Soeurtilège

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- Attends, attends, soufflai-je. Je ne comprends pas. Tu t'es fait virée ?

Ma voix partit dans un aiguë que je ne lui connaissais pas sur le dernier mot. Virée. Virée. Virée. Je la fixai, deux yeux ronds la détaillant alors qu'elle haussait les épaules, totalement désinvolte.

- Ce sont des choses qui arrivent, m'assura-t-elle, naturellement. Ce n'est pas la peine d'en faire toute une histoire.

- Ne pas en faire toute une histoire ? Répétai-je, abasourdie. Tu n'es pas sérieuse ?

Un nouveau haussement d'épaule, empli d'un peu plus de désinvolture encore. Elle se décida à me jeter un regard en coin en constant que je restai immobile, ne tournant pas la clé de la voiture pour établir le contact et démarrer. Nos yeux se croisèrent et elle roula des yeux, cette fois-ci d'exaspération, devant mon air ahuri. Je crois que je ne réalisai pas. Non. C'était elle qui ne réalisait pas l'ampleur de la situation.

Comment pouvait-elle balancer une aberration telle que « ce sont des choses qui arrivent ». A d'autres peut-être. Pas à elle. Pas à Marie. Pas à ma sœur. Pas à ma parfaite grande sœur. Je ne comprenais pas comment une telle chose avait pu se produire. Pas plus que je ne comprenais ce qu'elle faisait assise là, sur le siège passager de ma vieille voiture.

Il y a quelques jours, j'avais reçu un unique message : « Je serais porte B à l'aéroport Charles de Gaule, vendredi à 16h. Tu peux venir me récupérer ? ». Et cela avait été tout. Même lorsque je l'avais harcelé de message pour tenter d'obtenir une vague explication compte à sa soudaine venue en France. Elle était restée silencieuse, m'envoyant finalement un unique message pour répondre au flot des miens : « Je t'expliquerai vendredi ». Point barre. J'avais alors tentée les coups de fils, mais n'avait pas obtenu plus de succès et lorsque je finis par tomber, systématiquement, sur sa messagerie, je compris que la situation était grave. Mais jamais au grand jamais, je n'avais imaginé qu'elle serait même catastrophique.

- Tu comptes démarrer, oui ou non ? Me souffla-t-elle, excédée. Et arrête de me regarder comme ça. C'est bon, tu fais une montagne d'un truc sans importance.

- Avant de démarrer je veux des explications, soupirai-je. Tu ne peux pas débarquer comme ça, me balancer simplement que tu as été « virée » et exiger de moi quoi que ce soit.

- Qu'est-ce que tu veux que je te dise ? C'est une histoire débile, assura-t-elle en soupirant son tour. On m'a accusé d'avoir triché à des examens et ils m'ont viré.

- Comment ils ont pu croire un truc aussi débile ? Sifflai-je aussitôt, écarquillant les yeux, indignés. Pourquoi une élève brillante aurait-elle besoin de tricher ? Attend, on va appeler maman et je suis sûr qu'on va tro...

Je me stoppai net. Marie venait de se ratatiner quelque peu dans son siège, ses lèvres se pinçant et son regard se perdant sur la vitre alors qu'elle semblait se découvrir une passion pour la voiture garé à côté de la mienne. Je blêmis. Je connaissais ce comportement. J'avais déjà eu l'occasion de le voir à plusieurs reprises. Toujours lorsque Marie avait quelque chose à se reprocher. Quelque chose de grave.

- Marie, murmurai-je. Dis-moi que tu n'as pas fait un truc aussi débile...

- J'n'avais pas le choix, assura-t-elle, s'obstinant à ne pas me regarder. J'étais à la bourre dans mes révisions et j'allais me queuter. J'ai convaincu l'un de mes profs de me filer quelques réponses pour être sûr d'avoir au moins la moyenne, c'était rien de bien méchant.

- Convaincu ? Répétai-je, de plus en plus blême. Ne me dis pas que tu as fait ce que je pense. Pitié, Marie.

Elle tourna un instant son regard sur moi alors que je la fixai ahurie. Et elle le fit. Elle eut encore ce foutu haussement d'épaule. Les bras m'en tombaient. J'ouvris la bouche et la refermai dans la seconde. Je ne savais pas quoi lui dire. J'aurai voulu m'énerver, trouver une réplique cinglante pour lui souligner toute sa débilité, mais rien ne me venait. Je restai abasourdi. Elle avait couché avec un prof. Juste pour avoir des putains de réponse à un examen.

Neither good nor badWhere stories live. Discover now