Fausseté

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Il y avait cru. A son charme, à ses promesses sussurées dans le creux de l'oreille au milieu de la nuit, ses "je t'aime" qui paraissaient sincères, à ses câlins, ses baisers, ses doigts courant sur sa peau, ses blagues vaseuses pour le faire rire quand il était mal. Oui, il y avait cru et malheureusement, tout ce qui l'entourait, son être, sa personnalité et ses mots étaient faux. Il n'y avait rien de vrai, chez lui. Tout n'était qu'une façade construite au fil du temps et incassable. Il aurait dû s'en rendre compte, savoir qu'il n'était pas celui qu'il prétendait être et se méfier, comme il l'a toujours fait. Mais le temps à fait son œuvre et il a relâché la pression.

Il avait gagné sa confiance après des années, des mois, des jours, des heures et des secondes d'acharnement et de combat. Il avait atteint son but premier et il ne restait plus qu'à le briser car c'était ce qu'il aimait faire. Casser les gens, les blesser et les laisser en milles petits morceaux, seuls avec leurs malheurs et loin de lui. Il aimait voir leur visage se tordre sous le choc des révélations, les larmes ruisseler sur les joues, voir disparaître la petite lueur qui brillait dans leur regard quand ils le regardaient. La douleur des autres le rendait euphorique et il sentait une sensation indescriptible à chaque fois qu'il faisait sortir ces personnes de sa vie.

Et l'autre, le petit, le vulnérable, le blond qui lui avait demandé tant de travail le regardait avec les mêmes yeux que toutes ses victimes précédentes et il s'en voulait un peu. Il s'en voulait car au fond, il avait fini par découvrir que ce petit machin l'avait touché, tout au plus profond de lui, dans la partie de son cœur qu'il n'avait pas utilisé depuis longtemps. Il s'en voulait de ressentir des émotions contradictoires avec ses actes et il s'en voulait car, finalement, ce n'était pas lui, qui avait posé le piège. C'était lui qui était tombé dedans.

Il avait perdu ses moyens face aux yeux bleus de son compaire. Il avait perdu sa dignité, sa force et son courage. Et Newt, le p'tit gars, a mal interprété les propos. Il avait posé sa main sur son épaule, en un geste qui se voulait rassurant mais qui ne l'était pas du tout. Il lui avait dit que tout irait bien et qu'il pouvait lui parler de tout ce qui lui traversait l'esprit en ce moment-même. Et Thomas avait fini par inspirer profondément avant de plonger ses prunelles aux couleurs sombres dans celles plus claires du garçon, une tête plus petit que lui.

Oh, il voulait lui briser le cœur, faire comme avec tout le monde, faire comme cette Teresa qui lui avait enseigné l'art de la traîtrise et du mensonge. Il le voulait vraiment, mais pas son cœur.

"Qu'est-ce que c'est cucul" pensa-t-il. Ne pas pouvoir faire comme avec tous les autres simplement parce qu'il avait développé cette maladie incurable qu'est l'amitié ou l'amour et dont la frontière est presque invisible. N'importe qui pourrait le faire à sa place. Et se dire, "je ne le souhaite pas vraiment de tout mon cœur" ressemblait fortement à une phrase de fille. Et il n'était pas une fille.

Il restèrent en silence, ainsi, assis sur ce rocher, face à la mer qui éclaboussait leurs chaussures et rongeait le caillou de calcaire, refuge de bestioles marines.

Newt finir par enlever sa main de son épaule à son grand soulagement. Le soleil se couchait au loin et il entendit la voix du blond pour la première fois depuis au moins deux heures.

-C'est romantique de voir le soleil frôler l'horizon et flirter avec les vagues.

Le brun essaya tant bien que mal de se concentrer. Il sentit ses organes démarrer une fête, lui donnant la nausée. Il se força à oublier son estomac qui sautait sur de la musique électro pendant que son foie et son intestin dansaient la samba.

-Écoute Newt... C'est difficile à dire mais...

Il devait être le plus sincère possible. Faire abstraction de ses sentiments pourraient toujours aider. Il devait le faire. Pour maintenir une réputation dont il n'était pas fier, mais qui le rendait intéressant et qui laissaient les autres admiratifs. Car oui, tout ça, c'était pour l'image qu'il se donnait au lycée.

Il inspira l'air marin.

