Partie 8

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AÏSSATOU SY

-Yaka, je t'en supplie il faut que tu parles, il faut que tu pleures, il faut que tu manges pour l'amour de Dieu. Ça fait maintenant cinq jours que Khalil est parti, il faut que tu vives bon sang.

À cette phrase, elle se lève et son regard changea automatiquement et elle réagissait.

-oui maman, il est juste parti et il va revenir, n'est ce pas? Khalil a promis maman, il a promis.

Je ne sais plus quoi faire pour qu'elle réagisse. Elle n'a versé aucune larme depuis que la maman de Khalil l'avait appelé. Elle a pris le téléphone, a écouté puis elle s'est écroulé. On l'a réveillé en vain puis on l'a amené à l'hôpital. On y a passé deux jours, le médecin a dit qu'elle était sous le choc de la disparition subite de Khalil et qu'il lui fallait du soutien et du temps pour s'en remettre. Quand on est revenue à la maison, elle a refusé de parler et de manger. Quand je lui ai dit la première fois qu'il fallait qu'elle mange sinon elle allait mourir comme Khalil, pour peu elle en était devenue hystérique, m'interdisant de répéter cela, de dire que Khalil était mort. Et quand je lui disais que Khalil était parti, elle répondait qu'il allait revenir la chercher, qu'il avait promis comme tout à l'heure.

Elle ne dort pas, ne mange pas et ce qui me fait le plus mal c'est qu'elle ne pleure pas. Cette réaction me fait très très peur car ce qu'elle garde dans son coeur va sûrement lui faire plus de mal que la mort de Khalil elle même.

Fatima est là tout le temps, mais elle ne semble pas être consciente de ce qui l'entoure. J'avais même décidé sur les conseils du médecin de l'amener à Ziguinchor pour qu'elle se recueille sur la tombe de Khalil et peut être qu'elle acceptera sa mort. J'ai peur qu'elle ne fasse une dépression ou qu'elle ne devienne folle pour de bon. Je vais essayer de la faire réagir pour voir.

-Yaka, si tu manges je te promets de te laisser partir à Ziguinchor avec Fatima, lui dis-je.

Elle se leva alors et son regard commença à briller comme si elle revivait

-tu vas me laisser aller voir Khalil maman? C'est vrai?

-oui ma fille si tu manges et reprends des formes, je te laisse y aller.

-d'accord maman amène moi à manger, Khalil avait dit que je devais manger avant son retour parce qu'il ne voulait pas d'une maigrichonne comme femme, dit-elle en se levant pour se mettre devant le miroir.

J'étais ahurie par les réactions de ma fille, par ce qu'elle était entrain de devenir.

-Fatima, pourquoi ne m'as tu pas dit que j'étais affreuse? Regarde moi, je ne ressemble à rien. Mon teint est terne et j'ai la peau sur les os, dit-elle à son amie sur un ton de reproche.

-si tu manges tu reprendras des couleurs. Mais avant tu vas prendre une douche d'abord. En attendant, la bonne va te préparer à manger. C'est bon? Lui dit Fatima, qui depuis ne cesse de pleurer.

Lorsqu'elle entra dans la salle de bain, je m'effondrais sur le lit, impuissante devant ce qu'était en train de devenir ma fille.

Elle refusais la réalité et vivait dans une sorte de bulle. Elle n'a pas franchi le cap du jour du décès de Khalil. Son cerveau refusait tout simplement de traiter cette information. Et j'espère de tout coeur qu'aller à Ziguinchor va la faire revenir à la réalité, une dure réalité. Et autant, j'ai peur car je ne sais pas comment elle va réagir après, comment elle va prendre cette nouvelle.

Puis elle avait mangé, mangé, mangé. Elle avait rattrapé tout ce qu'elle n'avait pas mangé ces derniers jours. J'avais appelé la maman de Khalil pour organiser son voyage et elle l'attendait pour le huitième jour du décès de son fils.

Elle allait mieux du moment qu'elle mangeait mais son visage n'avait aucune expression, elle passait son temps à écouter la voix de Khalil sur sa messagerie vocale et à regarder leurs dernières photos. C'était insoutenable. J'avais mal...si mal.

J'ai mal de m'être opposée à cette relation. Ce que j'ai fait ne s'explique en rien et si Yaka ne s'en relevait pas, je ne me le pardonnerai jamais. La vie m'afflige et me met à rude épreuve. Mon fils est malade et maintenant Yaka qui souffre à en devenir folle.






