Chapitre 12 : Égaré

25 5 2
                                    

Ses mots résonnaient dans sa tête dans un long écho de folie. Au fond elle se l'était jurée, comme une promesse. La fillette dégravirait les marches de l'enfer pour retrouver le sourire malsain de cet homme, qu'elle ne pouvait que trop bien connaître. Elle défierait son regard assassin qui donnerait des sueurs froides au diable.

Que dis-je ? Le diable, c'est lui.

Le réalisme de la chose, c'est que ce démon, arrive à hanter son souvenir dans la tête de sa fille qui en hurle de détresse. Son âme souffrante tentant de repousser cette présence lugubre...

En vain.
Toujours. En. Vain.
Il fallait qu'elle soit forte.
Il. Le. Fallait.

La jeune fille remit son masque d'impassibilité et se releva le cœur si lourd... Alex soupira le regard dérivé. Il ne prit pas la peine d'attendre son amie, qu'il commença à marcher vers une autre pièce pour enfin mettre la main sur ses réponses tant convoitées.

Le jeune garçon laissa glisser ses doigts sur le mur qu'il longeait. Il avait ce besoin vital de devoir ressentir n'importe quoi. La surface froide et lisse se laissait innocemment caresser. Alex retourna furtivement sur ses pas avant d'arriver dans la mystérieuse pièce d'où avait surgit le bruit suspicieux dont les explications étaient patiemment attendues.

Alex pénétra la pièce éclairée et la scruta minutieusement, à la recherche d'indices. Une petite cuisine parfaitement bien agencée trônait la pièce. A un détail près... Une marre de sang luisait, quelque pas devant le jeune garçon. Il était stupéfait de la substance que semblait prendre celle-ci. D'un noire aux reflets rouge brillant, comme pailleté de particules obscènes.

Dans le doute, ce qui s'approchait du plus au sang, se mit lentement à dégouliner sur le carrelage de la cuisine, agrandissant cette impression d'irréalisme et de questionnements. Hésitant, Alex se rapprocha, suivant de près le chemin que prenait la substance, se dirigeant derrière l'îlot central.

Le petit garçon sonda les informations devant lui. Le liquide se formait autour d'une bouteille d'alcool, brisée de mille éclats, vidée de son contenu qui s'associait au sang. Tout prenait une apparence symbolique et indéchiffrable. N'était-il peu être tout simplement pas destiné à comprendre.

Alex s'agenouilla, effondré de toute énergie. Le jeune garçon papillonnait lentement des yeux. Oui. Oui, tout n'était qu'un rêve. Rien ne s'était passé et rien ne se passera. Oublier tout d'aujourd'hui jusqu'à ce que l'on soit demain. Au prochain battement de cil, il se retrouverait dans sa chambre. Il serait miraculeusement guérit, pourrait courir à plein poumons et rire à chaudes larmes.

Ou bien était-ce cela le rêve ?

Savez-vous qu'est ce que quelqu'un de dangereux ? Quelqu'un qui n'a plus rien à perdre. Quelqu'un qui a déjà tout perdu. Le désespoir est l'espoir de ceux qui n'ont en plus et pourtant... Les cauchemars sont les anges des rêves démoniaques. Si facile à assimiler et complexe à accepter.

Alex pensait, songeait, se triturait l'âme au scalpel en voulant hurler sa mélancolie. Mais l'intensité de sa démence n'était qu'un écueil parmi tant d'autres. Tout se bousculait, se dévorait et se mélangeait dans son esprit.

Qui était-il ?

Il ne doit pas chuter. Non. Il ne devrait pas chuter. Les ombres le recueilleraient bien trop impatiemment, se nourrissant de la chair qui constitue l'humain. Un simple bout de peau, de muscle, de viande aillant la capacité de penser.

Tout avait voler en dérision. Il ne fit plus rien.

Pourquoi pleurer ?
Pourquoi admettre ?
Pourquoi comprendre ?

La toile obscure voilant sa raison, sombra. Les éléments étaient de retour sous son regard, attendant une explication, une réponse. De retour dans cette cuisine. Assit dans des débris de verre, de sang impure et d'alcool. Un soupire affligeant lui libéra les poumons.

Il ferma consciencieusement les volets de sa lumière, posa hésitant la paume de ses mains sur le chemin de l'ouïe, et mena machinalement ses lèvres vers le dessein d'une voix autrefois vive. Alex se vida de toute âme.

Plus aucune pensée ne régnait dans le chaos qu'était son monde, accablé de flou. Privé de chaque sens, la seule confrontation n'était ni réel, le rêve ou le paraître mais lui même.

Alex.

Il rouvrit lentement ses paupières humides. De retour dans cette cuisine. Décidément. Un long frisson de vie le consuma. Le jeune garçon le savoura, avant de déposer ses iris ébènes sur ce qu'il l'entourait. Tout analyser, tout remarquer, tout ressentir. Tant de listes de sensations, de souffles, de mélodies.
La mélodie, la symphonie, la note de folie...

En bref, une déficience de la conscience de décadence en imminence.

Assit dans des débris de verre, de sang impure et d'alcool. Il s'abandonna dans la mixture de l'irraisonnable. Le jeune garçon avait froid. Si froid... Fatigué. Si fatigué... Il s'abandonna dans le néant qu'est son esprit. Morphée le retrouva allongé dans ses questions et aveuglé par les réponses.

Ma chère Lumière, de ta douce chaleur et printemps lointain, emmène moi près de toi..

... ?

Alex fut brusquement arracher du réconfort par de violentes secousses. Surprit, il découvrit la fillette, le sondant scrupuleusement, aussi apeurée que soulagée. Depuis combien de temps était-elle à ses côtés ?

Ilana enlaça le jeune garçon d'une étreinte chaleureuse. Celui-ci se releva précipitamment, pour prendre la main fine de sa partenaire. La guidant vers un chemin inconnu, les deux enfants quittèrent la pièce de la démence. Se confiant l'un à l'autre, une bulle protectrice s'était formait.

Un regard, un sourire, et une lucidité sans faille. Une dépendance cotonneuse se créait, les préservant d'une vision obscure. Emboîtés par leurs pas, ils se retrouvèrent dans le salon.

Un deuxième regard, un deuxième sourire, et un baiser.

Singulier, doux, innocent, indispensable.

Tout à commencé ensemble mais finiront ils de même ? La pluie est mystérieuse... L'écouter ne sera pas suffisant, il faudra la comprendre. Ensemble.

RainWhere stories live. Discover now