-Toi et moi... On ne peut plus. On a été trop loin. J'ai été trop loin. Je n'aurais jamais dû faire tout ça et j'en suis désolé.

Il refusait de voir son visage. Il ne voulait pas le voir triste, les larmes aux bord des yeux, il ne voulait pas voir, dans ces yeux océan, le sentiment de la trahison.

-Tout ça, reprit-il, c'était... ce n'était pas censé aller aussi loin. Depuis le début, il n'y avait rien de vrai. Absolument rien.

Il ferma les yeux. Il avait l'impression de se mentir, à lui, Thomas, le briseur de cœur, mais il continua.

-Je ne t'aime pas, Newt. Je ne t'ai jamais aimé.

Les mots étaient secs, durs, empreints d'une vérité teintée de mensonge et Newt inspira et fit face à l'océan. Il s'y attendait. Il savait que ce jour arriverait. C'est pourquoi il s'était promis que jamais il ne tomberait amoureux. Et il avait échoué. Il avait résisté tant bien que mal et il avait raté. Tout. Ça, sa vie, tout.

-Dis quelque chose, Newt... Chuchota Thomas.

-Que veux-tu que je te dise? Tu as réussi? Tu as fait comme avec tous les autres. J'aurais dû le savoir... Tu ne sais rien de l'amour. Tu joues avec les sentiments, tu joues avec les personnes. Tu les brise, tu es content et tu repars à la chasse. Comment peux -tu seulement te regarder dans la glace, le matin? Tu as tout d'un monstre.

Thomas savait qu'il avait raison. Que son discours décrivait parfaitement des activités. Néanmoins, il était blessé. Parce que c'était lui qui l'avait dit. C'était lui, celui dont il avait fini par tomber amoureux comme s'il avait chuté d'une falaise, lui le crétin prétentieux et avec un égo gros comme une voiture de luxe qui avait fini par succomber au charme de ce petit gars discret, qui vivait sa vie tranquille, dans personne. C'était irréel, impossible et malheureusement vrai. Il avait tenté d'agir comme il le faisait toujours. Dire la vérité toute crue, alors qu'ils passaient un bon moment et clore l'histoire en partant. Mais cette fois-ci, il avait pris la place de la victime. Il ressentait pour la première fois,  ce que les autres avaient enduré.

Newt se leva, essuya ses mains moites sur son jean et contempla le coucher de soleil, une dernière fois.

-Et bien, Thomas. Tu es un beau connard. Je te félicite. Une croix de plus à ton tableau.

Malgré tout, Newt faisait bonne figure. Il essayait au moins de cacher sa tristesse derrière un masque, chose qu'il faisait très bien. Il tourna les talons sans se retourner.

Thomas le regarda s'en aller et baissa la tête. Quel connard, en effet. Il n'y avait pas plus con que lui, pas plus stupide, manipulateur, enfoiré, salop. Les insultes n'étaient pas suffisantes. Il savait désormais ce que ça faisait de savoir qu'après des mois d'intense relation, tout s'arrêtait sur un coup de tête et que tout était basé sur un mensonge.

Il se leva, dérapa sur le caillou, s'erafla le genou et se dit que, de toute façon, il le méritait. Il méritait de souffrir pour avoir fait subir tout ça aux autres. Il se redressa quand même, courut jusqu'à la berge et tapota l'épaule de Newt. Celui-ci se retourna, les yeux embués.

-Qu'est-ce que tu veux, demanda-t-il en reniflant.

-M'excuser, avoua Thomas. Te dire que c'était faux. Qu'enfin de compte, avec toi, je ne jouais pas. Enfin, au début si, mais après... je sais pas, quand je te l'ai dit, je me suis rendu compte que c'était des conneries. Crois-moi, je suis sincère.

-Comment pourrais -je te faire confiance? Tu viens de me dire qu'une part était de la comédie. Tu es fait pour ça, Thomas. Jouer la comédie, être acteur. Ça ne prend pas avec moi. Tu as fait mumuse, tu t'es bien amusé, maintenant sors de ma vie.

Newt continua à avancer, toujours plus loin de lui. Et Thomas sentit un vide l'engloutir, l'aspirer. Il le perdait. Il perdait Newt.


Hey!! Il date de cet été mais voilà, je pense qu'il est fini x)

Newtmas foreverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant