57 - Le retour du guerrier

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— Je crois que c'est le moment, nous alerta Wayann, le regard tourné vers la foule.

Les joueurs se mettaient effectivement en mouvement.

— Une dernière chose, nous retint Shaïn. Vous vous souvenez que nous attaquons le flanc gauche, n'est-ce pas ? La statue étant dos à la muraille de Naglafar ce sera plus compliqué que les autres statues que nous avons affrontées.

— De toute façon, dans ce jeu, nous n'avons jamais rien obtenu par la facilité, fit remarquer Sohona, le regard trouble. Valhalla s'est toujours arrangé pour nous faire payer le prix fort. A chaque fois.

— C'est vrai. Allez, soyons forts et courageux. Pour nos amis. Marchons et battons-nous la tête haute.

Tandis que nous marchions vers la statue, j'eu l'impression de sentir la détermination de mes compagnons comme un manteau de couleurs posé sur nos vêtements tout en noir, un manteau protecteur et réconfortant. Unis comme si nous étions sous une seule bannière, notre alliance me faisait l'effet d'un condensé pur de courage.

Regarde-nous, Aramise, pensais-je. Regarde-nous vivre jusqu'à la fin de notre vie. Tu ne seras jamais seule ; et nous non plus.

L'évènement commença normalement, avec une quantité de mobs astronomique nous empêchant d'atteindre la statue. Mais la suite se compliqua dangereusement et très rapidement dès lors que les premiers joueurs parvinrent à atteindre la statue inébranlable de Loki, le dieu de la Malice et des Illusions. Car non seulement le nombre de mobs nous empêchant d'approcher était énorme, mais en plus nous devions aussi compter sur les avatars de nos amis tombés pour nous barrer la route.

Ils nous prirent par surprise, nous prenant à revers, empêchant une retraite de masse dans le cas ou nous en aurions besoin. Or, se battre contre nos anciens compagnons, nos amis, nos partenaires d'aventure, nos frères et sœurs d'arme, était le combat le plus difficile que nous avions à livrer. Certains joueurs mourraient sous nos yeux car ils étaient incapables de porter le coup de grâce à un ami proche, même si celui-ci n'était plus qu'un avatar, une coquille vide.

Je priais intérieurement et de toutes mes forces pour ne croiser ni Aramise ni Kallaan. Je savais pertinemment que je n'aurais pas le courage nécessaire pour m'attaquer à eux, et encore moins pour les achever. Leurs derniers instants à tous les deux, morts sous mes yeux, étaient encore imprimés dans ma rétine. C'était une image traumatisante qui ne me laissait aucun répit, pas même lorsque mes paupières étaient closes.

Quelque chose capta mon attention et me fit inspecter les environs au radar, tous mes sens en alerte. J'avais cru entendre un nom familier que j'avais espéré et redouté tout à la fois. Néanmoins, je m'aperçu rapidement que mes oreilles ne m'avaient pas trompées. Il était bel et bien là. Kallaan. Mira courrait vers lui comme elle aurait couru dans les bras de son amant, mais je ne pouvais pas voir les expressions de son visage à cause de son heaume.

— Et merde, crachais-je entre mes dents serrées, tremblant de colère et d'horreur.

Je m'élançais vers eux sans réfléchir, slalomant entre les combats qui faisaient rage, atteignant Kallaan en même temps que Mira. Dans ma lancée, je la bousculais intentionnellement afin de la pousser hors de la trajectoire de l'avatar qui ne manqua pas de remarquer que nous étions des joueurs qu'il avait fréquenté de son vivant.

— Lyall ! s'exclama-t-elle, partagée entre colère et surprise. Qu'est-ce que tu fais là ? Tu devrais être sur le flanc ouest !

— Et toi au centre, répliquais-je sans quitter Kallaan des yeux.

Skyline EmrysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant