Lysa - 22 -

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Mon cœur endolori n'oubliera jamais. Il n'est pas capable d'aller chercher le plaisir, de partir à sa rencontre. Le moindre souvenir est une douleur mortelle qui me persécute. J'ai beau tenter de me cacher, la situation de ce week-end montre que je ne suis pas du tout guérie, que mes terreurs sont enracinées au sein de mon âme, toujours bien vivante. Je doute d'être un jour, la source de son bonheur.

– Je n'en sais rien. L'ambiance est devenue plus douce, magnétique, et voilà, ça s'est fait.

Le tintement de la clochette me fait détourner la tête vers l'entrée. Ethan pénètre dans la boutique, plus beau chaque jour dans son « suit » comme il dirait dans sa langue paternelle. Il devrait être légalement interdit d'être si séduisant en complet deux-pièces. Surtout, quand il arbore toujours cet éternel coiffé décoiffé dans lequel j'ai sans cesse envie de plonger mes mains. Aussi, cette position décontractée qu'il adopte en toutes circonstances, même quand son esprit semble accaparé par moi et Julie qui a le nez plongé dans le classeur des pertes.

Impossible de ne pas lui lancer un regard flamboyant malgré moi, le saluant au passage d'un petit signe de la tête. Mon corps le désire, perdu face à cette force sans mesure qui m'attire à lui, comme si nos âmes étaient coordonnées pour exercer une attraction l'une sur l'autre.

Julie, un faux sourire plaqué aux lèvres en entendant le son de sa voix, relève le nez de ses notes manuscrites.

– Bonjour, Monsieur Niels. Comment vous portez-vous ce matin ? Vous avez pu dormir confortablement sur vos deux oreilles ?

Cette dernière part dans d'interminables jérémiades, dans de pauvres lamentations inutiles, surtout, qui n'ont pas lieu d'être. Elle termine en lui assénant un discours pour le moins déplacé :

– Nous avions moins de soucis lorsque votre père était aux commandes.

Le principal intéressé rétorque du tac au tac au capitaine Julie, prête à prolonger la grande bataille.

– Tu n'as qu'à changer de boulot si cela te déplaît. Ils recrutent quelques petits chiens au snack du coin.

Bam!

Le temps qu'elle démêle ses reparties pour lui en sortir une, plus cuisante, Ethan se dirige vers moi, pose son attaché-case qui sent bon le cuir sur le comptoir. Mon pauvre cœur s'échappe de ma poitrine quand il referme brusquement le classeur de Julie de sa main gauche, ce qui me fait avoir un léger recul face à son humeur querelleuse.

– Laisse-nous deux minutes, veux-tu ?

Son regard ne se détache pas du mien, cependant, mon amie sait que ces mots sont pour elle.

– En cas de besoin, tu hurles. J'accourrai comme chaque fois que ce connard est dans tes pattes.

Au moment où elle passe derrière lui, Ethan porte ses longs doigts autour de son bras fluet. Ma bouche s'assèche alors qu'il la toise d'un regard polaire, celui dont je sais quoi penser, celui qui laisse transparaître toutes les émotions sur les traits de son visage et que je vais devoir affronter pour exprimer ce que je ressens. Cette simple pensée, qui maintenant m'obsède, me fait dresser une affreuse chair de poule sur tout le corps.

– Mademoiselle, quand je vous somme de lever le camp, faites-le sans discuter. Et mêlez-vous de vos affaires, vous m'en ferez le plus grand plaisir. Vous n'avez aucun droit d'intervenir dans les ordres émis par la direction générale, est-ce clair ?

Mon cœur palpite...

Julie finit par s'arracher de son étreinte furieuse, puis avance sans prendre en compte sa sévère remontrance. Ethan part retourner l'écriteau de la porte sur « fermé ».

L'envie d'aimer - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant