Chapitre 10

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"Il vaut mieux donner aux enfants des règles qu'ils enfreindront que de ne pas leur en donner du tout" - Tipper Gore

Je me retourne vers le calendrier mural, nous sommes dimanche, Jen se fera opérer le mardi 9 Mai. Aujourd'hui elle profite de sa famille dans la maison accompagnée du grand champs de sa grand-mère. Mon père ne souhaitait pas que je passe ma journée à la maison, tournant en rond et stressant un peu plus et m'a donc proposé de l'accompagner au café. Après avoir montré de la réticence, j'ai finalement concédé que ce n'était pas une mauvaise idée.

Me voici alors derrière le comptoir, portant un tablier bordeaux recouvrant mon t-shirt et mon jean. Je dois avouer que même ici je tourne en rond. Mon père s'occupe de réparer un tuyau de plomberie qui a explosé la veille dans les toilettes légèrement insalubres du petit commerce. Les clients du jour peuvent se compter sur les doigts d'une main, c'en est déprimant.

Je nettoie une table quittée quelques instants plus tôt par un groupe d'étudiants tandis qu'un homme rentre dans le café.

— Bonjour, bienvenue à Le Manchester, je m'appelle Miles, si vous souhaitez quelque chose n'hésitez pas.

— Un grand americano s'il-vous-plaît.

Je reste passablement surpris face à ce manque de chaleur mais en observant l'homme, je comprends qu'il n'est pas d'ici. Il porte ce costume trois pièces bleu marine et un porte-document noir en cuir. Il n'est pas vraiment grand, il est peut-être plus court que moi mais il a de la prestance. Il dépasse la cinquantaine, ses cheveux sont d'un beau poivre-sel. Je veille à bien me nettoyer les mains avant de lui préparer son café dans une grande tasse blanche.

— C'est du 100% arabica, je précise en remplissant sa tasse. Ça vous fera 3,50$.

Je dépose le récipient sur le comptoir et constate que l'homme vient de poser un billet de 20$.

— Vous pouvez garder la monnaie. Il annonce.

Je cache ma surprise et récupère le billet. Je le tends face à la lumière et prends soin de vérifier si c'est bien un autenthique billet américain. En temps normal je ne le fais pas car je connais bien les habitants de cette ville, mais lui derrière son attitude hautaine ne m'inspire pas une grande confiance. Dans ma vision périphérique, je constate qu'il m'observe étrangement se demandant certainement si je suis sérieux.

— Désolé, c'est la procédure.

Il ne réagit pas vraiment, attend que j'encaisse son billet et se retourne, s'asseyant à une table près de la vitrine. Je nettoie la machine à café sophistiquée à l'aide d'un chiffon doux mais guette tout de même le client du regard. Il touille son café, bois une gorgé et semble satisfait par sa qualité. Il n'a pas sourit, il a gardé son visage serré, mais il n'a pas grimacé, je crois que c'est un très bon point.

On pousse sur la porte d'entrée et un vent froid débarque dans la pièce. Je me penche au-dessus du comptoir pour voir qui sont mes nouveaux clients et souris immédiatement en les découvrant. Ce sont Joyce et Chester, deux gamins de onze ans. Ils me rappellent énormément Jen et moi plus jeunes, sauf qu'elle est brune et lui blond. Ils rigolent et crient, je les accueille jovialement.

— Salut Miles! Me lance Joyce.

— Qu'est-ce que je vous sers?

— Hum... on voudrait bien un chocolat chaud chacun mais on a à peine de quoi se payer un seul... explique le blond embêté.

— Donnez-moi, tout ce que vous avez et je vous fais quand même ça. J'annonce de bonté de cœur.

Ils vident leurs poches et déposent toutes leurs pièces sur le comptoir. Je compte les pièces, il y a beaucoup de pièces de un et deux cents, pour un total de 2,05$. Je range l'argent dans la caisse et prépare malgré tout leurs chocolats, veillant à mettre une bonne dose de crème de chantilly sur le dessus. Je pose les boissons sur le comptoir et regarde sévèrement les deux meilleurs amis.

Heart Monitor (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant