1- L'héritage

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Cela faisait maintenant six mois que Madeleine avait reçu l'avis de décès d'une vieille tante, Bouquette de Rostang, une aristocrate dont elle ne se souvenait que très vaguement.

Deux ans que son mari officier avait disparu. De lui, elle se rappelait parfaitement. Une mission en Irak, pendant la Guerre du Golfe... Une période terrible qui tendit ses rapports avec Suzy, sa préado au caractère bien trempé. La petite dernière, Sarah, ne comprenait pas pourquoi son papa ne reviendrait pas... Perdre son amour de toujours dans des circonstances si étranges avait été difficile à justifier, à soi-même et aux autres. Un deuil impossible, sans dépouille. Un changement de vie radical et sans appel.

Sa santé en pâtit. Elle qui n'avait jamais travaillé, sinon à la bonne marche de son foyer... Car Madeleine fut une épouse de militaire dévouée. De nouvelles responsabilités lui incombaient, désormais.

Pour ses enfants elle dut refaire surface et finit par s'engager dans une carrière d'aide-soignante. La maison de retraite où elle travaillait en était très satisfaite. Mais malgré un salaire et la pension de son mari, elle ne pouvait acquérir le toit rêvé, pour elle et ses petites. La mort dans l'âme, elle s'était résignée.

— Tiens Maman. Je crois que c'est pour toi, fit Suzy en lui tendant le courrier.

Un notaire la convoquait. On lui annonçait qu'elle était citée dans le testament de sa tante... Comme seule héritière du domaine familial, puisque Madame de Rostang n'avait aucune descendance.

Un domaine ? C'était une aubaine inespérée ! Elle l'annonça aux filles, qui sautèrent de joie directement dans le lit de leur mère. Carpette la petite chienne, se joignit à l'euphorie générale.

Une fois passées les réjouissances, Madeleine se questionna. Qu'allait-elle faire d'un tel endroit ?

Dans sa lettre, le notaire lui assurait qu'il avait été parfaitement entretenu. Du moins, jusqu'à la mort de la maîtresse des lieux. Il y avait même un pécule prévu à cet effet. Les filles étaient survoltées. Suzy, sa fantasque d'aînée ne put s'empêcher de rêver :

— Waow, ça veut dire qu'on est riches ?

— Je ne dirais pas ça, non !

— Quand c'est qu'on va voir la grande maison ? demanda Sarah.

— Je dois appeler ce fameux notaire pour connaître les détails. Au moins pour vérifier que tout cela est bien réel. J'ai encore du mal à le croire...

— Appelle ! l'encouragea Suzy.

— Oui, Maman, appelle le monsieur !

C'est ce qu'elle fit. Après tout, inutile de tarder plus longtemps. Au moins serait-elle fixée pour envisager leur avenir sous de meilleurs auspices.

L'homme de loi, qu'elle eut rapidement au bout du fil, confirma ses écrits. Il n'y avait plus le moindre doute. Elle pourrait signer les papiers et récupérer les clefs rapidement.

Et c'est ainsi qu'un soir pluvieux d'automne, toute la famille se rendit à trois heures de route jusques aux vieux murs de son nouveau foyer.

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