10. Harpie en approche !

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Je vérifie mon emploi du temps pour la troisième fois avant d'entrer dans le lycée.

8h — Français, Mme Simon

9h — Mathématiques, Mr Le Jeune

Au vu de mon malaise de la veille, ça n'a pas été facile de convaincre mes parents de me laisser venir à l'école. En temps normal, j'aurais été ravie de les voir se fourvoyer et de pouvoir manquer les cours... Mais là, c'est différent : j'ai rendez-vous avec Mattéo, après tout !

D'ailleurs, c'est bien la première fois de ma vie que je suis impatiente d'être à 9h un vendredi matin. Plus qu'une heure à attendre... Et je serai enfin seule avec lui. Hors de question de gâcher ce moment à nouveau ! Je dois agir en héroïne, à présent. Je ne peux plus laisser ma timidité me dominer.

Quand j'arrive devant la salle de classe, je constate que seule une poignée d'élèves attend dans le couloir, incluant Sarah, Adam et Tricia, mais pas Mattéo. Je me dirige vers ma nouvelle amie, la salue, puis lui raconte ce qu'il s'est passé hier soir. Sarah écarquille grand les yeux en s'exclamant, toute excitée :

— Mattéo t'a ajoutée sur Facebook ? Vous avez réussi à avoir une vraie convers- !

— Parle pas si fort ! je la réprimande.

Je jète un coup d'oeil derrière nous pour voir que Tricia scrute, les yeux plissés, dans notre direction. Faîtes que cette commère n'ait rien entendu !

— Désolée, reprend mon amie, plus bas. C'est une super nouvelle en tout cas ! Vous avez parlé de quoi ?

J'ai bien envie de passer l'histoire de l'auto-identification sous silence, puis me souviens lui avoir déjà menti hier, et opte pour une sincérité totale, cette fois-ci. Je sors mon téléphone portable afin de lui montrer ma conversation avec Mattéo. Mais Sarah n'a pas vraiment le temps de faire de commentaire à ce sujet car quelqu'un me bouscule violemment, faisant tomber mon smartphone par terre.

Je me dépêche de le ramasser, tout en entendant une voix féminine dire :

— Oops, désolée, quelle maladroite je fais !

Toujours au sol, je relève les yeux. Une grande fille aux cheveux châtains me toise du haut de ses escarpins. Vu la tête qu'elle fait, ça m'étonnerait qu'elle soit ne serait-ce qu'un tout petit peu désolée.

Je me relève laborieusement avant de marmonner un :

— C'est pas grave...

C'est pas grave ? C'est pas grave ! Nathalie, bon sang, bouge-toi ! Tu as promis d'être une véritable héroïne maintenant, tu te rappelles ? Tu ne peux pas continuer à agir comme une lavette ! Dis quelque chose, aie de la répartie, ça se voit bien qu'elle l'a fait tomber volontairement, ton téléphone, bordel de merde !

— Bien sûr que non, que c'est pas grave ! réplique-t-elle en me poussant contre le mur. Je t'ai dit que j'avais pas fait exprès !

La grande perche remet sa frange en place tout en me foudroyant de ses yeux verts. Mais qu'est-ce qu'elle me veut, celle-là ? J'ai envie de m'énerver, de l'envoyer se faire voir, sauf que je sens ma maudite boule de chagrin envahir ma gorge et les larmes me monter aux yeux.

— Oh, quoi ! Tu comptes encore aller pleurnicher auprès des surveillants, c'est ça ? C'est tout ce que tu sais faire pour te défendre ?

— Bon, ça s-suffit m-maint..., commence Sarah.

— Toi, la grosse vache, tu la fermes !

Mon amie se tait sur-le-champ, et quelque chose change au fond de ses yeux. Toute sa malice ainsi que sa joie de vivre semblent s'être envolées, remplacées par un regard paralysé, terrorisé. J'imagine que cette situation la ramène quelques années en arrière. Je ne peux pas lui en vouloir de ne pas réussir à me défendre. Je dois le faire moi-même ! Je tente de ravaler mes larmes en balbutiant :

Banale !Where stories live. Discover now