𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟏

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ANGELINE

Evan a été sage comme une image et j'ai donc pu me reposer, voire même fermer l'oeil de temps à autre. Ensuite, nous avons mangé et j'ai envoyé un message à Luke pour qu'il passe nous chercher, en début d'après-midi.

Il est à peine treize heures trente quand nous arrivons au Zoo. Mon fils a toujours le sourire aux lèvres et j'aime tant le voir comme ça. Après avoir acheté des tickets, nous entrons tous les trois, Evan nous tenant chacun une main. Nous commençons le parcours sous un beau ciel bleu, enveloppés tous les trois dans une bulle de tendresse.

Nous déambulons à travers les enclos en émettant des commentaires sur les différentes espèces que nous apercevons. Evan se fait une joie de lire tous les panneaux d'information concernant les animaux et leur mode de vie. Je ne pense pas qu'il sera comme son père, un grand sportif... Je le vois plutôt comme un intellectuel passionné. Je ferai tout mon possible pour qu'il devienne ce qu'il souhaite.

Après les animaux de la savane, nous découvrons les espèces aquatiques. Evan est sur les épaules de son père et j'en profite pour les prendre en photo devant le bassin des dauphins. Au bout d'un moment, Luke le fait tout de même descendre de son perchoir et le repose par terre.

— Allez, fiston, tu vas marcher un peu, lance-t-il en toussotant.

Je le dévisage un instant avant qu'il me regarde avec un mince sourire sur les lèvres, puis nous continuons la visite. Nous prenons une autre photo, mais cette fois tous les trois avec les manchots.

Nous les observons attentivement quand je me rappelle soudain de quelque chose que j'ai lu dans un article :

— Evan, tu sais... Quand les manchots trouvent leur partenaire, c'est pour la vie.

— Ah oui ? m'interroge-t-il avec de grands yeux.

— Oui, et même que pour draguer la femelle, le mâle lui montre des cailloux.

Il tourne la tête vers son père et nous nous mettons à rire tous ensemble.

Avant de partir chacun chez soi, nous décidons de prendre un goûter devant l'enclos des flamants roses. Deux glaces vanille pour les adultes et une au chocolat pour le chenapan. Je me sens si bien à cet instant. Le bruit de fond avec les cris des animaux et les enfants qui rient, la légère brise de vent qui nous rafraichit, voir mon fils et Luke si heureux, tout ça fait de moi une femme presque comblée... Quand je les observe tous les deux, je me dis que j'aimerais que ça soit tous les jours comme ça. Qu'il n'y ait que nous trois contre le reste du monde. Que nous soyons une famille pour le reste de nos jours..., mais je sais que ce n'est pas possible. Dans quelques jours, l'audience aura lieu et tous les rêves que Evan a construits pour lui et son père vont être détruits... Il va falloir lui en parler...

— Je me demandais... où loges-tu, Luke ?

— À l'Ohio Motel. C'est assez sympa.

— Tu n'es pas retourné chez tes parents ?

— Ils ne savent pas que je suis rentré...

Je reste perplexe, sans savoir quoi répondre à part : pourquoi ? Mais ça ne me regarde pas... Il doit bien avoir une bonne raison de ne pas leur dire qu'il est rentré - même si j'ai bien du mal à voir laquelle.

Après avoir savouré nos glaces, Luke nous ramène jusqu'au pas de la porte de l'immeuble. Le silence s'installe tandis que nous nous dévisageons avec intensité. Oh Luke, si seulement tu me disais la vérité...

— Merci pour cette balade...

— Avec plaisir. J'ai adoré passer du temps avec vous.

— Papa, tu montes ? s'enquiert Evan.

— Non, fiston. Je vais rentrer et vous laissez un peu rien que vous deux...

— Tu ne nous déranges pas.

— Je sais, mais il est temps que je parte... On se revoit très vite, d'accord ?

