Duel psychique

Depuis le début
                                    

En même temps, elle contacta Darno Warren :

– J'ai retrouvé sa trace, dit-elle, en soutenant une allure modérée mais constante.
– Vous en êtes sûre ? Mes deux autres agents l'ont perdu.
– Je le sais.
– Je vois où vous êtes. Attendez les renforts, je fais aussi vite que possible.
– Pas question de le laisser s'échapper encore, dit Célia.

Elle raccrocha. En conservant son rythme, elle déboucha sur la place devant l'église orthodoxe, bordée d'érables anciens. Dépassant une série de bancs en bois, elle gagna le parvis aux marches pavées de pierres polies, sous la lumière de hauts lampadaires en fonte qui soudain jaillit devant elle à la faveur de la nuit désormais majoritaire.

Célia était persuadée, à présent, de suivre le bon chemin. Le contact mental, qu'elle avait interprété au début comme une intuition, s'était affirmé à chaque instant. Elle avait été suffisamment proche du télépathe pour reconnaître sa signature psychique. Elle percevait les ondes agressives qui jaillissaient de son cerveau comme des feux de Bengale, ainsi que sa puissance bouillonnante. Si elle le laissait s'échapper, personne d'autre ne le trouverait.

Sur le flanc droit de l'église, sous le regard des gargouilles sans âge, Célia suivit un sentier pavé qui l'amena en arrière du monument. Une volée de marches en pierre semblait l'inviter à les gravir, ce qu'elle fit. Pour se retrouver sur une petite place surélevée, une esplanade, surplombant la ville.

Si seulement Célia avait eu le temps de flâner, elle aurait à coup sûr apprécié cet endroit, qui offrait un vue panoramique non seulement sur les quartiers historiques, leurs ruelles étriquées, leurs passages étroits, et le marché couvert ; mais aussi, plus bas, sur la Mer Noire, dont les flots étaient bercés par la lueur de la lune naissante. Et entre les deux, les lumières clignotantes du parc olympique, dans toute sa démesure.

Mais elle ne leur prêta pas la moindre attention, tous ses sens focalisés sur sa piste. Elle s'engagea sur les pavés de pierre brute, usés par le temps, entre les bancs et les pots de fleurs sèches.

Tout au bout, la silhouette du fugitif l'attendait.


Oleg Volkov avait cessé de courir, lorsqu'il avait compris qu'il ne réussirait pas à semer sa poursuivante. Il avait pu ruser avec les deux agents du CIO, en les envoyant à la poursuite de badauds auxquels il avait donné l'ordre mental de fuir. Cette diversion l'avait conforté dans sa propre supériorité, à ce moment il était convaincu de pouvoir échapper aux recherches.

Sa piste, pourtant, avait été reprise par cette femme, une mentaliste. Pas une médium, ni une psionique comme lui. En un sens, elle avait des capacités mentales plus proches des vampires. Mais supérieures aux leurs. Sa résistance à l'attaque dans le train était caractéristique des vampires, qui ne se laissaient pas facilement déborder mentalement. En revanche, elle possédait la capacité psychique d'agir à distance, ce dont les vampires étaient incapables.

Il existait nombre de créatures étranges et inconnues dans le monde. Peu importait finalement à laquelle elle appartenait, il fallait se débarrasser de cette femme.

Et cela, il savait faire.

Oleg Volkov était un tueur, peut-être depuis son plus jeune âge. Aussi loin qu'il se souvienne, il avait toujours fait du mal aux autres. Au début, il s'exerçait avec des animaux. Les chats étaient ses proies favorites, ils étaient tant à errer, ils ne manquaient à personne. Ensuite, il était passé aux humains.

Ce n'était, pour lui, pas de la cruauté, c'est juste que c'était si facile... Ses parents étaient des expériences ratées, de pseudo-psionistes aux capacités instables, des espèces de junkies bourrés de psychotropes. Lui, il avait été sélectionné depuis sa naissance pour ses capacités. Longtemps, on avait dû lui administrer des tranquillisants pour limiter ses pouvoirs. Jusqu'à ce qu'il soit recruté par le CIO. Alors, il avait pu donner cours à ses pulsions de manière légale.

Milan Lazsco : La Dette [E4 Quadrilogie du vampire] en  coursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant