𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟑𝟐

3.3K 120 79
                                    

ANGELINE

C'est donc ça... Ce que l'on ressent quand on perd pour toujours la personne qu'on aimait du plus profond de son âme.

Découvrir son corps inerte un dimanche matin sous le soleil de juin m'a brisée, m'a anéantie. J'ai l'impression d'être vide, que toutes mes émotions se sont envolées en même temps que son dernier souffle, sauf le chagrin. J'aurais dû le forcer à se reposer davantage ! Je savais qu'il en faisait trop et je l'ai laissé faire, je m'en veux tellement pour ça...

La dernière chose qu'il m'a dite, c'est : Bonne nuit, je t'aime. Une nuit que nous n'aurons pas vraiment passée ensemble, vu que je ne sais même pas à quelle heure il m'a rejointe dans le lit. Il m'avait pourtant dit de le réveiller, mais quand j'ai vu mes deux hommes endormis dans les bras l'un de l'autre, je n'ai pas pu le faire... Alors je me suis endormie tranquille, le sourire aux lèvres, jusqu'à ce que je me réveille. D'abord, j'ai cru à un cauchemar, mais j'ai vite fini par me rendre à l'évidence : c'était bien la réalité. Une terrible réalité.

C'est dans un t-shirt blanc, le visage serein, que je l'ai découvert. Et quand j'y repense, il avait l'air en paix. D'un côté, je suis soulagée qu'il soit parti dans son sommeil, car au moins il n'a pas souffert... du moins, je l'espère. Devoir vivre avec lui ses dernières heures, lui sur un lit d'hôpital et moi à son chevet, ça aurait été encore plus dur que maintenant.

— Angéline, tu es prête ? demande une voix qui me tire de mes pensées.

Je détourne le regard du lit où je n'ai pas pu dormir depuis plus de trois jours, pour apercevoir ma meilleure amie dans une robe noire très sobre, mais élégante. J'acquiesce puis nous sortons de l'immeuble et retrouvons Naël et Evan dans la voiture. Ils ont fait garder la petite Emma par une nourrice, ce qui est le mieux vu les circonstances...

Sur le chemin, personne ne parle, même pas mon fils qui est pourtant un vrai moulin à paroles... D'ailleurs, ces derniers jours, il n'a pas beaucoup parlé, ce qui m'inquiète de plus en plus. Nous n'avons pas encore vraiment eu de discussion sur le décès de son père et sur ce qu'il ressent. Je retarde ce moment, car je sais que lui se montrera fort, mais moi, je n'ai pas envie qu'il me voie m'effondrer devant ses yeux.

Nous arrivons au cimetière où nous retrouvons des amis, des inconnus à mes yeux, mais qui connaissaient Luke, et puis je retrouve ses parents, un couple charmant et adorable avec qui nous avons repris contact il y a trois semaines. Luke ne voulait pas leur dire, mais je l'ai poussé à le faire. Ses parents avaient le droit de savoir qu'il allait mourir...

Je m'approche d'eux et les prends dans mes bras, puis ils saluent Evan et mes amis. Luke et moi n'avons jamais été proches de nos parents respectifs. Nos parents ne voyaient pas la venue de notre fils comme une bénédiction alors nous avons vite pris un appartement à deux pour élever notre enfant. C'est cette horrible soirée qui a tout détruit. Je suis certaine qu'on s'en serait sorti et qu'on aurait vécu une belle vie à trois, même sans l'aide de nos parents.

Nous avons essayé de voir les parents de Luke tous les jours ces dernières semaines. Ils ont été atterrés par l'annonce de leur fils, ce qui est normal. Nous avions perdu pratiquement tout contact avec nos parents et j'avoue que parfois, je regrette de ne pas téléphoner à ma mère pour avoir de ses nouvelles, même si c'est elle qui nous a exclus de sa vie...

Après avoir salué tout le monde, nous nous installons sur la première rangée de chaises. Le maître de cérémonie commence son discours presque aussitôt. Les yeux rivés sur le cercueil posé droit devant nous, je tends la main pour attraper celle d'Evan et essayer de le rassurer... à moins que ce ne soit moi que j'essaie de rassurer. De convaincre qu'on va réussir à se reconstruire après avoir perdu le rayon de soleil qu'était Luke !

ÉvangélineDove le storie prendono vita. Scoprilo ora