Evan acquiesce de la tête et entoure son père de ses petits bras. Attendrie, je regarde Luke déposer un baiser sur son front. Il monte dans sa voiture, nous fait un dernier geste de la main puis démarre et s'éloigne avant de disparaître totalement de notre champ de vision.

Alors qu'on s'apprête à monter, je décide d'aller plutôt chez Sofia. Chez elle, Evan raconte avec enthousiasme sa journée au zoo. Nael, voyant que j'ai besoin de parler à sa femme, s'occupe d'Evan et d'Emma pendant que ma meilleure amie m'invite à m'asseoir à la petite table du balcon pour discuter.

— Ces deux derniers jours, notre lien était... si fort. C'était exactement comme avant, Sofia. J'ai retrouvé notre complicité, et ses regards pleins de tendresse... J'aimerais lui dire tant de choses. Tout ce que j'ai sur le cœur... mais je n'ai pas le courage...

— Angel... Tu te rappelles comment tu étais quand vous vous êtes séparés ? Tu ressemblais plus à un cadavre qu'autre chose. Je n'ai pas envie que tu redeviennes comme ça, mais... Si tu penses que cette fois-ci c'est la bonne chose à faire, fonce ! On n'a qu'une vie, tu n'auras peut-être pas d'autre chance pour lui dire... Écoute ton cœur.

Je regarde ma meilleure amie d'un air soucieux. J'ai toujours aimé me confier à Sofia pour sa sagesse et parce qu'elle n'est jamais à court de bons conseils. Je dois avouer qu'encore une fois, elle n'a pas tort. Mais c'est bien plus facile de lui en parler que de prendre mon courage à deux mains...

— Je garde Evan jusqu'à ton retour. Va le retrouver.

— Il va falloir que je te paie à force, vu les heures de babysitting que tu fais !

— Si seulement ça pouvait arriver... réplique-t-elle d'un air faussement exaspéré, avant de se mettre à rire.

Je la prends dans mes bras et la remercie une énième fois de tout ce qu'elle fait pour moi. Nous entrons dans le salon et je me dirige vers mon fils.

— Chéri, tu restes ici un petit moment, je reviens te chercher dans la soirée, d'accord ?

— Tu vas où ?

— Je vais... faire des courses, j'essaie de revenir pour vingt heures.

Il acquiesce, j'embrasse son front et lui souris.

— Je vous revaudrai ça !

— J'espère bien ! rit Sofia.

Je sors dans la rue et hèle un taxi qui me dépose devant l'Ohio Motel. Je reste un moment sur le trottoir, à regarder avec étonnement le bâtiment qui me fait face : c'est le même genre d'établissement inquiétant que l'on voit dans les films, à l'écart de la ville, au bord d'une route déserte. Mais celui-ci paraît plus moderne et chaleureux. En somme, pas flippant du tout. Je jette un oeil aux voitures garées devant les petites portes vernies des chambres : je repère rapidement celle de Luke devant une porte rouge. Je prends une grande inspiration avant de me lancer d'un pas bien décidé. Je toque à la porte énergiquement et attends...

Les stores de la fenêtre bougent et j'aperçois la silhouette de Luke. Finalement, la porte s'ouvre :

— Angel, qu'est-ce que tu fais là ? Où est Evan ?

— Il est chez Sofia et j'ai des choses à te dire, alors s'il te plaît écoute-moi avant de m'interrompre.

— D'accord...

Il me laisse entrer. La télévision est allumée, le lit est défait, mais la chambre est bien rangée. Je me retourne vers Luke qui a les mains dans ses poches comme à chaque fois qu'il est nerveux... À cet instant, nous le sommes tout les deux. Au moment où je prends la parole, le coeur battant à tout rompre, j'ai l'impression de sauter dans le vide. Mais il est trop tard pour faire marche arrière...

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Et voilà pour un nouveau chapitre ! 
Qu'est ce qu'Angel va lui dire ? ♥

ÉvangélineWhere stories live. Discover now