FATAL POISONING (W/ J.B) || Terminée

5. Je ne peux pas y croire

Plus de trente heures sont passées et je ne ressens rien. J'ai l'impression que ce que m'a dit Dearf a aucune importance, que tout cela n'est qu'un mauvais rêve, que Ryan se tient encore en vie, que son cœur bat toujours, que ses poumons puisent encore l'aire. Je ne pleure pas, je ne sors pas, je suis encore sur mon lit, les yeux fixant les nombreuses goûtes qui dérivent le long de ma fenêtre, mon corps replié contre mes jambes me demandant ce que l'on ressent lorsque quelqu'un meurt. Est-ce que cela nous fait quelque chose ? Oui ? Alors pourquoi je ne ressens rien ? Pourquoi lorsque l'image de Ryan m'enrobe l'esprit, je n'arrive pas à me dire qu'il est mort ? C'est une personne extraordinaire, une personne sur qui l'on peut toujours compter, qui nous défend sans cesse, qui sait faire rire à n'importe quel moment. Je peux pas y croire, pas lui. Mon téléphone vibre entre mes mains, laissant s'afficher un deuxième message de Dearf. Je gonfle mon thorax, puis clique sur afficher.

« L'enterrement est samedi, à l'église de Greek Town. »

Mon cœur se serre et une larme me grimpe aux yeux. Pourquoi je ne ressens rien ? Pourquoi je suis si vide ? Pourquoi je ne peux pas y croire ? Ryan est mort et je suis là, complètement sans sentiments.

« Silver, dis-moi ce qu'il se passe, me dit Alec adossé contre la porte les bras croisés. »

Je détourne immédiatement le regard, n'arrivant toujours pas à prononcer un seul mot. Tu m'avais promis que je les reverrais, que je le reverrais, mais tu t'es trompé...

« Ça fait deux jours que tu es là, enfermée dans ta chambre, sans dire un mot à personne, dit-il en soufflant. Je m'inquiète vraiment. »

Je relève la tête croisant son regard véritablement pour la première fois depuis presque deux jours. Une larme s'installe juste en dessous de ma pupille. Je veux pas craquer maintenant, pas ici, pas devant Alec. Mais tout est trop tard, je n'arrive pas à la retenir, elle dérive longtemps sur ma joue. Je reste, fixant les yeux d'Alec alors que lui se mort la lèvre, presque impuissant. Sachant bien qu'il ne faut pas m'approcher quand ça ne va pas et encore moins me toucher.

« Silver, prononce-t-il d'une voix brisée. »

Je relâche tout, sentant mon cœur se faire écraser pour la deuxième fois. La tristesse de mon frère est l'une de mes plus grandes faiblesses. Je me lève de mon lit alors que je sens mes joues se mouiller à chaque pas vers Alec comme si je m'effondrais un peu plus au sol. Je sens ses bras m'entourer. Je veux pas croire que tout est fini.

« Il est mort Alec, me retenant encore plus à lui. »

« Qui ? »

« Ryan, laissant toute souffrance à l'aire libre. »

Les mains d'Alec se referment encore plus contre les parois de mon tee-shirt. J'ai l'impression que plus rien ne me retient, que je perds tout, que mon corps est nu, complètement bouffer par les démons que lui envoie la mort. Ma respiration se mélange à mes larmes, s'arrêtant quelque fois, voulant en laisser dans mes poumons. J'ai besoin d'aire. Je me sépare d'Alec et sors de ma chambre avant de dévaler les escaliers.

J'étouffe, j'ai ce sentiment de manque comme si mes poumons étaient compressés, c'est insupportable. J'enfile mes bottes et me lance dans le froid qu'annonce cette première semaine d'octobre.

Je marche droit devant moi, inspirant fortement chaque bouffée d'air que j'arrive à attraper, je souffle, laissant encore quelques goûtes m'arracher le cœur, me le pinçant avec passion.

Mon Ryan, comment tu as pu partir ? Comment tu as pu te faire avoir par la mort ? Toi qui es si attentionné, qui ne fait pas un pas de travers lorsque tu es seul ? Malgré l'été dernier, tu as toujours su prendre soin de toi, tu m'avais promis de faire attention à toi et à Dearf. Je suis à bout, mon cœur bat faiblement comme une pure douleur qui fait terriblement mal. Je m'assois sur un banc, ayant le besoin de relâcher mes jambes. Je passe mes mains sur mes joues, ne voulant que personne ne se rende compte de ma douleur. Je rejoins mes mains à mes poches et inspire fortement, me souvenant d'un souvenir avec lui.