YAKA

La maman de Khalil nous attendait au débarcadère. Elle avait la mine des mauvais jours, mais pas plus que moi. Tout ce que je voulais, c’était qu'elle infirme cette nouvelle, cette terrible nouvelle qui me bouffe le coeur.

Je la vois essuyer ses larmes dés qu'elle me voit. J'avance vers elle, le coeur battant à rompre. Je ne saurai répéter un seul mot de ce qu'elle m'a dit quand elle m'a appelé ce jour là, me disant que Khalil était... non je refuse de dire ce mot. NON. Khalil est au village du marabout, il est peut être fatigué par la thérapie ou autre mais pas mort. Et c'est ce que je suis venue confirmer.

Arrivée jusqu'à sa hauteur, elle éclata et me prit dans ses bras. Il y avait aussi Khady, sa petite soeur. Elle aussi avait maigri. Mais je tenais quand même.

-maman stp arrête de pleurer et dis moi stp où est Khalil.

-Ma fille, ta maman m'a dit que tu refusais de croire qu'il était mort mais il faut que tu l'acceptes. Khalil est mort ma fille.

-maman, quand je suis venue à l'appartement Khalil allait bien, je l'ai vu prier debout, on a mangé ensemble et il m'a dit qu'il reviendrait pour notre mariage alors comment se fait-il qu'à dix huit heures lorsqu'on se quittait, il allait bien et que dans la nuit il mourrait? Si tu ne veux pas de moi pour ton fils comme son papa, ne me fais pas souffrir en me faisant croire qu'il est mort. Dis moi qu'il va bien et j'attendrai le retour du bateau ici même. Le savoir en vie me suffirait.

-Yaka, stp, arrête toi aussi. Tu es entrain de te faire du mal. Il faut que tu te rendes compte que Khalil est mort, il est parti. C'est brusque certes mais c'est la réalité, lança Fatima en sanglot

-ok, ok fis-je nerveusement. Maintenant amenez moi à lui, amenez moi à la tombe de Khalil s'il est mort, que je vois ça de mes propres yeux.

Nous primes un taxi qui nous amena jusqu'au cimetière. Je descendis le coeur gros, prêt à exploser. Mes jambes commencèrent alors à me trahir mais je m’efforçais de tenir bon. Je dois être forte.

J'avance suivant le gardien et suivies de Khady, la soeur de Khalil, sa maman et Fatima qui me tenait la main. Arrivé jusqu'à hauteur d'une tombe, le gardien nous indiqua que c'était là...

Juste un tableau où il était écrit maladroitement 《ici repose Ibrahima Khalil Cissé 》.

Je le regardais pendant une minute avant de leur demander de me laisser seule.

-non, on va rester là, tu ne peux pas rester seule Yaka dit Fatima.

-je vous en prie, je veux juste me recueillir toute seule, rien d'autre. J'ai droit à ça non? Je suis forte Fatima et tu le sais. Juste cinq minutes Vous pouvez rester là bas, un peu plus loin.

Elles me tournèrent le dos en se retournant de temps en temps pour me regarder puis elles s'arrêtèrent un peu plus loin.

-Khalil, donc quand tu me regardais ce jour là et que ça m'a fait frissonner, tu savais que tu partais? C'est pourquoi tu m'as regardé comme ça et c'est pourquoi tu m'as tenu dans tes bras de cette manière? Parce que tu savais que c'était la dernière fois? Pourquoi tu m'as fait ça? Je te faisais confiance et je pensais que tout ceci n'était qu'un cauchemar mais en réalité c'est toi qui es là, couché et la terre te recouvrant. D'accord! Maintenant, je ne pleurais pas et je ne dirai rien. J’ai tenu jusque là et je tiendrai encore. J'attends juste que mon heure à moi vienne et je prie que ça soit pour bientôt, je sens que c’est pour bientôt, afin qu'on se retrouve enfin. On s'était promis qu'on s'aimerait et qu’on serait ensemble éternellement et je crois au pouvoir de l'amour et de la vie dans l'au-delà. Alors j'attends maintenant que tu viennes me chercher et le plus tôt possible Khalil Cissé.

J'étais dévastée mais tout autant il y a un coin de mon cerveau qui refuse de croire que Khalil était mort. Et pour que je le crois, il me faut plus qu'une tombe, plus qu'un tableau, plus qu’une épitaphe portant son noms. Il m'aurait fallu le voir pour le croire...

