La Comtesse du Lys

By Sefariane

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En 1676, dans la France du roi Louis XIV. Isabelle Constance Madeleine de Langlois, comtesse de Vauboyen, es... More

Avant-propos
I
II
III
IV
Les enfants légitimés de Louis XIV
VI
VII
VIII
IX
X
XI
XII
XIII
XIV
XV
XVI
XVII
XVIII
XIX
XX
XXI
XXII
XXIII
XXIV
Mot de la fin

V

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By Sefariane

Remerciements à rotoplo et à cherrylikeblossom pour leur commentaires, ainsi qu'a tous ceux qui ont voté.

Comme dit la dernière fois, nous changeons de point de vue et laissons donc Isabelle pour quelques temps. Bonne lecture !

*********************

« Le vrai bonheur, c'est ça : un visage inconnu, et comment la parole peu à peu l'éclaire, le fait devenir familier, proche, magnifique, pur. »

Christian Bobin


L'invincible roi de France, Louis, quatorzième du nom, prince d'un génie rare et supérieur, s'est réveillé ce matin avec une pensée qui restera dans son esprit jusqu'à la fin de la journée. Une pensée qui dure depuis hier soir, lors de la soirée organisée par son frère.

L'image d'une jeune femme, semblable à un lys. Dès l'instant où il l'a vu, il aurait tout donné pour connaître son nom.

Mais à la surprise de la plupart des gens, le roi n'obtient pas toujours ce qu'il veut. En vérité, un roi doit vouloir moins que la plupart de ses sujets, car tous les désirs doivent être pour le pays qu'il gouverne. Même le grand Roi Soleil n'échappe pas à la règle.

Le souverain n'a guère bien dormi cette nuit, ou les semaines précédentes. Le ciel nocturne était son seul compagnon pendant les heures de solitude, y compris lorsqu'il dort avec son épouse Marie-Thérèse suite à chaque réception de la cour, comme il a coutume de le faire. Mais il s'est toujours senti inaccessible, pour bien des raisons autres que sa simple position.

Les lourds rideaux de velours cramoisi de ses appartements ont été tirés par les domestiques tôt le matin, avant que la lumière des étoiles ne soit tamisée par l'astre du jour. Louis entre dans sa chambre pour voir son fidèle serviteur et homme de confiance, Alexandre Bontemps, déjà habillé et qui attend patiemment que la journée commence.

- Bonjour, Sire. Avez-vous bien dormi ?

Le monarque répond d'un simple signe de tête, tout en s'asseyant sur le côté droit de son lit. Bontemps se dirige vers la porte des domestiques pour y frapper deux coups. Presque immédiatement, six serviteurs marchent d'un pas rapide en apportant les vêtements de leur maître pour aujourd'hui. L'un d'eux pousse soigneusement un miroir de la tête aux pieds avec un cadre doré fabriqué à la main par les meilleurs artisans de Venise, et Louis se place naturellement devant lui.

Une chemise blanche dans la soie la plus douce que la France ait jamais connue, décorée de volants lacés autour des poignets et du cou qui se balanceraient doucement à chaque fois que Louis bougerait. Les lacets viennent de Milan, des plus doux et des plus légers, fait de fils d'argents. Une paire de bas en lin blanc accompagne la tenue, confortablement portée juste en dessous. Mais tout cela allait être caché sous l'une des vestes préférées de Louis : une pièce artisanale dont la couleur bleue du tissu de velours, pendant jusqu'aux genoux, est la profondeur indicible de l'eau, sereine avec une présence éminente de royauté. Des centimètres de fils dorés sont délicatement cousus à la main le long des bras et de la poitrine, s'étalant comme des branches dans de lourds motifs floraux surmontés des meilleurs pierres précieuses d'Europe. Des étincelles de diamants et de rubis soulignent la divinité du roi.

Ce dernier s'assoit de nouveau au pied de son lit, tandis qu'un serviteur enfile ses pieds dans une paire de chaussures à talons de cuir rouge surmontés d'une boucle dorée. Puis il se lève à nouveau pour se diriger vers le miroir. Enfin, un long brin de soie raidie du rouge le plus brillant est resserré autour de sa taille alors que le domestique l'ajuste soigneusement en place.

Toutes les peines et toutes les pensées mises dans la garde-robe du roi de France n'ont qu'un seul but depuis toujours : crier la grandeur à tous les yeux.

- Bontemps, faites-moi envoyer François de Hautecourt dans l'après-midi à trois heures précise.

- Ce sera fait, votre Majesté.

Et tout le monde suit le roi hors de la chambre. Son esprit s'attarde encore sur ce lys humain blanc et pur, débordant de féminité. Elle l'intrigue.


- Ma mie, vous semblez bien contrariée. L'un de nos enfants aurait-il causé quelques désagréments ?

- Rassurez-vous, mon ami, ils sont d'une modération exemplaire. Notre petit duc du Maine fait preuve d'une intelligence et d'une culture remarquable, toujours dans la bibliothèque avec ses précepteurs. Mademoiselle de Nantes et Mademoiselle de Tours semblent pressées de devenir de belles princesses dignes de leur rang. La seule chose que nous pouvons déplorer est la santé de notre comte de Vexin.

- Mais ce n'est guère cela qui vous chagrine.

- En effet. C'est cette sotte de Régine qui s'est révélée d'une incompétence incurable. Il m'a fallut la renvoyer et nous n'avons plus personne pour s'occuper des enfants.

- Allons, ma mie, calmez ce trouble où votre âme est livrée. Nous trouverons bien une personne de vertu capable d'assumer la charge de l'éducation de nos petits anges.

Louis quitte sa favorite Athénaïs pour rejoindre ses appartements. Il y retrouve François de Hautecourt, lequel attendait l'arrivée de son souverain en compagnie de Bontemps.

- Vous m'avez fait demandé, votre Majesté ?

- C'est le cas, Monsieur. J'aimerai m'entretenir avec vous d'une affaire bien particulière.

Le roi congédie son domestique d'un signe de la main, laissant seuls les deux hommes qui ne tardent pas à s'installer autour d'un damier d'échec. L'âge des pièces constitue un avantage certain pour le Monarque du Soleil, car depuis le temps qu'il les utilise, il les connaît si bien qu'il n'a aucun mal à leur faire faire ce qu'il veut.

- Hier soir, vous étiez en bien charmante compagnie. Quelqu'un que je ne crois pas avoir reconnu parmi cette foule.

- C'est exact, elle n'a auparavant jamais été introduite à la cour. Mais je peux vous assurez, Sire, que cette jeune femme est tout à fait honorable, malgré les tragédies l'ayant frappées.

- Tragédies, dites-vous ? Est-ce pour cette raison que la couleur noire de ses atours la faisait ressortir ?

- En effet. La mort de son mari, le comte de Vauboyen, est à déplorer. Mais plus encore celle de son fils, qu'elle a perdu depuis bientôt un mois de cela. Ce n'est point faute de son frère et de son amie d'avoir voulu la soulager de sa peine en l'invitant à la soirée donnée par Monsieur votre frère.

- Parlez-moi d'elle en détails, je vous prie.

Monsieur de Hautecourt ne manque pas la lueur d'intérêt présente dans les yeux d'un gris acier de son souverain. Rien que ce petit indice l'inquiète aussitôt. Il est de notoriété publique que le dirigeant de la France a eut de nombreuses maîtresses, ce depuis sa jeunesse. On se rappelle toujours de cette histoire infortunée avec la jeune italienne Marie Mancini. S'en est suivit après leur rencontre une grande passion, contrariée par le puissant cardinal Jules Mazarin, oncle de la jeune fille, parrain du roi, premier ministre du royaume et prince de l'Église. La duchesse Louise de La Vallière et la marquise Marie-Élisabeth de Ludres n'étaient guère plus chanceuses, écrasées sous le poids de l'influente marquise de Montespan.

Une curieuse question se pose alors : Madame de Langlois serait-elle apte à résister là où ont échoué les précédentes face à l'orgueilleuse favorite officielle ?

Isabelle est certes plus jeune qu'Athénaïs, mais non moins brillante en terme d'esprit. Elle l'est peut-être même plus, l'expérience lui ayant appris de façon bien cruelle des leçons de vie fortifiant son caractère et renforçant sa sagesse. Sur le point de la joliesse, Monsieur de Hautecourt ne peut pas non plus nier l'infinie beauté de la comtesse, laquelle se porte avec une dignité sans prétention et une grâce authentique. Nul doute que si Dieu lui avait permit d'être épouse et mère sur une plus longue durée, elle aurait été parfaite dans ce rôle, n'ayant pas la fausseté de tous ces nobles pullulant à la cour. Une grande dame, digne, honnête et vertueuse, comme on en a jamais vu depuis longtemps.

Il lui manque cependant une unique chose : la foi, qu'elle ne semble plus avoir depuis la mort de sa famille.

- Isabelle Constance Madeleine de Montéclair, épouse de Jacques de Langlois, comte de Vauboyen. Devenue veuve à vingt-six ans, avant de perdre son unique fils à vingt-huit ans. Elle a conservé la demeure de son défunt époux sur les bords de la Bièvres, au Sud de Versailles. Le moins que je puisse dire d'elle est que la vie ne l'a fâcheusement pas privilégiée. Elle fait partie selon moi de ces âmes qui s'élèvent dans l'adversité. Mais bien que je ne la connaisse que très brièvement, je ne lui souhaite que de trouver un jour le bonheur auquel elle a été soustraite. Être entourée d'enfants à qui donner de l'amour, tel aurait été son vœux.

*********************

Eh oui ! Quand bien même Isabelle et Louis ne se sont pas encore rencontrés en tant que tel, il l'a vu. Sans surprise, elle lui a tapé dans l'œil. Et quand le roi pose son regard sur une femme qui lui plaît, elle ne peut plus lui échapper. 

J'espère que ce chapitre vous aura plu.

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