Chapitre 14

1.7K 86 62
                                    

And I will hold you closer hope your heart is strong enough


Harry

— Louis, viens on descend.

Appuyé contre l'embrasure de la porte, je ne distingue que sa silhouette avachie dans la pénombre de la chambre aux rideaux tirés. Nos souffles lourds meublent le silence. Depuis que l'on est rentrés chez lui en catastrophe, les malheureuses couleurs qu'il a retrouvé virent au rouge et au vert. Il est absent, à fleur de peau, les jambes bringuebalantes sur le rebord du lit.

— Louis parle-moi.

Pour ne rien arranger, Lottie a débarqué avec Freddie dans les bras au retour d'une matinée d'école. Forcément, le petit n'a pas compris pourquoi son père n'a pas sourit en le voyant arriver.

Il n'escaladera pas ce mur de non-dits hissé entre nous. Il réaliserait à quel point moi aussi l'impuissance me lessive s'il n'était pas occupé à me glisser entre les doigts, pendant que je le retiens de tomber de l'autre côté.

— Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? finit-il par murmurer.

— N'importe quoi. N'importe quoi qui ne me fasse pas penser que tu oublies qu'on est ensemble dans cette histoire.

Ma répartie l'atteint assez pour qu'il lève les yeux vers moi.

— Tu veux dire n'importe quoi qui ne te fasse pas regretter de t'être embarqué là-dedans avec moi, lance-t-il.

Je tique, les sourcils froncés sous la contrariété. Même au bord du précipice, sauvé à la force de ma main, il me bouscule de ses mots. Pourquoi est-ce qu'il projette une énormité pareille quand je suis là, devant lui, le cœur dans la gorge mais la résistance au choc pour deux.

— Je ne regrette rien, si c'est ce que tu as besoin d'entendre, je réponds tout bas.

— Je n'ai rien besoin d'entendre. Je préférerais qu'on me foute la paix.

— L—

— J'ai. Besoin. D'être. Seul.

Le coup est tel que j'ai l'impression qu'il se débat dans mes bras. Je fournis un effort surhumain pour ne pas être balayé par son rejet. Je me persuade qu'il ne le pense pas, qu'il a besoin de moi autant que j'aurais besoin qu'il me rappelle pourquoi il voulait de cette relation.

— Sauf que ça ne marche pas comme ça Lou. Tu n'as pas besoin d'être seul tu as besoin de calme.

Il persiste à me fuir.

— Allez donne-moi ton téléphone. On se coupe du monde, on se pose, on réfléchit. Personne ne va nous défendre à notre place.

— Je l'ai jeté dans le jardin, m'avoue-t-il.

— Simple mais efficace.

— Et puis se défendre de quoi ? C'est déjà hors de contrôle.

— Tu te trompes. On est encore maîtres de nos réactions. On a le choix de comment on gère l'après.

— L'après apocalypse ? Ça tourne rarement bien désolé pour le spoiler.

Ses yeux ronds comme des billes, vidés de toute joie, s'ancrent aux miens sans leur parler. Il finit par les fermer, les paupières si serrées qu'elles en tremblent. Je m'approche de lui en douceur pour qu'il sente la chaleur de ma présence l'envelopper progressivement dans l'obscurité.

When the Curtain Calls (LS) ✓Where stories live. Discover now