Chapitre 2

138 23 13
                                    


Kalya 


Mais quelle horreur...

Si j'avais su, je n'aurais jamais accepté de confier l'enterrement de ma meilleure amie à ses crétins de parents ! Ils se trompaient sur toute la ligne. Enfin, pour l'intérêt qu'ils accordaient à leur fille de son vivant...

Elise et Thomas Marshall me donnaient envie de gerber ! La première, froide et impassible, se tenait fièrement au premier rang de cette église macabre, les mains croisées sur l'éloge funèbre de sa fille. Les yeux rivés sur le prêtre qui vantait les mérites d'Hazel ainsi que sa croyance en notre cher Dieu (quelles conneries !), cette femme horripilante ne laissait rien paraître. Elle hochait parfois la tête et chantait avec enthousiasme les divers chants funèbres dédiés à Dieu. Elle aurait pu être à un meeting politique que ça n'aurait rien changé !

Je n'avais jamais été un modèle de vertu. J'étais insouciante, parfois vulgaire, capricieuse et impatiente. Je noyais ça sous de l'humour mais, aujourd'hui, l'envie de rire m'avait passé. Assise derrière les Marshall, j'avais le plus grand mal à me contenir. La louve en moi n'avait qu'une envie : égorger ce foutu prêtre et gifler la mère d'Hazel jusqu'à ce que mort s'ensuive. J'en étais au point de pousser des petits grognements énervés à chaque mot débile. Et il y en avait beaucoup. La main de Camille, crispée sur mon genou, tenait de me retenir. Ça aurait été con de provoquer un scandale à l'enterrement de ma meilleure amie. Déjà qu'elle aurait détesté cette musique niaise, les dizaines de photos étalées sur des panneaux mis en valeur par des lumières funestes et les discours mielleux de ses proches...

Mon amie avait toujours détesté être au centre de l'attention. Cet enterrement grandiloquent ne lui correspondait en rien. C'était une véritable farce, organisée par Elise. Au moins, son mari, Thomas avait la décence d'être triste. Ses yeux rougis et ses mains tremblantes en témoignaient. Cette vision m'apaisait vite fait. Cet homme qui n'avait jamais porté ses couilles et toujours craint son épouse avait payé le prix fort : ses deux filles étaient désormais mortes. Et il n'avait plus rien, nada, walou, que tchi en dehors d'une femme tyrannique et de ses yeux pour pleurer.

- Elle avait une belle âme, illuminait son entourage par sa foi en Dieu...

Oui, c'était du Hazel tout craché.

Je jetai un coup d'œil vers Dylan, au fond de la pièce avec le reste de la meute. Les bras ballants, le visage dépourvu de toute émotion, il fixait les photos d'Hazel. Mon cœur se serra. Je regardai là un homme détruit, qui n'était plus que l'ombre de lui-même. Je doutais même qu'il n'entende ne serait-ce qu'un traitre mot de ce que disait les acteurs de cette mascarade.

- Elle laisse derrière elle une famille en deuil mais rassurez-vous : Hazel est auprès de notre Seigneur miséricordieux.

Mon cul. Loin de moi l'idée de critiquer Dieu et la foi de ses croyants mais là, on nageait en plein délire. Je me retins de lever les yeux au ciel alors que Zach, prostré à côté de moi, laissait échapper un sanglot. Ce n'était pas contre lui : je savais qu'il souffrait. Hazel avait été une personne importante dans sa vie et, même s'il l'avait déjà perdue amoureusement et amicalement, cette perte définitive lui brisait le cœur. En plus, lui aussi voyait à quel point cette mise en scène était ridicule.

Les discours s'enchainèrent. Sa foutue mère, Benjamin, son ami de fac, des oncles et des tantes... Autant de gens qui ne la connaissaient pas. Sa véritable famille n'avait pas droit à la parole. Camille, Axel, Chloé, Samuel, Maya... Nous étions tous là, les yeux brillant de rage. Alec et Coralie, dans le fond avec Dylan et quelques autres membres de la meute qui avaient fait l'effort de venir, affichaient une mine sombre. Tout du long, notre alpha avait fait de la merde. Mais il s'était attaché à Hazel et n'avait jamais voulu sa mort. La peine restait présente.

PatienceSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant