Faux air

*1*

- Mademoiselle King! hurle le professeur d'histoire de l'art. On vous dérange peut-être?

Je me redresse et me tasse sur le banc de l'amphithéâtre. Il faut dire que je m'endors de plus en plus souvent en cours mais je parvenais toujours à être discrète et à rattraper les cours sans que cela ne se remarque.

Cette fois, c'est ratée!

Le professeur me mitraille du regard et mes camarades de promos se cachent pour rire. Je me fais encore plus petite mais le prof ne semble pas vouloir me lâcher.

- Vu que vous n'écoutez rien de mon cours, je vais vous demander de me faire un exposé complet sur Picasso et ses œuvres. Je veux tout savoir sur lui, sur ses tableaux et sur les mouvements artistiques qu'il a utilisés. Je veux tout ça pour demain dans mon casier. Maintenant sortez de mon cours!

Génial, il ne manquait plus que ça...

Je range en vitesse mes affaires puis sort du cours sans demander mon reste. Je me retrouve dans la cour de l'université. Je soupire et me dirige vers ma voiture. Je jette mon sac sur la banquette arrière et démarre. Je prends la direction du magasin de peinture où je me fournis en matériel depuis que je sais tenir un pinceau.

Autant ne pas m'être fait virer de cours pour rien. Je me gare devant et rentre dans la boutique. La gérante me salue et je me dirige directement vers les toiles. J'en choisi plusieurs de tailles et de matières différentes puis m'achète les pots de peinture que j'ai vidé dans la semaine. Je reprends des pinceaux et décide qu'il est temps que je rentre. Je paye tous mes articles et les dépose dans le coffre.

Je roule jusqu'à notre maison dans les quartiers chics de Chicago et actionne l'ouverture du portail électrique. Je gare la voiture et sors mon sac de cours et mes achats. Je manque à plusieurs reprises de les faire tomber et plus encore quand je sors les clés pour ouvrir la porte d'entrée. Je débarque en furie dans le salon et je suis accueilli par Héros qui se jette sur moi. Je lâche mon sac de course et le caresse sur le sommet de la tête.

- Tu rentres tôt ce soir, me fait remarquer Jace.

Je hausse les épaules et ramasse ce que j'ai fait tomber. Je le vois qui sourit en coin.

Ca lui crèverait la gueule d'aider?

Je serre les dents pour ne pas lui demander de m'aider. Je fais tomber à nouveau le sac et cette fois mon frère vient m'aider. Je monte avec les toiles dans l'atelier et lui montre du doigt où il doit poser le sac.

Je vais ensuite dans ma chambre pour me changer. J'enfile ma tenue de sport et descends dans la salle d'entrainement au sous-sol. Jace m'y attend avec une barre en fer.

- Tu t'échauffes sur le tapis de course et tu me rejoins. Cours pendant au moins 5 minutes.

Je hoche la tête et obéis. J'active le tapis et cours. Quand je m'arrête, je suis essoufflée. Décidément, le sport et moi ça ne sera jamais l'amour fou.

Je rejoins mon ainé qui me lance une barre en fer. Avant de me dire de frapper des mannequins en mousse. Je suis les consignes qui me donne et frappe. Il modifie plusieurs fois ma position. Il me montre comment bien frapper. Il fait durer l'exercice avant de finalement me dire d'arrêter et d'aller boire un coups.

- Tu ne veux toujours pas me dire pourquoi tu es rentrée plus tôt? demande-t-il en m'asseyant à côté de moi.

- Parce que je me suis faite virer de cours, soufflais-je. C'est bon tu es satisfait?

- Pourquoi? insiste t il.

Je soupire puis lui avoue que c'est parce que je me suis endormi. Il y a quelques années, il aurait ri mais là, il semble inquiet.

- Tes cauchemars?

Je hoche la tête et lui raconte que j'ai mal dormi cette nuit à cause de mes cauchemars et que cela m'a fatigué. Il semble compatissant, ce qui arrive rarement, et me laisse quitter l'entraînement plus tôt. Je monte dans le salon et y trouve Cooper devant la télé. Je le salue d'un hochement de tête et continue mon chemin vers ma chambre en attrapant au passage mon chiot sur le canapé.

Je rentre dans ma chambre et dépose Héros par terre avant d'aller m'enfermer dans la salle de bain. J'allume l'eau chaude et me glisse dans la douche après m'être déshabillée.

Lorsque je sors, je m'habille d'un legging et d'un vieux tee shirt à Jace qui me servent de pyjamas. Je quitte ma chambre et me dirige vers l'atelier quand j'entends un murmure étouffé provenant du bureau de mon jumeau. J'hésite à faire comme si je n'avais rien entendu et continuer ma route mais ma curiosité est très forte maintenant.

Je m'avance finalement vers le bureau et écoute ce qu'il se dit.

- Je ne suis pas d'accord... On peut très bien s'en sortir sans lui... On peut y arriver... Quoi Skylar?... Bien sûr qu'elle sera à la hauteur! C'est une King!... Elle sera le faire... Elle excelle dans son domaine...

J'écoute la conversation de mon frère ponctuer de blanc qui signifient que son interlocuteur parle. D'ailleurs j'aimerai bien savoir de quoi il s'agit et pourquoi mon prénom est dans cette conversation. Je l'entends ensuite clore la conversation.

Oula faut filer de là avant de se faire repérer!

Je tourne les talons et vais partir quand la voix de mon frère me retient.

- Tu écoutes aux portes toi maintenant?

Je rentre dans le bureau et je dévisage.

- Tu comptes m'ignorer encore longtemps? Ça fait des années que tu ne m'adresse la parole seulement pour de simple formalité.

Je vois bien que de ne pas entretenir de lien avec moi le blesse, et pour être franche moi aussi, mais il n'avait qu'à réfléchir à ce qu'il faisait. Je lui en veux toujours pour le lycée et pour après...

- J'ai d'autres choses à faire que t'écouter te plaindre, dis-je.

La pique est violente. Je lui ressors exactement la même phrase qu'il m'a dite il y a quelques années. Je sors sans même un regard de plus pour lui. Je siffle et Héros arrive et me suis. Je vais dans l'atelier de peinture et allume l'enceinte. Je mets la musique sur mon téléphone et commence à faire mon exposé pour le professeur d'histoire de l'art. Cela me prend un moment et quand je termine ma mère nous informe que le repas est prêt.

Je descends, suivi de prêt par mon chiot. Je trouve mon père affalé sur le canapé, ma mère derrière le bar et sert des assiettes et mes trois frères prêts à se battre comme des morts de faim pour être servis en premier. Ma mère tend une assiette et alors que mes frères se jettent dessus, je les devance et l'attrape en premier. Je vais ensuite m'asseoir devant leurs yeux ahuris. Ma mère sourit en coin avant de tendre une nouvelle assiette. Je mange rapidement et monte dans ma chambre sans un mot pour personne mais avant que je n'atteigne les escaliers ma mère me stoppe.

- Tu ne veux pas rester un peu avec nous ? me questionne-t-elle.

- J'ai des devoirs, soufflais-je pour y échapper.

Depuis deux ans, ma mère est beaucoup plus sur mon dos. Faut dire que j'avais disparu pendant plusieurs jours sans donner de nouvelle. Ma famille a cherché par tous les moyens de savoir où j'étais mais je n'ai rien dit. Pas même à ma meilleure amie.

Je me précipite vers ma chambre.