Au sommet du monde

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Comme je l'avais deviné, le reste de ma nuit a été un ratage total, entre somnolence et état de parfait éveil. C'est une des choses les plus désagréables qui soit, être sans arrêt à mi-chemin des deux états, trop réveillé pour dormir mais trop fatigué pour bouger. Afin de m'occuper l'esprit, j'ai trouvé une activité stimulante et utile: défaire les cartons, monter les meubles et ranger tout ce bordel. Nous ne sommes installés que depuis deux semaines alors il y a encore du taf de ce côté-là. La bonne nouvelle, c'est que du coup, la journée est passée à une allure folle. La mauvaise c'est qu'entre mon manque de sommeil, mes pensées qui n'arrêtent pas de dévier vers Bowen et Mary-Kate Kinsky et les heures passées à mettre la vis A dans l'emplacement A' tout en laissant l'espace pour faire passer la planche G qui doit coulisser en harmonie avec la partie C du meuble, je suis littéralement à bout de nerfs. Pour la énième fois, je consulte mon mode d'emploi:

„La partie C doit être alignée avec le repère F qui sert de point de départ pour le vissage de la partie C', elle-même composée des parties B et D."

Elle est où ma partie C'?

Je pose le papier par terre et pousse Lazslo qui ne peut pas s'empêcher de venir m'embêter.

„Lazslo! Cherche la partie C' au lieu de jouer!"

Aussitôt, le chien se met en quête, sans avoir compris ce qu'il cherchait, évidemment. Je lève les yeux au ciel en esquissant un sourire. Sourire qui s'efface bien vite lorsque je réalise que la partie C' est introuvable parce que j'ai accidentellement assemblé la partie B avec la partie D' et non la partie D, ce qui fout en l'air toute ma putain d'installation. Je lâche un grognement de frustration.

„Mais merde!"

Bon dieu, je t'en foutrais des meubles à monter soi-même, c'est un vrai calvaire ce truc! Alors que je m'apprête à jeter l'éponge, mon téléphone sonne et je décroche sans même regarder l'identité de l'appelant, occupée à siffler Lazslo qui renifle le tas de bitoniaux en bois avec pour intention de découvrir s'ils sont comestibles.

„Non, mange pas ça! Allô?

-Que je mange pas quoi?"

La voix étonnée de Daryl me surprend, je pensais qu'il était encore loin d'avoir fini le travail! Mais en jetant un regard à l'horloge que j'ai moi-même fixée quelques heures plus tard, je réalise que l'après-midi est bien avancée et qu'il est déjà 15h.

„Non, je parlais à Lazslo. Ça va?

-Ouais. Et toi?

-Merveilleusement bien (haha). J'ai monté le sommier.

-T'as pas trop galéré?"

Je me revois furtivement en fin de matinée en train de hurler contre l'univers tout entier en réalisant que j'ai monté le sommier dans le mauvais sens et que je dois tout recommencer.

„Non. Je t'ai dit, j'suis une pro.

-Super. Tu peux me rejoindre au taf? J'ai un truc à te montrer."

J'ouvre de grands yeux, surprise. Il est sérieux, là? Il veut que je me tape l'aller-retour sur les docks avec pour seule raison „j'ai un truc à te montrer"??

„...tu plaisantes là.

-Non, je te jure, c'est important.

-Bébé, j'ai passé la journée à monter des meubles, j'ai même pas mangé, j'suis crevée et j'ai pas pris ma douche.

-Allez, s'il-te-plaît! Ça vaut vraiment le coup.

-Mais tu veux me montrer quoi?

-Tu verras! Prends un taxi, je t'achète un truc à manger en attendant."

Fire & Gasoline - Tome 2 [EN COURS]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant