/26/ Lecture dramatique

8.9K 892 30
                                    



-Bonsoir Joyce Olson-West, nous sommes ravis de vous recevoir sur ce plateau pour la sortie de votre livre « 24 heures » qui est sorti mercredi dernier et qui est déjà un immense succès. À la tête des ventes et ne recevant que des critiques applaudissant votre talent d'écriture et surtout la façon dont vous racontez votre histoire. Car oui, pour tous les téléspectateurs qui nous regardent ce soir qui ne le sauraient pas encore: « 24 heures » est donc votre témoignage à propos de l'enfer que vous avez vécu il y a désormais cinq ans et dont le Monde entier a entendu parler. Mais avant de parler plus en profondeur de votre livre j'aimerais vous poser une question madame Olson-West que j'estime bien plus importantes que toutes: comment allez vous cinq ans après ce drame?

Joyce émet un petit sourire timide qu'elle espère détendu. Elle racle sa gorge et répond au présentateur:

-Je pense que... ce « drame » comme vous dites m'a littéralement changée. Physiquement bien sûr mais contre les apparences surtout mentalement. Je ne vois plus les choses comme avant et donc oui, aujourd'hui j'estime que je vais bien.
-Je l'espère sincèrement pour vous, comme nous tous...

Il marque une pause, passe un coup d'œil furtif sur ses fiches puis replonge son regard bleu dans celui de Joyce:

-La question que nous nous posons tous est: pourquoi avoir mis tant d'années à écrire votre histoire?
-Au début comme vous vous en doutez il y a eu mon rétablissement, physique et psychologique. J'ai passé énormément de temps avec ma famille et j'ai essayé de retrouver goût à la vie même si je dois bien l'avouer: au début je pensais que cela était impossible. Et puis le temps a passé, j'ai commencé à aller mieux mais je me suis dit que si j'arrêtais tout simplement de parler de ce qui s'était passé alors ça allait faire comme si jamais rien n'étais arrivée. Mais je me trompais. Et je ne savais pas quoi faire pour échapper à mon passer. Et puis, un jour je regardais les actualités et j'ai pris connaissance, comme tout le monde, de l'affaire de la « Maison de la Souffrance ». Et c'est là que je me suis dit que je n'étais pas seule à avoir vécu des choses aussi inhumaines et que je devais parler. Alors j'ai repris mes études de lettres par correspondance et je me suis mise à écrire... Et voilà. Je suis là aujourd'hui devant vous.
-Et nous en sommes ravis!

Le journaliste, célèbre dans la France entière, a l'air sincèrement heureux pour elle et même ému de parler à cette jeune femme qui a tant souffert. Il reprend:

-Mais j'imagine que vous avez appris ce matin la mort de Zala Saundery à cause d'un accident de la route... Comment avez vous réagis?

Joyce hoche lentement la tête:

-Ou...oui j'ai appris. Et pour être tout à fait honnête j'ai hésité à venir à cette interview en direct. Mais c'est grâce à cette jeune fille que je ne connaissais même pas personnellement que j'ai écrit, alors je lui devais bien ça...

*****

L'interview continue et Joyce répond à toutes les questions comme elle s'y était entraînée devant son miroir, voulant montrer que c'est une femme forte et reconstruite que rien n'a put détruire. Même si c'est en réalité loin d'être totalement le cas...

-Si vous me le permettez j'aimerais vous demander de nous lire un passage de votre livre. Celui que vous voulez, un passage important pour vous.

Il lui tend un exemplaire en l'encouragent du regard. Joyce n'avait pas prévu ça, mais peu importe. Elle attrape l'objet et le feuillette à la recherche de quelque chose qui pourrait convenir.
Elle a tout écrit avec ses tripes et aucune passage n'est moins important qu'un autre. Mais pourtant elle doit en sélectionner un. Et soudain elle sait.
Elle trouve la page correspondante et articule lentement:

Lorsque je suis partie, au volant de cette voiture, à moitié nue et couverte de mon propre sang, de celui de mes amis que je laissais derrière moi ainsi que celui de ces hommes qui m'avaient sauvés en y laissant leur propre vie, je pensais sincèrement être sauve. Je le voyais, lui, allongé sur le sol, mort. Enfin c'est ce que j'ai pensé. J'ai crut que je l'avais tué et pourtant il s'est avéré que j'ai eu tord. Lorsque la police est arrivée sur les lieux il avait disparu. Aucune trace de son corps. Il était parti, envolé, évaporé... Comme un nuage de fumée se dissipe dans l'air. Il n'avait laissé comme seule trace de son passage la mort et l'horreur.
Les avis de recherches n'ont pas tardé mais rien. Et je savais. Je savais que jamais ils ne le retrouveraient. Parce que j'ai vu de mes propres yeux qu'en ce bas monde la justice n'existe pas malgré tout ce qu'on pourrait croire. Il vit désormais ailleurs, paisiblement, comme ces généraux nazis après la seconde guerre mondiale qui ont refait leur vie à l'autre bout du monde comme si rien ne c'était produit. Le « grand méchant loup » est toujours là, quelque part. Et je sais qu'un jour il recommencera à tuer, parce que c'est sa nature, son instinct, sa raison de vivre. Et ni moi ni personne ne pourront jamais l'en empêcher... ».

JoyceWhere stories live. Discover now