...quatre jours...

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Quatre jours.
Quatre jours que j'ai le corps engourdis et la vision embrumée, quatre jours que je m'enfile des petites doses de comprimés pour endormir mon manque.

Quatre jours...

...qu'Abimola ne nous a pas rendu nos affaires.

Quatre jours...

...que vous êtes piégés.

Je casse un comprimé en petit morceau et en pose un sur ma langue, il fond presqu'immédiatement et au bout de quelques secondes la morphine à l'intérieur fait son effet, je ne sens plus rien.

J'observe Yemaya d'un œil distrait. Sa poitrine se soulève doucement au rythme de sa respiration et on pourrait la croire paisible, s'il n'y avait pas, sur sa tête, un appareil programmé pour qu'elle dorme bien.

Elle ne sait rien.

Quatre jours que je lui cache la situation en espérant trouver une issue.

tu n'as pas le courage de l'affronter.

J'effleure des doigts l'O.R.F.E que je tiens entre les mains avant de le poser et de sortir de la chambre.

Dehors, le soleil a fini sa course et avec lui une grande partie de la population de femme qui jonche les rues d'habitude. J'aurais pu apprécier ce calme et cette activité nocturne si elle ne me laissait pas cette sensation amère.

N'est ce pas plus mal si vous restez ?

Je regarde une Nervidienne rire aux éclats en servant du ragoût de pomme de terre à une jeune Afroïde, elle aussi hilare. Je me surprends à sourire.

Est ce vraiment une prison ?

Ici nous sommes en sécurité, nous mangeons à note faim et Yemaya reçoit un traitement. N'est ce pas ce que l'on cherchait en fuyant le district ? un refuge ?

Serait ce si mal de rester ?

— Tu penses à quoi ?

La silhouette frêle de Tara se dégage de l'obscurité et me rejoinds d'un pas léger. Ses grands yeux me fixent un bref instant avant de porter leur attention sur autre chose.

— Tu ne dors pas ?

— Je n'aime pas la matière de l'O.R.F.E

Elle se place près de moi en touchant deux de ses vieilles tresses d'un air absent. J'entends le son de son masque pomper doucement de l'oxygène dans ses poumons. Je l'observe, elle a l'air d'aller bien. Mais c'est difficile à dire avec Tara, elle n'est pas connue pour être très expressive.

— Tu te sens bien toi ici ? j'ose.

— Pourquoi je me sentirais mal ? je mange, je bois, je respire et je tresse.

Je ne peux empêcher de sourire, j'aurais dû m'attendre à une réponse similaire.

— Et toi ?

— Je n'ai pas de raisons d'être mal.

Pourtant l'anneau autour de mon cœur se resserre à chacun des jours qui passent. J'ai l'impression d'abandonner Yemaya en me satisfaisant de ce refuge, comme si je lui enlevait la possibilité d'avoir mieux.

N'est ce pas déjà suffisant ?

— Tu as envie de repartir toi ? pour trouver Alkebulan ?

Tara, le regard dans le vide, prend un moment avant de se tourner vers moi, comme si elle réfléchissait à la meilleure manière de répondre.

Ce qui n'est pas son genre.

— Je ne penses pas que Alkebulan existe, répond t'elle en détachant chacun des syllabes minutieusement.

ALKEBULAN T.1.Le cœur du mondeWhere stories live. Discover now