Tranches de Vies

.20 décembre - Noah.

J'ai déconné.

Elle a emprisonné ma vie, mes pensées, mon cœur. Depuis qu'elle m'a tout raconté, surtout. Depuis que je sais ce qu'elle a enduré. Je la savais exceptionnelle, je la découvre forte. Incroyablement forte. Cette fille est une merveille, un miracle dans ma vie. Arrivée au bon moment, juste pour me convaincre que ma décision de rentrer était la bonne. Elle croit que je l'ai sauvée, elle ne sait pas que c'est l'inverse. Elle est devenue mon point de repère, la raison de ma présence ici. Et il a fallu que je tombe amoureux d'elle. C'était inévitable, quelque part. J'ai lu assez de livres, vu assez de films pour connaître ce genre de situation. Mais tout occupé à l'épauler, à être là pour elle, je ne me suis rendu compte de rien. J'ai senti mon affection pour elle grandir au creux de mon ventre sans voir jusqu'où elle comptait aller.

Elle semble plus paisible. Toujours mélancolique, mais apaisée. Souvent, en entrant dans la pièce, je la vois, et elle me sourit. Simplement, d'un beau sourire, qui provoque des vagues de chaleur dans mon cœur et fait se retourner mon ventre. Ce soir, on était assis là, à regarder la télévision. Enfin, elle regardait la télévision, parce que je n'avais d'yeux que pour elle. Puis soudain, elle s'est désintéressée du film et a tourné la tête vers moi. Je l'ai contemplée, de si près que je pouvais sentir son souffle sur mon visage, et j'aurais voulu poser mes lèvres sur les siennes. Mais je ne pouvais pas. Je ne peux pas. Peut-elle encore aimer quelqu'un après ce qu'elle a vécu ? Puis-je la troubler avec mes sentiments après ce qu'elle a enduré ? Non, définitivement pas. Alors je me suis levé, je l'ai laissée seule et je l'ai ignorée quand elle est venue taper à me porte, me demandant ce qui n'allait pas. Ce qui ne va pas, c'est toi, Gaëlle. Jamais je ne lui dirai. Jamais je ne la détruirai comme Anna l'a fait. Encore que je me trouve bien présomptueux de croire que lui avouer mes sentiments, la repousser pour ça, puisse la faire souffrir. Je me donne beaucoup trop d'importance. Mais tout ce qui se rattache à elle a trop d'importance, ces derniers temps. Je l'aime trop. Trop, trop, tout est trop, en ce moment. Tout ce qui la concerne est trop. Trop beau, trop triste. Trop douloureux. Mon cœur est un idiot de ne pas savoir se taire.

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