Ange

27] Lionne

Ange n'a pas aimé cette visite de l'inspecteur Delaunay. Elle a fait une erreur en se dévoilant de la sorte, mais ce masque de tristesse et de timidité commençait à la démanger beaucoup trop et elle n'a pu faire autrement que de le retirer. Partiellement, cela va de soit, mais déjà beaucoup trop.

Elle a besoin de faire redescendre ses tensions et ne voit pour cela qu'une solution: se nourrir.

Alors très rapidement, elle prend dans son congélateur un nouveau morceau de viande et le met à cuire avant de croquer dedans, mais cela ne la satisfait pas.
Elle ne ressent pas ce qu'elle voudrait.
Elle veut plus. Elle veut un orgasme gustatif et psychique. La viande congelée n'a rien de fantasmatique. C'est comme donné un poulet décongelé à une lionne affamée.
Cela n'a aucun sens.

Ange a besoin de chair fraîche.
Elle a besoin de sang chaud, de muscles tendres, de tissus souples. Et surtout, elle veut tout ça cru, directement arraché avec les dents sur son propriétaire, comme une lionne dévore une gazelle tout juste tuée.

Elle balance le morceau décongelé à l'autre bout de la pièce et attrape son manteau pour sortir.
Il est temps pour la lionne de chasser...

Cela a encore été plus simple que prévu de ramener un parfait inconnu chez elle.
Il a suffit d'un regard dans la rue, d'un mot, d'un geste, et il était déjà piégé, sans même le savoir. Piégé par ses propres hormones, par ses propres pulsions.
Ce genre de gazelles sont bien trop naïves et pensent que les lionnes dorment, alors qu'elles sont plus éveillées que jamais.

L'inconnu en question est un jeune trentenaire, totalement envoûté par Ange, qui le guide dans ses escaliers puis jusqu'à chez elle.

A peine a t'elle refermée la porte derrière eux qu'il la plaque contre le mur pour pouvoir l'embrasser goulûment. La jeune femme en aurait presque la nausée mais comme toujours elle ne se laisse pas dominée par ce genre d'écœurement et continue de jouer le jeu jusqu'au bout.

Il s'écarte légèrement d'elle pour retirer son t-shirt et son jean puis plaque de nouveau son corps contre le siens en faisant glisser ses mains vers le pantalon d'Ange.
Mais cette fois, elle n'a ni la patience ni l'envie de faire durer les choses. Elle a faim et elle n'a pas envie de jouer, alors sans attendre davantage elle lui prend la main et l'attire jusqu'à la salle de bain.

-Ahah tu veux directement faire ça sous la douche?

Pour toute réponse elle lui sourit malicieusement, ne pensant en réalité qu'au fait qu'ainsi elle n'aura pas à déplacer le corps pour le découper ni à nettoyer entièrement son appartement.

Elle referme la porte derrière eux, et alors que l'innocent garçon pense avoir droit à un show des plus sensuels, Ange ouvre son pendentif et vient trancher sa gorge du même mouvement certain dont elle a désormais l'habitude.
Le même regard, le même étouffement, le même gémissement, et la même façon pathétique de s'effondre avant de mourir.

C'est drôle, la façon dont tous les humains se ressemblent lorsqu'ils font face à leur propre fin...