Le Carillon : Le Talion

Chapitre 20

Ne pas le retrouver le lendemain matin me fit comme un vide, comme si l'essentiel de la journée avait été omis. Cependant, je savais Kush entre de bonnes mains.

Ophelia était à la fois surprise et ravie de ma présence au nid. Elle en profita pour me proposer de m'entraîner à faire du combat avec elle. La différence entre Kush et elle était trop ample, son bâton ne cessa de me couvrir de baiser, au point de sortir du sommeil mon épaule.

-Si tu continues d'être aussi naze, je vais devoir te prendre comme binôme au prochain carillon à la place du Roit, me taquina-t-elle.

Je la contrais après avoir refusé à son bâton d'atteindre ma mandibule. Elle manqua le relâcher, touché à l'avant-bras.

-Tu disais, lâchai-je, avec un air altier.

-Hmm... fit-elle, enchantée de retrouver en moi un adversaire d'elle.

Ophelia se fichait d'être la meilleure. Ce qu'elle voulait, c'était que nous le soyons tous. Que le nid le soit.

-Ophé !

Je tournai la tête, comme si ce prénom était aussi le mien. Nous suivîmes le regard de Shaheen jusqu'à comprendre la raison du déplaisir dans son appel et sur ses traits du visage. Un homme se tenait l'orée du périmètre du nid. À la vue de Palmer, l'émissaire casoar, nos visages se rembrunirent.

-Je vais aller accueillir ce fumier, se proposa Bogdan, poings serrés.

-Non, le retint Ophelia, lui préférant notre émissaire, moins adepte de la palabre mutant trop facilement en pugilat, Kyle, vas-y !

Ce dernier, qui s'entraînait jusqu'alors avec sa petite-amie, alla à la rencontre du visiteur. Émissaire depuis déjà plusieurs cars, il savait ce qu'il avait à faire.

L'échange fut bref. Kyle nous annonça :

-Il a une requête.

Nos yeux, excepté ceux de Sarasa qui manquait à l'appel, étaient posés sur notre décideuse, patientant sa réponse. Elle joignit finalement ses phalanges pour lui faire signe d'approcher.

À cinq mètres de nous, elle l'arrêta. Quelques pas de plus et nous aurions été contraints d'humer l'odeur emplie de perfidie de ce Casoar.

Nous nous regroupâmes derrière notre décideuse. Kyle, lui, resta à côté de son homologue.

-Ophelia, salua Palmer, avec une amabilité outrancière et hypocrite.

-Casoar, lui retourna-t-elle, avec acrimonie.

Palmer leva une main pour faire de même avec nous autres.

-Les enfants.

Bogdan faillit lui bondir dessus. Shaheen avait stoppé son dessein, ne sachant d'ailleurs pas très bien pourquoi, étant donné que, lui aussi, semblait crever d'envie de lui fracturer les vertèbres.

-Redis « enfant » encore une fois, l'ancêtre, et récupérer la prochaine Caissub te servira à rien tellement tes dents te feront mal ! menaça le Polonais.

-Justement, c'est pour ça que je suis là, ne tourna pas autour du pot Palmer.

-Sans blague, commenta Ophelia, tu veux quoi ?

-Vous faire une proposition qui arrangerait nos deux nids et mettraient fin à notre querelle puérile. Enfin, puérile pour nous, dit-il, sans voiler sa condescendance.

Les Casoars aimaient à nous le rappeler, que nous n'étions pas leur équivalent, pas des adultes. Nous n'étions que des mômes, frêles, vulnérables et même ganaches. Eux, notre antithèse, forts, clairvoyants et méritants. Ils avaient la faveur de la vie. Elle les avait choisis eux, plus que nous. Mieux valait de ce fait leur remettre la Caissub sur-le-champ.