Chapitre 5 - Brooke ⛸️

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— Alors, tu aimes ? Tu adorais manger ici lorsque tu étais petite, certifie-t-il.

Il est mignon de se souvenir de notre enfance. Pour ma part, je me rappelle vaguement cet endroit. Nous venions ici avec nos pères après les matchs de baseball que nous disputions. C'était le sport préféré de mon père, d'où la batte à la maison. Nous commandions toujours la même chose : un burger classique avec des frites et un milkshake à la banane. Le goût de cette combinaison d'aliments me ramène inexorablement à cette époque, trop lointaine à mon goût.

J'ai du mal à croire que huit ans se sont déjà écoulés depuis son départ. C'est dingue comment le temps file.

— Oui, c'est très bon, esquissé-je un sourire en regardant la moitié de mon burger dans l'assiette.

Seigneur, j'ai l'impression d'avoir avalé une vache entière alors que je n'ai pris que quelques bouchées !

Vu le sport que j'exerçais jusqu'à il y a encore quelques mois, j'ai toujours fait très attention à mon alimentation. Mon coach surveillait tout ce que je mangeais, et je calculais tout ce que j'avalais, c'était devenu une obsession. Depuis mon arrivée à Oak Ridge, je tente de me défaire de cette sale habitude, mais elle est tenace.

Après tout, je devais être la meilleure. Pour ma mère, la deuxième place n'a jamais été une option. Dès que j'ai débuté le patinage à cinq ans, elle m'a mis en tête que mes petites camarades n'étaient pas des amies, mais des adversaires. Voilà pourquoi je n'ai jamais tissé de liens avec des filles qui pratiquaient le même sport. Elle me poussait à les détester, à les voir comme des rivales.

Ma mère a toujours eu une vision du sport très individualiste, et elle me l'a transmise, au point où j'ai commencé à haïr cette fichue compétition. Au début, j'adorais patiner, apprendre, essayer de nouvelles figures sur la glace, mais le plaisir a toujours été de courte durée, pour se transformer en corvée.

Patiner me manque, la compétition, pas du tout. Je me souviens de ce stress constant auquel j'étais soumise, et en toute honnêteté, je ne veux plus éprouver des sentiments aussi effroyables. La boule au ventre, la haine vis-à-vis de mes concurrentes lorsqu'elles avaient plus de points que moi lors des notations... c'était devenu un enfer duquel je ne voyais aucune issue.

Finalement, cette blessure a été une aubaine. La voilà la vérité.

Est-ce que c'était humiliant ? Vu le scandale sexuel que je traîne derrière moi, oui, mais ça l'aurait été davantage si j'avais continué à m'acharner pour faire plaisir à des gens qui n'en avaient rien à carrer de mon bien-être. Je ne l'ai pas admis sur le moment, et j'ai encore du mal à le faire, mais cette chute – qui a mis fin à ma carrière sportive – m'a sans doute sauvé la vie.

— On ne dirait pas, ricane Tray, en me ramenant à l'instant présent. Tu es sûre que ça va ? Je te sens... ailleurs.

— Oui, bien sûr. Pourquoi ça n'irait pas ? tenté-je de le persuader en lui souriant de toutes mes dents.

Mon cœur se serre, faire semblant est devenu une habitude dans mon quotidien, depuis aussi longtemps que je m'en souvienne.

— À quoi penses-tu ?

— Au patin, soupiré-je, un poil à cran, et n'ayant pas très envie de m'étaler à ce sujet.

— Ça te manque ?

Je fixe mes frites, certaines imbibées de ketchup et moutarde.

Le plaisir de glisser sur la glace, de me défouler en improvisant des chorégraphies au son d'une musique en particulier... oui. Le reste, non. Pas du tout même.

Oak Ridge Campus #1 King ©Donde viven las historias. Descúbrelo ahora