Chapitre 10

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    « Mais en fait, le but de ce bouquin, c'est de raconter une histoire, des morales, ou simplement des anecdotes ? questionna Jules. Parce que vous m'avez déjà posé des questions...

    _ C'est... Tout cela à la fois, répondit Andrew. Vous parlez de ce que vous avez vécu ici ou non, de vos rêves, et le lecteur en tira ou non une leçon. Ce sera à lui de l'interpréter comme il l'entend.

    _ Oui, mais, poursuivit l'homme, comme je vous l'ai dit la première fois, il ne m'est jamais rien arrivé d'extraordinaire...

    _ Vous pouvez parler d'une injustice, ou même d'une petite chose qui vous a rendue heureuse. Vous n'avez pas forcément besoin d'évoquer un voyage extraordinaire. Au pire, en attendant de trouver une idée, vous pouvez toujours aider ceux qui en ont une. Peut-être qu'ils sauront justement vous rappeler un souvenir.

    _ Moui, en effet... »

    Sophia leva la main, comme s'ils étaient tous de retour en primaire, pour prendre la parole. Andrew, en bon professeur, l'interrogea.

    « J'aime beaucoup le concept, malheureusement, je n'ai pas un talent fou pour l'écriture... Alors, ne pourrait-on pas faire des groupes ? Par exemple, une personne plus expérimentée avec quelqu'un de moins douer ? »

    Des hochements de tête enthousiaste accueillir la remarque. L'écrivain tenta de créer des trios plus ou moins bien équilibrés, en prenant en compte les affinités de chacun, afin d'éviter des conflits inutiles. Une fois que ce fut fait, chacun se replaça autour du « U », prêt à atteindre les instructions du Britannique.

    « Comme l'a dit Madame Delois...

    _ Appelons-nous par nos prénoms, coupa la femme, ce sera plus convivial.

    _ Très bien... Donc, repris Andrew, comme l'a dit June, commençons par un tour de table. Vous pouvez proposer vos souvenirs, vos idées, des choses qui vous sont arrivés à vous ou bien à d'autres – je ne vous demande pas de vous introduire dans la vie privée des autres sans leur accord, ni de vous dévoiler si vous ne le désirez pas. Cela peut aussi être un sujet, plus ou moins léger, qu'ils vous semblent important d'aborder. Il peut être considéré comme tabou ou non. Vous avez carte blanche. On va partir de la droite, et aller jusqu'à la gauche, d'accord ? Donc... Lou, vas-y commence.

    _ J'aimerais que l'on parle de la rencontre. Une rencontre qui peut changer une vie, quelque chose de fort.

    _ Tu as un exemple particulier à donner ? Qui te concerne toi ?

    _ Je pense. »

    Le brun se douta qu'elle faisait allusion à Séléna, mais se tût, pour ne pas trahir le secret de la jeune serveuse. À elle – et sa petite amie – de décider quand elle se sentirait prête.

    « Bien, je note. Séléna ?

    _ Je pensais comme Lou. Une rencontre. Peut-être qu'on peut rajouter insolite, mais une rencontre, ça me paraît bien.

    _ D'accord... Quelqu'un d'autre ?

    _ Moi... »

    Une petite fille d'environ sept ans, blonde, des tresses et un grand sourire auquel il manquait deux dents, avait levé la main.

    « Je voudrais parler de mon chat... »

    L'assemblée sourie, attendrie par la petite.

    « Tu veux dire l'attachement qu'on peut ressentir pour quelqu'un ? Une personne ou un animal ?

    _ Oui, répondit la fillette intimidée.