Je me suis retournée et j'ai rejoint les autres. Je ne pourrai décrire ce que je ressentais car aucun mot ne pourrait le qualifier et pourtant, je n'arrivais pas à pleurer. Je voulais le faire mais n'y arrivais pas et je ne sais pas ce qui m'en empêchait. La seule chose que je savais c'est que Khalil avait emporté ma vie avec lui et que j'attendais juste de me retrouver ave lui dans le monde où il est. Car je sais que je suis liée à lui, pour l’éternité.

Je voulais à présent rentrer à Dakar car je ne voulais pas entrer dans leur maison où j'avais vécu les moments les plus beaux de ma vie avec Khalil. Dans cette maison où nous avions posé tous nos projets de vie commune.

Mais sa mère insista pour que j’y aille. Elle voulait que j'assiste à la cérémonie du 8éme jour qui aura lieu le lendemain.

Arrivée devant la maison, j'ai eu du mal à entrer. Tout d'un coup, les souvenirs me submergèrent et je n'avais qu'une envie: courir, courir, ne jamais m'arrêter, ne jamais me retourner jusqu'à le voir lui. J'avais besoin des bras de Khalil, j'avais besoin de son regard avec le quel il me rassurait, j'avais besoin de son "je t'aime" tellement doux, tellement rassurant, tellement vrai...et je n'avais pas le choix.

On trouva un boucan énorme dans la maison. La maman de Khalil se précipita pour aller voir. Je la suivis en me frayant un chemin parmi tous ces gens, les uns venus par curiosité, les autres surement parce qu'ils étaient déjà là pour les préparatifs de la cérémonie du huitième jour . Mon coeur battait à rompre.

Que pouvait-il bien se passer?

Et là, un spectacle inhabituel s'offrit à moi. Un homme, très vieux criait et riait comme un possédé, maintenu par trois hommes qui tentaient de lui faire porter ses habits ,difficilement et lui faisant face, le papa de Khalil qui, lui aussi était maintenu par d'autres hommes qui voulait lui prendre son fusil. Il criait vouloir tuer le vieil homme nu.

-je vais te tuer vieux rat. Je vais te faire payer de mes propres mains tout ce que tu as fait à mon fils.

Et le vieux riait de plus belle de ses dents rouillés par la cola ou le tabac.

-si tu penses que me tuer soulagera ta conscience, tu te trompes lourdement. Ouiiiiiii j'ai fait en sorte que ton fils paie pour tout ce que vous avez fait à ma fille et à ma petite fille mais tout cela est entièrement de ta faute car tu n'as pas respecté ta parole. Ouiiiii j'ai tué Khalil Cissé, j'ai tué ton fils, le seul qu'il te restait. Maintenant tu vas souffrir et ressentir cette douleur qui m’accompagne au quotidien depuis la mort de ma fille !

Le vieux riait, d'un rire démentiel qui me glaçait le sang. J'étais consternée face à tout ce que je venais d'entendre et de voir. Je n'avais jamais assister à une scène pareille, jamais entendu pareille chose. Ses mots haineux lui sortait du plus profond de ses entrailles.

La maman de Khalil mit ses mains sur ses deux oreilles tout en fermant les yeux.

-pour l'amour du Ciel, faites taire cet homme. Mamadou Lamine pour l'amour de Dieu fais le sortir de ma maison, ça fait deux jours que ça dure et je n'en peux plus, qu'il laisse mon fils reposer en paix.

Tout le monde pleurait, Fatima, Khady, tout le monde...sauf moi...

Puis la police arriva, neutralisa le vieux et calma le papa de Khalil, lui prenant son fusil. Je n'y comprenais rien. Juste que ce vieux était responsable de la mort de Khalil à ce qu'il parait. Il ne devait s'agir que de ça, la maladie de Khalil avait été si brusque, si subite, si violente et si rapide. Et à l'hôpital, les médecins n'avaient rien vu. Mais que pouvait-il bien s'être passé pour que cet homme s'en prenne si violemment, si inhumainement à Khalil, mon Khalil? Pourquoi lui justement? Et...

Tant de questions que je me posais.

La foule se dispersa et les femmes retournèrent sous la tente où elle s'affairait à la préparation de ce qui semblait être le diner. Khady nous fit entrer, Fatima et moi dans sa chambre. Il semblerait que le papa de Khalil ne s'était pas rendu compte de ma présence et j'appréhendais sa réaction.

