Ange

24] Four

Jusqu'ici, lorsqu'Ange a tué, c'était toujours calculé et prémédité. Mais pour la première fois ça a été dans un élan de panique et d'instinct.
Elle regarde le cadavre gisant de l'homme sur le sol et la première pensée qui la traverse est qu'elle ne pourra pas se débarrasser du corps. Pas cette fois ci.

Elle regarde à sa gauche, à sa droite: personne.
Aucun témoins.
Il faut qu'elle parte d'ici le plus rapidement possible. C'est sa seule chance.

Alors sans demander son reste, elle se met à courir hors de cette ruelle, loin de ce corps, loin de ce sang, loin de toute preuve de sa culpabilité...

-Ce n'est pas comme ça que ça devait se passer! Non! Ça ne devait pas arriver!

Ange tourne en rond dans son appartement, se rendant compte à quel point ce qu'elle a fait est stupide.
Heureusement pour elle, ce genre de type ne soulèvera pas beaucoup d'interrogations. Un règlement de compte, point final, c'est ce que se diront les flics, du moins elle l'espère.

Son cerveau fume, elle a besoin de se reposer, elle réfléchit trop.
Elle a faim. Et elle a besoin de se doucher. Son visage doit être propre de toute trace de son sang et de celui de ce porc.

Elle avance vers le congélateur, l'ouvre et en sort un nouveau sac plastique.
Elle allume son four, met le morceau de viande sur la plaque de cuisson et l'enfourne. Elle n'a jamais été bonne cuisinière et se moque bien de savoir si c'est comme cela que les grands gastronomes français feraient. Elle veut simplement une viande chaude et décongelée à se mettre sous la dent.

En attendant que cela cuise elle va dans la salle de bain, se déshabille et monte dans la baignoire.

Cette fois ce n'est pas un cauchemar qui la réveille en sursaut mais la sonnerie de son interphone.
Elle met quelques secondes avant de se souvenir de ce qu'il s'est passé la veille.
Elle regarde son téléphone, il est près de midi.

Elle se lève et va répondre, la voix encore légèrement fatiguée.

-Oui?
-C'est l'inspecteur Delaunay.

Ange commence à perdre patience avec cet homme. Combien de temps a t'il l'intention de la harceler? Elle aimerait bien en finir avec lui mais ce serait signer son propre arrête de mort...

Lorsqu'il frappe à sa porte elle lui ouvre.

-Bonjour Madame Succube, excusez moi de vous déranger mais...

Il se coupe brusquement dans sa phrase lorsque ses yeux tombent sur le corps d'Ange. En effet, le jeune femme est en simple t-shirt et culotte, la tenue dans laquelle elle a dormi.
Ce n'est absolument pas un oublie de sa part bien-sûr, mais c'est une très bonne technique de déstabilisation... et d'ailleurs cela a l'air de fonctionner sur celui là.

Elle suit son regard et simule un gène honteuse:

-Oh mon dieu excusez moi je... je viens de me réveiller...

Elle referme légèrement la porte et va enfiler un bas de jogging avant de revenir pour le laisser entrer:

-Ne vous en faites pas. C'est moi qui suis désolé de venir à l'improviste une nouvelle fois.
-Il y a quelque chose de nouveau à propos d'Erwan?
-Malheureusement non...
-Alors... pourquoi êtes vous ici si ce n'est pas pour sa disparition.
-Je suis ici pour un meurtre.