Episode 38

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Niccols passa la matinée à rattraper les évènements de la nuit la plus sanglante que la ville avait connue depuis vingt-six ans. Il dut se contenter des journaux, même s'il aurait volontiers appelé Larry pour en savoir un peu plus. Il se doutait toutefois que ce dernier devait être extrêmement occupé aujourd'hui, comme tous les autres de leur service.

En bon inspecteur qu'il ne pouvait cesser d'être, il récapitula machinalement où les choses en étaient : Il Pater et El Padre morts, le Dog en fuite, Benz en deuil, Smiley et Ivan toujours aussi petits – ce qui leur sauvait la vie, compte tenu des circonstances. Il restait donc Frank, retranché mais qui n'avait rien perdu de son pouvoir, et Domino qui avait récupéré les gangs italien et portoricain cumulés. Il restait toujours une indécision du côté d'Ellroy. Sans ça, quel étrange duo pour se partager la ville...


Pas pour longtemps, se rappela-t-il soudain, délaissant son costume invisible d'inspecteur. Avec le Dog, ils risquaient de mettre un grand coup de pied dans cette fourmilière toute neuve. Il se demanda pour la première fois qui récupérerait le pouvoir s'il tuait Frank. Puis il réalisa qu'il n'en avait pas réellement grand-chose à foutre. Il ne savait même pas ce qu'il deviendrait lui-même. Il n'avait aucune vision d'avenir au-delà de ce meurtre.


L'après-midi commençait et il s'activait à faire un peu de rangement lorsqu'on toqua à sa porte. Il s'immobilisa au milieu de son salon, une bassine de linge dans les bras. Peu habitué à recevoir des visites impromptues, encore moins depuis son renvoi du LVPD, il ne pouvait s'empêcher d'échafauder mille scénarios différents dans ce genre de situation. Il ouvrit finalement la porte et aucune hypothèse n'était bonne.


— Kimberley, fut tout ce qu'il trouva à dire face à ces yeux noirs qui semblaient l'accuser, même s'il ne savait pas trop de quoi.


Mais la jeune fille s'effaça aussitôt, et derrière elle il y avait encore deux personnes – le garde du corps qui semblait décidément toujours partout, et un vieil homme en costard qui portait une serviette en cuir. Ce dernier s'inclina légèrement et prit la parole d'un ton courtois :


— Monsieur Niccols ?

— Oui ?

— Je me présente : maître Novak, je suis l'exécuteur testamentaire de Sybille Benz. Dont vous fûtes... le premier époux, si mes informations sont correctes.

— C'est exact, murmura Niccols en évitant soigneusement les deux autres du regard.

— Mademoiselle Benz, reprit l'avocat, a eu la gentillesse de me conduire jusqu'à vous afin que je puisse vous informer des dispositions du testament de madame Benz vous concernant. Pouvons-nous entrer ?


Niccols se poussa machinalement avec un geste vague, et les trois entrèrent en file indienne.


— Vous pouvez vous asseoir là, précisa-t-il en désignant le coin salon.

— Merci, répondit maître Novak en choisissant le petit canapé.


Kimmy jeta un regard circulaire vaguement réprobateur et finit par prendre place dans le fauteuil à côté. Le garde du corps s'appuya contre le comptoir mais resta debout. Niccols fut le dernier à s'installer ; il alla chercher une chaise du côté cuisine, qu'il plaça face au canapé, devant la télé.

Viva Las Vegas [Terminée]Where stories live. Discover now