J'étais lessivée, harassée. Tout ce qui s'est passée durant toute cette journée m'a complétement vidée l'esprit et surtout le cœur. Surtout, j'avais peur dans cette maison, je percevais des auras négatives qui y régnaient et je n'aimais pas ça du tout. Et cela me fit si froid au dos que je dus prendre ma douche accompagnée de Fatima.

Juste après, le diner fut servi. Je n'étais pas capable d'avaler quoi que ce soit et ils avaient beau insisté mais j'ai pas pu.

Plis tard, maman Mariéme m'amena du lait pour que je ne dorme pas le ventre vide. Je l'avalais difficilement. C'est alors que le papa de Khalil vint nous trouver dans la chambre. Il avait la mine déconfite, mortifiée comme s'il portait le poids du monde. Il ne put lever les yeux pour me regarder. Je me levais alors pour lui serrer la main. Il garda mes mains dans les siennes pendant trés longtemps puis il éclata en sanglot, fort, très fort. Ça ne devait pas être facile pour lui. Il a perdu deux de ses enfants et avec Khalil, ça n'allait pas fort à sa mort. Je le plains.

-Rokhaya, Khalil deih nakhna niou, nakhna la ba dem (Khalil nous a surpris avec sa mort). Mais je veux que tu saches à quel point il t'aimait, jusqu'à son dernier souffle il a parlé de toi. Je te demande de me pardonner, je sais que ce ne sera pas facile mais si toi tu me pardonnes, je suis sûr que mon fils de là où il est, me pardonnera de vous avoir séparé et de l'avoir conduit à la mort car tout est de ma faute. J’ai conduit mon garçon à la mort. Stp, Rokhaya allège moi un peu.

J'avais pitié de lui et je me demandais bien, je voulais lui demander, pourquoi disait-il qu'il avait conduit Khalil à la mort, mais cet homme était assez affligé pour lui en rajouter.

-papa, je ne vous en veux pas le moindre du monde, encore moins Khalil et j'en suis sûre. Il vous aimait et était fier d'être votre fils.

Il en pleura tellement que sa femme dû intervenir d’une voix dépitée cependant.

-Mamadou Lamine, arrête de pleurer, tu ne l'aides pas. Jusque là, elle a été forte mais si tu continues, elle va craquer et ça va la rendre malade. Ressaisis toi, ce qui est fait est fait et on y peut rien. Ce vieux Boubacar paie le prix fort de ce qu'il a fait à mon fils et plus tôt qu'il n'aurait imaginé. La justice divine est la meilleure.

Il se leva de la chaise où il était assis et sortit de la chambre. Je m'approchais alors de maman Mariéme et prit ses mains dans les miennes.

-maman, qu'est ce que c'est que toute cette histoire et qu'a t-il à voir avec la mort de Khalil? Stp dis moi, ça me trouble.

Elle inspira fort.

-ma fille, c'est une histoire beaucoup trop longue et douloureuse pour que je te la raconte ce soir. Tu dois être fatiguée, alors vous allez vous reposer jusqu'à demain et je te promets qu'après la cérémonie, je te raconterai tout, me dit-elle en me caressant affectueusement la joue.

Oui j'étais fatiguée mais je ne pourrai pas dormir avec tout ce qui s'est passé. On passa la majeur partie de la nuit à bavarder avec Fatima et Khady qui me raconta tellement de choses sur Khalil et je me surpris a en sourire et en rire intérieurement.

Khalil dal demna ni rek teih dou ay kaff ( Khalil est donc parti et ce ne sont pas des blagues). On le conjugue au passé comme ça alors qu'il y a juste une semaine moi j'étais dans ses bras, il m'avait embrassé et promis de m'épouser, promis de me rendre heureuse...


LE LENDEMAIN…
Vêtue d'une robe en voile blanche, foulard noué sur la tête, je suis assise sur une natte avec maman Mariéme, Fatima et des tantes paternelles de Khalil. Ceux qui n'ont pas pu venir présenter leurs condoléances le jour du décès, passent et compatissent à la douleur de la famille ; ils prient pour le repos de l’âme du défunt, des jeunes filles, vieux, femmes et le témoignage est le même: Khalil était un homme bon qui a toujours pris soin de ses parents.

Je fis descendre mon voile sur une partie de mon visage car à chaque fois que quelqu'un venait, maman Mariéme me présentait en disant: c'est la femme que Khalil devait épouser et je voyais dans chaque regard, une insistance à l'affut du moindre détail afin de pouvoir me décrire à la lettre lorsqu'ils iront alimenter les discussions de grand place et de marché.

La lecture du Coran adoucissait mon coeur et c'était comme si à chaque verset, on m'enlevait une parcelle de douleur.

Après le repas, les gens rentrèrent chez eux et je pus enfin me lever et aller dans la chambre car j'avais des crampes aux jambes. Après avoir accompagné les invités, aidé à ranger la maison et réglé quelque détails, maman Mariéme vint me trouver dans la chambre.

-Yaka, ma chérie, ça va?

-oui maman, ça va je vais bien juste que le fait d'avoir passé la journée sur la natte m'a donné des crampes aux pieds.

-mais il faut que tu manges ma chérie. Crois-tu que Khalil aurait aimé te voir souffrir et te morfondre de la sorte?

-maman stp dis moi comment il est parti. J'ai besoin de savoir, j'ai besoin de réponses. A t-il souffert?

Elle inspira très fort comme pour aller chercher sa force au plus profond d'elle.

-quand le bateau a pris le cap, il a commencé à avoir des nausées. J'ai cru qu'il avait le mal de mer mais ça s'est aggravé par la suite. Il parlait de toi sans arrêt, pendant plus d'une heure, il a parlé de toi. Comme s’il savait qu’il allait partir, il a dit que tu devais continuer à vivre et que tu étais la meilleure chose qu'il lui soit arrivé. Je n'ai même pas senti quand il est parti. Il avait la tête posée sur mes jambes et je la lui caressais et j'ai cru qu'il dormait. Il n'a pas souffert le moindre du monde car il t'avait retrouvé avant et il était heureux. Yaka, mon fils t'aimait et je voudrais que pour cet amour, tu essaies de vivre, tu es si jeune.

-maman, tu ne pourras jamais savoir à quel point moi je l'aimais. Je l'aimais comme si ma vie en dépendait. J’ai du mal à conjuguer mes sentiments au passé, c’est au delà de mes forces. Quand il est tombé malade, j'ai cru mourir chaque jour tellement j'avais mal de le voir dans cet état. Et j'ai si mal maman, si mal mais je ne peux pas sortir ce mal de mon coeur c'est comme si, si je pleurais j'allais le sortir de mon coeur, l'oublier et je ne veux pas, je ne peux pas. Je veux être condamnée à l’aimer pour l’éternité. Je veux être condamnée à  penser à lui à chaque instant de ma vie jusqu'à ce qu'il me tende la main et que je la saisisse, chose que j'attends de toutes mes forces.

-tu te fais du mal ma fille et Khalil n'aurait pas voulu ça. Si tu fais ça, si tu réagis comme ça tu risques de te faire du mal et faire du mal à ceux qui t'aiment, à ta maman qui en déjà assez avec la maladie de ton frère. Et surtout à Khalil. Tu penses qu’il ne ressent pas ta peine ? Il ne pourra pas être en paix s’il te sent malheureuse comme tu es.

-ne t'inquiète pas pour moi maman. Je te jure que je suis forte.

-c'est ça qui me fait peur Yaka.

-je te dis que ça va. Mais dis moi maman stp, qui était cet homme? Et qu'est ce qu'il a à voir avec Khalil? Tu avais promis de me dire.

Elle enleva ses mains des miennes et les mis sur sa poitrine.

-c'est le grand père de Farimata, l'ex femme de Khalil.

Tiens, je suis étonnée de ne pas l'avoir vu, qu'on ne me l'ait pas présenté à la cérémonie, qu'on ait même pas parlé d'elle.

-et Farimata était la cousine de Khalil. Je ne l'ai su que le jour de son enterrement. Et à cause de ce fichu lien de parenté qu'ils ont tous si bien caché, Khalil en a fait les frais. Mon fils est mort sans savoir pourquoi, dit-elle en pleurant.

-comment ça maman? Qu'est ce que c'est que cette histoire? Khalil ne devait pas être au courant sinon il me l'aurait dit. Stp maman parle moi, dis moi.

Elle releva la tête et s'essuya le visage avec son foulard puis elle réajusta son châle.

-je vais tout te raconter car si Khalil n'a pas su, toi tu mérites de savoir.

YAKA| le poids de la superstitionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant