(9) - Zeit

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Octobre 1943

Les yeux au ciel, sur le rebord de la fenêtre, elle profitait du temps encore doux de ce début d'automne.
Les vendanges étaient finies depuis peu, et elle pouvait enfin un peu respirer après tout ce travail accomplie en si peu de temps.
Plus d'un an après la mort de son père, la boutique n'avait pas perdue en chiffre d'affaire, et toutes leurs ventes en Allemagne l'avait même considérablement augmenté.
Même si de curieux sabotages sur leurs cargaisons avaient lieu de temps à autre depuis quelques mois, ils s'en portaient plutôt bien.
Ils semblaient apprécier leur crus, dont elle ne niait pas la qualité exceptionnelle.
Si pour d'autres la guerre avait causé une misère financière et une disette certaine, eux, n'avait pas tellement à s'en plaindre.
De plus, comme ils hébergeaient les allemands, ils veillaient à ce que tout le monde soit quand même bien nourri, et c'était un certain avantage.

Les affaires sont les affaires, lui disait son père,et la famille passe avant tout, même si cela peut sembler malhonnête.
La française avait un peu de peine pour tout ses gens qui vivaient dans la misère et qui devaient faire la queue pendant des heures pour une bouchée de pain.
Mais au moins, ici, ils vivaient plutôt bien pour l'époque, et tant que sa mère, Hansi, Hannes et son personnel allaient bien, alors elle pouvait être satisfaite.

Replaçant une de ses mèches de cheveux, elle tourna son regard vers son lit, un sourire se dessinant, en observant l'homme nu assoupi dedans.
Qu'importe si il ne plaisait pas aux autres dames en Allemagne. Elle, elle le trouvait magnifique, dans toute sa personne.
Et là dessus encore, son père avait raison, les apparences sont trompeuses, Livaï n'était pas comme tous les autres nazi.
Il ne le désirait pas, rien de tout ce qu'ils faisaient, et comme elle, il avait fini par fonctionner par intérêt.
Il ne pourrait pas refaire le monde seul, et leur seule relation était une belle façon de faire un grand doigt d'honneur à ceux qui le leur interdisait pour X raisons.
C'était peu, mais c'était déjà bien, assez pour qu'il puisse se sentir mieux.

Après tout, cela faisait presque un an qu'ils se voyaient dans le plus grand des secrets, et en détaillant son visage apaisé et endormi, elle se demanda combien de temps cela pouvait encore durer.
Leur présence ici ne serai pas éternelle...
Elle le savait bien, et était loin d'être aveuglée par un amour écoeurant, qui lui pousserai à croire qu'il serait à ses côtés pour l'éternité, juste parcequ'ils étaient amoureux.
Et ça, putain, elle ne pouvait pas le nier qu'elle l'aimait.

Mais quand ?
La question tournait dans sa tête.

Quand la guerre sera finie ?
Mais quand sera elle finie au juste ?
Tout semblait stagner, et à ce rythme,les anglais finiraient par perdre. S'en suivait de toute les conséquences qui venaient avec leur défaite, asservissement du monde, et probablement anéantissement de tout ce qui n'est pas allemand.
Les juifs auraient tous disparus on ne sait où, et Mike avec.

Mike... Où était il ? Que faisait il maintenant ? Elle se le demandait.
Il lui manquait tellement, sa voix, sa présence, ses blagues, tout. C'était un drôle de vide sans lui dans sa vie, et c'était là un vide que même Livaï ne comblait pas.
Ils étaient si différents tout les deux, si opposés, et si la logique aurait voulu qu'elle soit éperdue d'amour pour Mike, grand, blond, drôle, français et qu'elle connaissait depuis toujours, et bien non. Elle préférait le petit teigneux, pas très commode, renfermé à l'humour noir, et dont les lèvres étaient imprégnées de thé amer, qu'était l'allemand dans son lit.

Si complexe... L'amour...

Livaï savait être si différent et complexe dans sa personne. Puis, elle avait finie par comprendre, force d'habitude, qu'il n'était ni une porte d'acier ou un bloc de glace, mais juste un homme maladroit.
Quand il cherchait à exprimer ses sentiments, il le faisait toujours comme un enfant, à tourner des mots dans sa tête, laissant de grands vides, à se rattraper dès qu'il avait dit quelque chose, parcequ'il avait peur que ce soit déplacé.
Et il en avait déjà dit, des choses déplacées, mais elle ne lui en avait jamais vraiment tenu rigueur.
C'était peut être même là une forme de timidité, et de sensibilité chez ce jeune homme.
Il était rare qu'il lui dise ces mots d'amours dont toutes les femmes étaient folles. Livaï ne disait pas les choses, il n'aimait pas perdre sa salive avec des mots inutiles et perdus dans les airs, il était plus démonstratif.
Elle le ressentait lorsqu'elle était près de lui, et que les pulsations vives de son cœur arrivait jusqu'à ses oreilles, lorsqu'il lui faisait l'amour en veillant à ne jamais la blesser ou faire quoi que ce soit qui puisse l'offenser ou l'humilier. Parfois elle le trouvait tellement soucieux de cet aspect, qu'elle se demandait si il ne sacrifiait pas même son propre plaisir.
Mais là dessus, elle avait vite su contrer en trouvant ce qui lui plaisait à lui.
Aussi lorsqu'il lui proposait de danser au son d'une quelconque musique, où quand il se pointait avec un plateau rempli de petits gâteaux et de thé.
Elle adorait les sucreries, parfois un peu trop pour son propre bien, mais l'allemand pour le coup ne semblait pas réellement plus innocent.

Livaï X Reader | L'absurdité de ce monde Kde žijí příběhy. Začni objevovat