T.G.V.

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   Tomber dans la déchéance la plus profonde, avec la certitude de vivre dans une plénitude sans nom.

   Perdu dans des abîmes on s'évertue à écorcher cette réalité qui nous maintient la tête sous l'eau et à l'en sortir par des rêves esquissés du bout de la pensée. Entichés de nos propres délires tortueux et vaguement fous, on baise son prochain comme on voudrait baiser la vie : sans passion ni douceur, sans tendresse ni chaleur. Avec un soupçon de rage refoulée qu'on se force à camoufler par peur de blesser.

   A se forcer à vivre on ne vit plus. Fringues, régimes, followers.. On ne distingue plus le réel du virtuel et on se meurt dans ses existences artificielles. Trop occupés à se raser, s'épiler, se maquiller, à faire fondre ce corps qui nous paraît trop encombrant mais qu'on ne remplace pas par un mental plus développé, on regarde le bonheur passer comme un TGV en pleine campagne : avec une curiosité lointaine et l'idée selon laquelle la gare n'est pas assez proche de nous pour faire l'effort de nous y rendre. Le marketing nous a bien eu : regardez, voilà le bonheur qui passe à votre droite. A gauche, votre reflet plastifié et sali, payé grâce à votre acharnement au travail pour des firmes surcotées. Vous le regardez avec la béatitude d'un enfant de quatre ans au zoo qui fixe un singe sans pouvoir ni l'approcher ni le libérer.

   Mais à force de regarder le bonheur passer, vous finirez par le rater.

A travers la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant