Chapitre 11 : Peur bleue

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- Kylian ?

Mon chuchotement ne semble pas lui parvenir et je constate qu'il est allongé dans son lit, son portable sur sa table de nuit. Je tente de le saisir pour regarder les photos de la lettre mais je me stoppe lorsque le froid d'une arme à feux vient au contact de ma nuque. Je m'arrête littéralement de respirer pendant plusieurs secondes.

- Si tu veux prendre un objet, ne soit pas aussi longue, tu te feras attraper du premier coup.

La voix de mon garde du corps ne me rassure qu'à moitié. Je reprends mon souffle seulement lorsqu'il pose l'arme sur son lit. Je tourne le regard vers lui qui arbore un léger sourire tandis qu'il est assis sur son lit.

- T'étais obligé de me mettre une trouille pareille ?

- C'était le plus drôle. De toute façon, il faut t'apprendre à gérer ce genre de situation. Tu me remercieras plus tard.

Ironique non ? Je me demande ce qui lui passe par la tête de temps en temps. Il m'a presque engueulé pour avoir serré le poing trop fort mais il est capable de me pointer une arme sur la nuque sans broncher ? Et après, c'est moi qui ne suis pas cohérente ?

- Elle n'était pas chargée.

Je replonge mon regard dans le sien et vois qu'il dit vrai. Evidemment. Il n'aura pas pris un tel risque.

- Bon, suis-moi. On a perdu assez de temps.

Je fronce les sourcils et me recule de quelques pour le laisser se lever. Il prend son portable sur la table de nuit avant d'enfiler une veste et de m'en coller une dans les mains. Je le suis jusqu'à la porte et suis étonnée de le voir prendre la direction du toit. Rapidement, il ouvre la porte menant sur l'extérieur et j'enfile rapidement la veste qu'il m'a prêtée pour éviter d'avoir froid. Une légère brise du soir vient balayer mes cheveux et les repousse derrière mes épaules. Je rejoins directement mon garde du corps qui s'est placé au milieu du toit tandis qu'il me tend son portable déjà déverrouillé, avec la lettre de ma mère affichée sur l'écran. Les mains tremblantes, je saisis l'objet et commence à lire.

Christophe, Kristen,

C'est une lettre d'excuse. Je suis vraiment désolée de partir de cette façon, mais je ne vois aucune autre solution. Je ne pourrais sûrement jamais m'excuser suffisamment pour couvrir la peine que vous ressentirez à votre réveil mais je ne peux pas continuer à vivre ainsi.

Je suis sincèrement désolée de devoir pour la première fois de ma vie agir de la sorte.

Vivez bien, sans moi.

Marie.

Comme si le téléphone m'avait brûlé la peau, je le rends précipitamment à Kylian avant de faire les cents pas. Comment ça « la seule solution » ?! De quoi elle peut bien parler ?!

Je souffle plusieurs fois tout en continuant de marcher. Depuis trois mois, des tonnes de questions se bousculent dans ma tête, et je pensais naïvement obtenir une grande partie des réponses grâce à cette lettre. Mais c'est tout le contraire. D'une, je n'ai pas obtenu de réponses à mes questions, mais maintenant, comme si ce n'était pas suffisant, d'autres questions surgissent dans mon esprit.

- T'avais raison. Ta mère ne s'est pas simplement tirée.

Je tourne brutalement la tête vers mon garde du corps. Comment ça ?

- Soit c'est une fausse, soit elle a été faite sous la contrainte.

- Pardon ?!

Même si la voix de Kylian est détachée, je ne peux m'empêcher de penser à la deuxième possibilité « sous la contrainte ». Ce qui ne serait pas bon du tout pour ma mère.

- Inutile de te mettre dans un tel état. Tu n'arriveras à rien si tu ne peux pas gérer la moindre hypothèse.

Cette fois c'est trop. Sans attendre, je plonge mon regard dans le sien avant de prendre la parole.

- J'ai pas appris à gérer tout ça moi ! J'ai rien demandé Kylian ! Alors mets-toi à ma place et imagine ce que tu viens de m'apprendre !

Lorsqu'il lâche un simple petit rire, s'en est trop. Je cligne des paupières avant de passer à côté de lui pour rentrer me calmer à l'intérieur. Seulement, et comme la dernière fois, il m'attrape le bras au passage et me fait me retourner vers lui.

J'essaye de me défaire de sa prise mais il la resserre légèrement. Une petite douleur vient pointer le bout de son nez et je grimace. Si je continue et qu'il ne lâche pas, il ne sera pas différent de mon père dans le couloir.

- Arrête. On n'a pas fini.

Je me stoppe et tente de le sonder du regard. Mais comme je m'y attendais, je n'arrive pas à savoir ce qu'il ressent. Pourtant, je suis plutôt douée pour ce genre de chose habituellement. Mais pas avec lui, et c'est en partie ce qui me dérange.

- Alors qu'est-ce qu'il reste à dire ? Hein ?

Je le provoque légèrement, mais je ne supporte plus les quelques bribes d'information qu'il lâche par moment. J'ai horreur de ne pas comprendre. Et avec lui, j'ai l'impression de ne jamais comprendre.

- Tu te rappelles ce que tu m'as répondu lorsque je t'ai posé cette question sur le toit la dernière fois. T'as déjà oublié ta réponse ?

« Je veux vivre. »

- C'est quoi le rapport ?

- Le rapport ? La vie, c'est pas facile, tu dois encaisser, et réussir à te contrôler. Crois-le ou pas, mais je sais ce que tu traverses. Le contrôle, c'est la clé. Alors maintenant, reprends-toi.

J'ai l'impression de me faire sermonner. De nature têtue et impatiente, je croise les bras sur ma poitrine lorsqu'il me lâche.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

Un petit sourire vient étirer les lèvres de mon garde du corps alors qu'il va reprendre la parole. Il prend le temps de remonter la fermeture éclaire de ma veste que j'avais laissé à moitié ouverte avant de poser ses deux mains sur mes épaules pour parler.

- Il est temps qu'on se mette au travail.

Protection rapprochéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant