Chapitre 7

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THE LUMINEERS - ANGELA



Abasourdie, Blanche bondit de sa chaise et sortit en trombe du café, à la poursuite de la petite fille. Son cœur battait à tout rompre. L'avait-elle réellement aperçue entrer dans le tableau ? Cela paraissait impossible. Son cerveau devait lui jouer un tour. Pourtant, elle accéléra la cadence en direction de la rue afin de retrouver le tableau en question. Le son de ses pas résonnait sur les pavés mouillés. Ralentie par la foule dense, elle s'extirpa péniblement de la masse et se retrouva face au stand de peintures, bouche bée. Aucune trace de la petite fille.

Jetant un coup d'œil à l'œuvre, elle n'aperçut aucune anomalie, aucune marque de doigts. Encore sonnée, elle scruta les environs, guettant la moindre mèche de cheveux blond clair. Elle demanda au vendeur dans quelle direction était partie la petite fille aux cheveux si particuliers. Il la regarda et mima sa disparition d'un geste de la main, comme si elle s'était volatilisée par magie. Les sons émanant du monde alentour lui parurent lointains. Tout semblait avancer au ralenti, presque venu d'une autre dimension. Au bout de la rue, près du saxophoniste, les enfants s'étaient réunis, jouant à un jeu au sol avec des bâtons et des cailloux.

S'approchant lentement, la jeune femme observa la scène, chassant distraitement ses cheveux mouillés de sa vue. Elle porta son regard au coin de la rue, situé derrière le café où elle était assise un instant auparavant. Soudain, un visage fin aux yeux malicieux apparut le temps de quelques secondes, caché dans le coin d'une rue perpendiculaire. Sans prendre le temps de réfléchir, Blanche s'élança dans cette direction, suivant son instinct. Arrivée au bout de la rue, elle fit une halte et regarda autour d'elle.

Aucun signe de la petite fille. Poussant un soupir, elle posa les mains sur ses cuisses, reprenant son souffle. Elle ne prêta pas attention à l'ombre silencieuse qui la suivait depuis maintenant plusieurs minutes. Une voix grave et mélodieuse la fit sursauter, s'exprimant en anglais :

« Tu ne la retrouveras pas. »

Apeurée, elle se redressa et se retourna prestement pour observer l'interlocuteur. Ses yeux se posèrent sur un jeune homme adossé de manière nonchalante contre le mur en briques du café. Ses cheveux sombres en bataille créaient des ombres sur son visage anguleux. Sa veste en cuir trempée collait à son corps. Elle ne savait pas ce qui la choquait le plus : la surprise à la vue de cet inconnu ou sa beauté presque insupportable. Son sang ne fit qu'un tour lorsqu'elle le reconnut. C'était l'homme du café, celui qui cornait les pages. Son visage se referma et elle lui répondit sur un ton froid :

« Mais de quoi je me mêle ? Tu m'as suivie ? »

Il leva les yeux au ciel. Son comportement lui donnait envie de casser quelque chose. Son air hautain lui tapait sur les nerfs. Il lui répondit sur ce même ton suffisant :

« Tu as le livre, au moins ? J'espère ne pas être venu pour rien, tout de même. »

Elle eut le sentiment que sa mâchoire venait de tomber par terre. Fermant les paupières, elle tenta de se composer un air calme. Comment pouvait-il lui faire ressentir autant d'émotions alors que leurs chemins ne s'étaient encore jamais croisés ?

« Je te demande pardon ?

— Si tu pouvais arrêter d'être choquée dès que j'ouvre la bouche, ça m'arrangerait. Je n'ai pas ton temps, moi. »

Était-il possible de détester quelqu'un au bout de quelques secondes ? Il semblerait que oui. Son irrespect l'agaçait plus que tout. La mâchoire crispée, elle lui offrit un regard glacial et répliqua :

« Je peux savoir qui tu es ? »

Il se décolla du mur et décroisa les bras d'un geste las. Pouvait-il être plus insupportable ? Visiblement, oui. Il jeta un coup d'œil à ses ongles, comme si leur conversation l'ennuyait au plus haut point. Il passa une main dans ses cheveux trempés avant de poser ses yeux sur elle.

PRISME Tome 1. L'Éveil [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant