Traquée par un vampire

Chapitre 14

- Oui, et bien tu ne l'embrasseras pas maintenant, intervint une voix à l'entrée de la salle. 

Demyan se tenait dans l'encadrement de la porte, visiblement prêt à s'en aller. Mya quant à elle restait figée sur son siège, n'osant pas lancer un regard à qui-que-ce-soit. Elias, pourtant prit sur le fait, ne semblait pas le moins du monde déstabilisé. Il sortit de table -sans oublier de lancer un regard vers la jeune fille- qui reposait le reste de sa nourriture dans son assiette, le vampire lui ayant coupé l'appétit.  

Il fallait absolument qu'elle vérifie la définition de "bipolarisme". Et même sans ça elle était certaine que ce terme collerait parfaitement à la personne d'Elias. 

- Ne te laisse pas bouleverser pour une chose insignifiante. N'as-tu jamais eu de petit ami ? 

Mya équarquilla les yeux. Non, elle n'avait jamais eu de petit amis, et Elias n'en serait pas un. Pour qu'une relation fonctionne comme il faut, les deux personnes doivent s'aimer. Or, dans ce cas, ça n'est pas réciproque. Loin de là. Bien sûr il ne la laisse pas indifférente mais de là à... Brrr.

Non, ça n'arrivera pas.

- Le seul ami que j'ai jamais eût est Ethan, murmura-t-elle pensive. 

Elle se reprit bien vite. 

- Mais vous êtes arrivés, et maintenant je suis à je-ne-sais combien de kilomètres de lui et je ne sais même pas s'il va bien ou si quelqu'un se pose des questions sur ma disparition. D'ailleurs, vous y avez pensé à ça en m'enlevant ?! 

- Je me suis occupé de ces problèmes. Et Ethan va bien. Ton rôle à toi est... 

Demyan marqua une pause. Comment lui expliquer le rôle qu'elle avait à jouer ? Comment lui expliquer qu'elle était le deuxième enfant du Descendant, convoitée par le vampire le plus vil de cette génération et qu'il fallait à tout pris qu'elle ait un enfant avec Elias pour que la lignée des Descendants reste pure ?

Non. Décidément il ne pouvait pas lui annoncer une nouvelle pareille. Sa fille avait déjà beaucoup trop encaisser pour le moment, et elle devait encore se poser de nombreuses questions qui trouveront réponse plus tard. Pour l'heure, elle devait partir. Jilian sera heureux de rencontrer sa petite sœur.

Pour Mya, c'était autre chose : elle ne savait rien de ce "grand frère" et aucun des deux vampires n'avait juger utile de lui en dire plus sur ce fameux personnage. Encore une fois elle devrait se débrouiller seule.

Mais le stress l'en empêchera. Son estomac en pâtissait déjà...

- Te sens-tu prête ?

- Ais-je le choix ?

Demyan sourit. Non, bien sûr qu'elle ne l'avait pas...

Elle soupira de nouveau.

- Je vais me préparer.

Tout ce qu'elle espérait sur le moment en se levant de table était de ne pas recroiser Elias. S'il pouvait disparaître le temps d'une journée... non, pour un long mois, ce serait parfait !

•••

Lorsqu'ils furent en face de la porte d'entrée de la résidence -plutôt luxueuse- personne ne prit la peine de frapper. Demyan se tenait droit, en avant tandis que les deux jeunes restaient en retrait, Mya à une distance considérable d'Elias. Ce dernier n'avait pas fait resurgir les éléments de l'heure passée, au contraire : il s'était amusé à rabaisser Mia comme il l'avait toujours fait. Comme si le Elias de l'heure passée avait été possédé et qu'il avait miraculeusement retrouvé possession de son corps.

Elle tourna la tête vers lui pour admirer son visage. À en juger par son expression, il était aussi peu heureux qu'elle de se retrouver dans cette situation.

Sentant son regard pensant sur lui, Elias la regarda à son tour, et elle détourna le regard si vite qu'elle en attrapa mal au coup.

Ce fut ce moment que choisit Demyan pour faire part de leur présence. Il frappa trois coup bref sur la porte de bois, alors que Mya aurait voulu l'arrêter, des tas de questions la taraudaient : comment était son frère ? L'accepterait-il ? L'aimerait-il ? Et elle, est-ce qu'elle l'aimerait ? Elle ne se rappelait même plus de son prénom !

Mais à l'évidence il était trop tard pour les questionnements.

- Père ! Quelle joie de te voir enfin sur le pas de ma porte ! Clama une voix chaleureuse.

Des pas résonnèrent ensuite sur le perron boisé, mais la jeune fille n'osa pas lever la tête, de peur d'affronter. Tellement de choses à accumuler... Si seulement Ethan pouvait être là pour l'épauler ! Si seulement quelqu'un pouvait être là...

Elle sentit qu'on lui prit sa main et se crispa, songeant directement à son frère. Mais en regardant plus précisément, elle remarqua la cicatrice sur le majeur. Elias.

Fronçant les sourcils, elle le dévisagea tandis qu'il gardait le regard fixé face à lui. Il ne trahissait aucune émotion. C'est alors que Mya prît conscience d'une chose : elle ne parviendrait jamais à le comprendre, mais espérait au moins qu'avec le temps, tous deux réussiraient à s'appréhender.

La voix de Demyan la remit sur le droit chemin.

- Ne me fais pas regretter d'avoir fait le déplacement.

Jilian s'écarta pour laisser passer son paternel. Elias suivit, lâchant la main de Mya lorsqu'il gravit les marches du perron et rentra sans saluer le maître des lieux.

Personne ne prêtait plus attention à elle. Elle avait l'impression d'être une bombe, et que si elle n'était pas désamorcée dans peu de temps elle allait exploser et causer de sacrés dégâts.

Lentement, elle montât les trois marches. Des bottines noires entrèrent dans son champ de vision et enfin, elle daignat lever les yeux.

Son frère était là, devant elle. Un vrai frère, avec qui elle partageait le sang. Il la toisait de des yeux à la couleur du miel. Qu'était-on sensés ressentir à la découverte d'un parent ? De l'amour ?  Du rejet ? Pour sa part, son cœur ratta un battement, et ce fût tout. Elle n'avait pas envie de lui dire bonjour, ni de lui sourire, ni d'éprouver un quelconque soulagement ou une quelconque émotion.

À son contraire, de nombreuses émotions traversèrent Jilian de long en large et en travers. Tout y était : joie de la rencontrer enfin, colère de ne pas la voir s'exprimer, tristesse de ne pas l'avoir connue plus tôt...

Il la prît dans ses bras. Il la serrait fortement, ne voulant la lâcher sous aucun prétexte. Quant à elle, elle restait les bras ballants à attendre. Ce contact ne lui procurait rien si ce n'est la sensation d'être accolée par un étranger.

Cette fois, elle pensait vraiment que c'était tout. Qu'un battement de cœur était tout ce qu'elle avait ressenti en découvrant son grand frère pour la première fois.

Puis il prononça son nom.

- Mya...

Tant de douceur lui firent penser à du coton. Il l'avait appelée avec la douceur d'un père, l'amour d'un amant, la découverte d'un frère...

Tremblante, elle noua ses bras autour de la taille de Jilian.

Il n'y avait plus rien à craindre désormais : la bombe était désamorcée.