    _ Très bien, c'est noté. »

    Il continua de passer d'une personne à une autre, nota les idées de tout le monde, en assembla quelques-unes avec l'accord des donneurs, si tant est qu'il puisse appeler comme ça ses collaborateurs. Les pages qu'il réussit à noircir étaient un ensemble de schémas où  se mélangeaient les idées des plus jeunes comme des plus vieux. L'ensemble était chamarré, étonnant et joyeux. Cela ressemblait à l'atmosphère de chez Jean. Des sujets tous plus différents les uns des autres, important pour chacun, ou simplement amusant allaient constituer ce livre écrit à une vingtaine de mains. Chacun y mettait du bon cœur, et voir tant de monde se sentir impliqué mettait du baume au cœur d'Andrew, qui allait d'un groupe à l'autre pour griffonner deux ou trois informations, ou simplement donner des conseils. Il avait été décidé que chaque groupe s'occuperait d'un chapitre... Pour le moment. Les débuts étaient prometteurs, et il imaginait sans mal les écrivains en herbe enchaîner sur d'autres sections de l'ouvrage.

    Certains étaient allé chercher des ordinateurs, tandis que d'autres préféraient écrire dans des cahiers ou sur des feuilles, comme à l'ancienne. Chacun avait ses petites habitudes, et Andrew laissait chacun évoluer comme il le sentait, en apportant de temps en temps son grain de sel. Il en profita également pour remercier une énième fois Séléna et Lou, à l'origine du projet. Les jeunes filles lui firent comprendre que c'était tout à fait normal de s'entraider. C'était comme ça que ça marchait ici, à St Laurent. Ce que tous lui confirmèrent.

    À la demande de plusieurs et avec l'aide d'Emilia, il réquisitionna un panneau d'affichage, pour y épingler la trame, et pour que chacun, avec des post-it, rajoute son grain de sel. On définit une couleur par groupe, pour ne pas tout mélanger.


    Andrew observait le travail de chacun, lorsqu'un homme s'approcha de lui. Aussi brun que lui, un béret sur la tête, et dans la même tranche d'âge que l'écrivain, il tenait entre les mains un appareil photo.

    « Excusez-moi... Je suis photographe, et je travaille pour le journal local. Celui de la ville d'à côté. Est-ce que ça vous dérangerait de poser à côté du panneau pour un article ?

    _ Je... euh... Non, bien sûr. Vous pourriez également faire une photo du groupe, ce serait plus représentatif ?

    _ Oui, vous avez raison.Pensez-vous que ça dérangeait si vous demandiez à tout le monde de se rassembler ? Juste quelques minutes, le temps d'une photo...

    _ Non, bien sûr.Attendez, je vais les prévenir. »

    Et c'est ce qu'il fit. Il regroupa tout le monde près de la grande pancarte, qui croulait déjà sous les notes. Aux pieds des écrivains en herbe, des feuilles volantes avaient glissé. Le journaliste immortalisa l'instant, et les autres se remirent au travail. Il allait partir, mais Andrew l'interpella.

    « Excusez-moi ! Comment vous appelez-vous ?

    _ Brow. John Brow.

    _ Eh bien John Brow, je me demandais si cela vous intéresserait de participer à ce grand projet ?

    _ Hum... Oui, pourquoi pas... Mais vous savez, à part rédiger des petites lignes dans une gazette, je n'ai pas une grande expérience derrière moi...

    _ Vous êtes photographe et reporter non ?

    _ Reporter... Le mot est peut-être un peu fort.

    _ Cela vous dirait-il, le coupa Andrew sans tenir compte de sa remarque, de gérer la partie visuelle et recherche ? Je m'explique. Peut-être pourriez-vous photographier, ou trouver des images d'archives, pour illustrer les pages ? Il vous suffirait de demander à tous ceux présent ici de vous en donner, avec leurs accords. Qu'en pensez-vous ?

    _ Oui, pourquoi pas, ce serait intéress... »

    Sa phrase se noya dans sa gorge et l'atmosphère détendue qui régnait jusque-là disparu d'un coup, comme envolée. Un homme venait d'entrer, et chacun s'était mis à marmonner, ou à baisser la tête, dans le cas de Lou et Séléna.

    _ Bonjour, lança la voix rocailleuse de Maurice. Moi aussi, j'ai quelque chose à dire.

Eh voila ! Alors que pensez-vous que Maurice va raconter ?
Je vois laisse sur cette question !
Mamie_grumpy et Taquapax

Chez JeanWhere stories live. Discover now