CHAPITRE IV

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Octobre 2023



Aujourd'hui, c'est plus difficile que d'habitude. Je ne sais pas exactement pourquoi, mais la nuit m'a semblé longue. Chaque minute s'étirait à l'infini et la pluie n'a jamais cessé. Déjà quelques jours qu'Angel me colle aux fesses, mais je n'y fais plus vraiment attention. J'attends simplement cet après-midi afin de téléphoner à la prison, et j'aurais le verdict ; vais-je voir Donnie jeudi, oui ou non ?

- Thai, tu t'occupes de la trois?

J'acquiesce et prends la commande des deux jeunes filles que j'ai déjà très souvent remarquées ici. L'une d'elle glousse à mon arrivée ;

- Votre petit-ami ne vient pas, aujourd'hui ?

L'étonnement se lit sur mon visage, mais je tente de masquer un sourire. Comme je l'ai déjà dit, Donnie faisait des ravages lorsqu'il venait ici.

- Non, réponds-je. Il est... en voyage d'affaires.

La brunette ne dit rien, mais je devine à sa moue qu'elle est un brin déçue. Si elle savait à quel point je le suis, moi aussi. Et surtout, si elle savait à quoi ressemblait son ''voyage d'affaires'', j'imagine que ça la rendrait encore plus fébrile. Les gangsters ont toujours été attirants, j'imagine que les adolescentes en rêvent généralement. Mais lorsqu'on est en plein dedans, je peux assurer que tout ça n'a rien d'une balade de santé, que du contraire ! Aimer un homme qui trempe dans de sales histoires, ça a son lot de stress et de tristesse pour ceux qui restent.

C'est vrai, merde ! Ce sont toujours ceux qui restent qui trinquent.

Eva remarque très vite que je n'ai pas la tête à bosser, ni même à être aussi souriant que d'habitude. Je sens dans son attitude que ça l'énerve, pas moi, mais ce que Donnie me fait subir. Plusieurs fois, elle m'a prévenu, mais je n'ai jamais voulu l'écouter. Elle me disait de faire attention, que son argent ne devait pas être si blanc que ça et qu'il avait une tête de truand. Mais moi, aveuglé par mes sentiments, je n'y ai jamais cru. De toute façon, ça ne change rien, peu importe ce qu'il a fait, je l'aime à en mourir. Je ferais pour lui des choses que je ne ferais même pas pour moi.

- Tiens, tiens, soupire-t-elle, voilà Pablo Escobar.

Sans même relever les yeux, je sais exactement ce qu'elle veut dire. Le carillon accroché à la porte retentit et je sens qu'Angel vient d'entrer. Il s'approche du bar, bomber noire sur le dos et bonnet sur la tête. Les adolescentes de la table trois ne cachent pas leur excitation et même d'ici, je peux voir leurs joues rougirent.

- C'est à quelle heure, ta pause?

- Maintenant, intervient Eva avant que je ne puisse répondre. Je prendrai la mienne plus tard.

Je fronce les sourcils, mais elle se penche contre mon oreille ;

- Tu en as plus besoin que moi, chuchote-t-elle.

- Merci, soufflé-je.

Même si je n'ai aucune envie de rester cloîtrer avec Angel, j'enlève mon tablier et contourne le comptoir. Ce dernier adresse un clin d'œil à ma collègue et nous sortons de l'établissement sous les regards choqués des deux jeunes filles.

Le vent frais me fouette le visage et je rentre la tête dans mes épaules, tel une tortue. Merde, j'aurais vraiment du mettre une écharpe. L'automne est bel et bien là, maintenant.

- On va où ? demandé-je.

- Je t'emmène déjeuner, on fête quelque chose.

Sans broncher, je le suis jusqu'à sa magnifique voiture qui, d'un autre côté, me dégoûte pas mal. Qu'a-t-il fait de si horrible pour se payer cette caisse ? Être assis sur ce siège en cuir me donne l'impression d'être, à mon tour, un gangster.

ANGEL || MxMOù les histoires vivent. Découvrez maintenant