17* Inquiétude

3K 339 163
                                    

Nathan sentait les regards de Lucie converger vers lui toutes les dix secondes. Se forçant à écouter attentivement les propos obscurs du professeur de droit, il se concentra sur sa prise de note. L'ironie du sort avait voulu qu'il se retrouve entre sa meilleure amie et Caleb, ce qui ne lui facilitait pas la tâche. Quand le jeune homme sentit une énième fois les coups d'œil en coin de Lucie, il soupira et se pencha vers elle.

-Si tu as quelque chose à dire, dis-le, chuchota-t-il assez bas pour qu'elle seule l'entende.

-Quand je te disais d'aller parler à Caleb, ce n'était pas pour rompre ! siffla son amie en retour.

-Je suis encore libre de mes décisions, fit remarquer Nathan. J'ai mis les choses au clair avec lui, nous avons eu un échange correct et à présent nous repartons du bon pied. Qu'est-ce qu'il te fallait de plus ?

Lucie leva les yeux au ciel.

-Vous repartez du bon pied hein ? se moqua-t-elle. Vous vous fuyez comme la peste, mais à part ça...

-Tu t'attendais à quoi, à ce qu'on se fasse la bise tous les matins après avoir rompu ?

La jeune fille ne répliqua pas, mais Nathan devina à son air renfrogné que la situation lui déplaisait. Contrarié, il reporta son attention sur le cours. Qu'est-ce qu'il aurait dû faire ? Continuer à mener une relation illusoire au risque de briser définitivement Caleb ? Non. Il avait déjà assez mal agit à son encontre, il ne pouvait pas lui faire ça. A présent que tout était réglé entre eux, les choses allaient enfin pouvoir reprendre leur cours normal, sans ambiguïté.

A la fin de la journée, Emmanuelle proposa une habituelle réunion de groupe dans leur bar fétiche. Tout le monde accepta, même les jumelles qui avaient pourtant pris un retard épouvantable dans leur travail. Nathan s'occupa de ramener leur commande et d'écouter sans bruit les conversations de chacun. La bonne humeur était au rendez-vous, et, pour la première fois deux semaines, le jeune homme put enfin rire et se détendre sans penser à des choses fatalistes.

-Désolé, mais je vais rentrer, dit-il alors au bout de deux heures.

-Quoi ? Déjà ?! s'exclama Cathy qui attaquait sa troisième bière.

-J'aimerais m'avancer dans les devoirs pour la semaine prochaine...

-Nathan, soupira Emmanuelle en levant les yeux au ciel. Je suis certaine que tu n'as plus que quelques lignes à ajouter au devoir maison qu'on doit rendre, alors repose tes fesses sur cette chaise et profite un peu.

-Non, je préfère rentrer, insista le jeune homme, ce qui lui valut plusieurs soupirs navrés.

Sans écouter les protestations de ses amis, il jeta son sac de cours sur son épaule et quitta le bar en leur faisant de grands saluts de la main.

-La prochaine fois on t'attache ! plaisanta Fabien.

Nathan pouffa et sortit affronter le froid mordant de février. Il grimaça, regrettant de ne pas avoir pris une veste plus chaude, et se hâta vers son appartement. Les mains gelées malgré ses gants, il sentait d'autant plus la morsure du froid que la peau de ses paumes était arrachée à de nombreux endroits. Ses TOC avaient repris le dessus sur beaucoup de points, mais Nathan s'en fichait : il maîtrisait de nouveau parfaitement le déroulement de sa vie, même si son père refusait toujours de lui parler. Mais ce n'était qu'un détail. Le jeune homme avait appris à espérer que la fureur et l'incompréhension paternelles se calmeraient un jour ou l'autre.

Nathan s'arrêta alors au beau milieu du trottoir, surprenant plusieurs passants hâtifs qui lui lancèrent des regards mécontents. Maintenant qu'il y repensait, il y avait une chose dont il ne s'était pas encore occupé. Prenant son portable, il composa un numéro et attendit. Au bout de quatre sonneries, une voix féminine familière lui répondit :

Don't Touch MeWhere stories live. Discover now