Skyline Emrys

34 - Diviser pour mieux régner

23 Mai 2051
Huit jours plus tard

Cette fois, nous y étions. Et cela ne cessait de me rappeler ce moment, un peu plus d'un mois plus tôt, ou pareil rassemblement – ou presque – avait été vu pour la première fois de toute l'histoire de Skyline Emrys. Pour la destruction de l'élémentaire de Malka.

Valhalla voulait briser nos forces et notre unité. Nous, nous tentions de lui montrer que tout ceci ne finirait pas nécessairement comme il l'attendait, que nous étions peut-être ses prisonniers mais que nous ne nous laisserions pas abattre comme des agneaux à l'abattoir.

Nous marchions à nouveau vers Malka ; dans la même direction, du moins. Nous n'avions pas pris le portail, cette fois, il fallait donc que nous y allions à pieds. Si je marchais en tête de mon équipe, Shaïn marchait en tête de la sienne et de tout notre rassemblement. Cela devait représenter quatre fois moins de joueurs que lorsque nous avions fait pareille marche pour Malka, et Shaïn ne nous avait pas fait de discours.

— Tout le monde se souvient de sa place et de son rôle ? demandais-je à mon équipe tandis que nous approchions de la statue déjà en vue.

Un coup d'œil par-dessus mon épaule m'apprit qu'ils étaient tous prêts.

Outre les consignes générales, j'avais donné comme unique consigne – je ne voyais pas en quoi je me sentais supérieur à eux pour me permettre de leur donner des ordres – ces simples mots :

— Si la vie des autres n'est pas mise en danger lorsque la vôtre est menacée, n'ayez aucune honte à fuir. Tant que vous pouvez sauver votre vie sans mettre en péril celle des autres... il n'y a pas de mal à vouloir se mettre à l'abri un moment. Votre mort ne servira personne.

Personne n'avait relevé la couardise de mes propos. Je me demandais moi-même comment j'avais eu l'audace de leur en parler. Néanmoins, je le pensais vraiment.

Notre groupe était sur le flanc gauche, et nous devions nous débarrasser des monstres, non pas de la statue comme nous le souhaitions pourtant.

Mon meilleur ami fit stopper tout le monde, et nous regarda tous comme il aurait compté les élèves de sa classe pour ensuite nous libérer de son cours en disant « A demain ! » :

— Quelques raids nous ont donné pas mal d'informations qui nous manquaient, et je remercie tout particulièrement les Lithium qui ont, entre tous, tenus un rôle important dans cette collecte d'information. Je pense donc que tout est pour le mieux ainsi. Si nous n'y parvenons pas aujourd'hui, nous n'y parviendrons jamais. Alors nous vaincrons, c'est tout. En avant !

Et comme un seul homme, nous nous ébranlâmes pour nous lancer dans notre nouvelle bataille.

Cette fois, mon faible niveau et mon manque d'expérience ne me préoccupèrent pas le moins du monde. Parce que tout cela serait bientôt du passé. A condition, pour cela, de participer à la chute de la statue qui cherchait à se défendre elle-même de nos attaques.

La zone délimitée autour de l'effigie d'Heimdall infligeait trois altérations d'état préjudiciables : un ralentissement des mouvements, une auto-régénération diminuée, et l'application d'un poison volatile qui ne cesserait de nous empoisonner que si nous quittions la zone. Autant dire que nous partions clairement désavantagés, mais loin d'être vaincus.

Notre combat était toujours le même. Esquive, riposte. Le loup que je venais d'achever s'écroula puis s'estompa pour retourner au néant. Un autre lui succéda immédiatement, ne me laissant aucun répit pour évaluer ou nous en étions. Ce n'était que des combats, des combats, et encore des combats.

Si je ne m'inquiétais pas vraiment pour moi-même, en revanche, je me faisais beaucoup de soucis pour les autres. C'était une réaction à la fois stupide et rationnelle.