When the Curtain Calls (LS) ✓

Chapitre 21

They don't know what you've done to my heart

Louis

Après la quatrième répétition, dans un hangar gigantesque qui abritait notre scène et ses décors, Harry s'est évaporé. J'ai découvert qu'il était de retour à Salerne. Presque tous les jours, une notification me le rappelle. Je suis obsédé par ces photos radieuses de lui, à l'endroit où je l'ai perdu. Je lui en veux de réussir à y aller sans moi. Comme si le souvenir ardent ne l'était pas assez pour l'empêcher d'y revenir. Je m'en veux d'avoir dû activer ces alertes pour me donner l'impression de le garder un peu dans ma vie. Plus les semaines passent, moins je me résous à accepter la situation. Je l'admets, j'ai tenu à la maigre possibilité qu'il change d'avis. J'ai cru qu'il céderait. Faux espoir. Si notre relation n'était qu'une page à tourner, nous l'aurions pu depuis longtemps. Harry est cette ligne d'arrivée au fond d'un chemin de roses et de ronces que je semble infoutu de franchir. Il a raison, peut-être que je me suis habitué à la balade, le nez tellement perdu dans le décor que j'en ai négligé l'essentiel ; il m'attendait au bout.

Il hante mes pensées. Je brûle de jalousie de le savoir là-bas avec d'autres pendant que je tourne en rond chez moi. Après des semaines à penser au ridicule signe de la main qu'il a expédié pour me dire au revoir à la fin de l'émission, j'en rejoue les scènes en boucle. L'allusion de Niall à l'étreinte chaotique qui nous a réunis à la formation du groupe m'a donné une bouffée de chaleur. Une de celle qui surprend autant qu'elle réconforte. J'ai réalisé que j'étais fier d'entendre nos noms associés, fier d'être lié par ce genre de souvenir doux-amer que je n'ai qu'avec lui. J'ai tant donné sur le plateau pour lui prouver que j'étais capable de grandir, de mettre de côté mon mal-être pour le bien de tous, et lui, il se tire pour échapper à cette réalité dans laquelle il m'a emprisonné. Je porte mon cœur froissé à bout de bras. Je voudrais l'endurcir, ou le regonfler aux choses qui me soulagent. Je n'ai envie que d'Harry à mes côtés.

Lottie m'a gentiment signalé qu'il y a cinq ans, je lui avais imposé sans vergogne un second round avec Eleanor. Liam m'a envoyé un message pour me dire que je déconnais mais que je pouvais lui faire confiance si j'avais besoin d'extérioriser. Stan pour me proposer de me bourrer la gueule. Daisy pour me conseiller de fuir TikTok et Twitter. Niall pour me répéter qu'il était désolé et qu'il s'arrangerait pour ne plus évoquer le sujet en public. Zayn m'a rabâché que personne n'enchaînerait Harry et que je devrais me bouger pour le récupérer. Et puis Freddie a commencé à se demander où il était passé.

C'est ainsi que j'ai pris cette décision, un soir, mordu de frustration, ivre de fatigue et dopé à l'évidence que, de toute façon, j'ai déjà perdu ce qu'il y avait à perdre.

C'est ainsi que j'ai pris cette décision de mettre fin au carnage, de prendre la première sortie hors de ce labyrinthe infernal, de déjouer la fatalité.

C'est ainsi que j'ai pris cette décision de lui montrer que je n'ai plus peur d'être moi, que je suis prêt pour lui, prêt à être moi pour nous.

C'est ainsi que je me suis retrouvé, seul dans le silence de cet immense salon, au milieu de la nuit, assis à mon piano couvert d'un drapeau arc-en-ciel. J'ai recommencé. Une fois, puis deux, puis dix. Il y a toujours un mot qui reste coincé. Parce que je ne peux pas chanter cet amour sans avoir l'impression que l'on m'arrache le cœur. Ou parce que l'appareil qui me fixe de son trépied me remémore mon objectif. Alors je fais une pause. Je fume. Je respire. Je ferme les yeux pour le voir sous mes paupières.

C'est censé être libérateur non ? Qu'est-ce qui me bloque ? L'enjeu est sûrement trop gros, l'issue, vitale, les vers, amoureux. Ils transforment le confort de ma maison en falaise, où je tangue au bord du vide. Ce morceau plein de mon âme que je lui ai joué en Italie lui appartient. Le livrer au monde entier est un engagement assumé par mon cœur, constamment remis en question par ma tête. Je ne leur dois rien. C'est encore vrai. Mais je sais maintenant que je dois à Harry la clarté de mes sentiments, ce choix entre lui et les autres, entre le passé et le futur. Cette fois, il n'y croira que si j'ouvre la porte, à travers laquelle soufflera mon message à qui veut bien l'entendre.