une voix perçante et impassible :

- Non. Vous n'avez jamais eu de considération pour vos enfants. Il ne sont rien d'autre pour vous qu'un pâle reflet de la manipulation que vous exercez sur le cœur du roi. Vous ne les méritez pas, pas plus que vous ne méritez l'attention qu'il a encore pour vous.

- Qu'êtes-vous en train de dire ?

- Aussi longtemps que je serai ici, Madame, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour les protéger de votre ignoble personne. Sa Majesté ne vous pardonnera pas votre attitude.

Isabelle a tout juste le temps d'éviter la tentative de fauchage d'Athénaïs, qui s'est saisit d'un couteau présent sur la table et s'est jetée sur elle dans un mouvement hystérique. La marquise semble comme possédée, l'expression figée dans une haine viscérale.

La porte s'ouvre soudainement sur le roi, Monsieur de Hautecourt, Henri et Amélie. Ces derniers ont tous eus la même idée de se rendre à Vaugirard pour s'assurer de la sécurité de leur amie commune. À juste titre. La présence des enfants et de Clarence sur le seuil de la porte d'entrée de la résidence n'a fait que confirmer leurs craintes.

Louis s'élance sans attendre sur son ancienne amante qui lui fait dos. Fatale erreur. La dernière chose dont il se souvient est le cri de terreur de la femme qu'il aime avant que tout ne devienne monochrome.

********************

Vous ne vous attendiez pas à cela, n'est-ce pas ? Ou peut-être un peu, compte-tenu des indices laissés auparavant dans le récit. En ce qui concerne les personnages néanmoins, cette réaction de la Montespan n'était pas tout à fait prévue dans ce sens-là. Dans les temps les plus sombres se font les révélations.

Que va-t-il advenir de Louis et d'Isabelle ? Telle est la question.

Je vous dis à demain.


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