À contre courant 🥀

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- C'est moi, ça se voit non ? Je le défie de dire autre chose que la vérité.

- Mec, ce n'est pas toi ça. Il est trop beau sur la feuille pour te ressembler.

Lui, je vais le tuer. Si je le croise quelque part, je l'enterre dans un amas de poubelles ! Enfin, quand j'aurai pris du muscle en plus et peut-être bien dix centimètres. Ce type est géant, il ferait presque peur, mais il ressemble beaucoup à Léa, il y a la fibre parentale entre eux, ils ne peuvent pas se renier. Mais en attendant, il m'a bien agacé, le géant vert, et je laisse tomber le dessin. Je sais qu'il est jaloux, c'est tout.

- Il est beau ton arbre, tu vas être une grande artiste plus tard !

Il se drogue ? Il est clairement question que cet arbre ne ressemble absolument pas à un arbre, mais à un nuage. Vert soit, mais un nuage.

Dans le reflet de mon téléphone, je me compare finalement à mon dessin. Je ne vois absolument pas ce qui ne va pas dans ce dessin. Je reste catégorique, c'est un beau dessin.

Léa est souvent seule quand je viens, alors nous avons fait ami-ami avec cette petite sorcière, mais elle répète toujours que son frère est le plus beau, je viens en seconde place, il faut bien comprendre, je déteste la seconde place, je suis toujours premier, et il n'est pas si exceptionnel son frère, je fais chavirer les cœurs, des plus vieilles dames aux enfants les plus jeunes, j'en ai beaucoup d'admiratrices, il faut compter le nombre de nanas qui me suivent sur mes réseaux sociaux, et le nombre incalculable de messages que je reçois sous mes photos.

Elle n'y connait rien, c'est tout. Il faut regarder son dessin, ça se voit directement.

- Encore merci Peter d'être venu, les enfants attendent ça depuis des jours, je regarde l'infirmière qui me gratifie d'un sourire aimable, tu reviens quand maintenant ?

- Ce weekend, car ma grand-mère sera de sortie, elle va en amoureuse avec son Henri chéri à la plage, alors je passerai pour passer le temps. Mais je pense vers le matin, parce que je dois ensuite aller à la maison de retraite.

- C'est bien ce que tu fais, Peter, tu es un bon garçon.

- Bien-sûr que je le suis, mais j'aime bien faire ça, alors ce n'est même pas épuisant et j'ai plein d'histoires à raconter à ma grand-mère au passage, elle aime bien.

Aneth me remercie encore et va rejoindre le petit groupe qui se chamaille pour une espèce de poupée qui ne ressemble à rien.
J'attends donc comme ça pendant un moment, alternant entre des lectures courtes ou même inexistantes avec des livres d'images et des marionnettes dinosaures.

C'est plutôt amusant d'être ici, les gamins, je ne dirais pas qu'ils sont forts ou incroyables, car ils se comportent comme de vrais gamins de tous les jours, entre les crises de colère, les pleurs, les rires, et c'est tout un monde entre eux.

Ce que je trouve incroyable, c'est la vie ici, comme à la maison de retraite, la mort rôde, elle est là, mais on l'oublie. C'est comme si elle n'existait pas, et que demain sera toujours là, alors que je le vois, de ma chaise, que certains ne passeront pas l'année, et ne seront jamais adolescents, ne vivront pas une vie d'adulte, ne construirons pas de famille et qu'ils laisseront des parents, des frères et sœurs ainsi que des amis avec un vide dans leurs vies.

Je suis déprimant, c'est déprimant, ça me déprime, toute cette mort autour de moi, mais je sais que j'apporte un peu de bonheur et des sourires quand j'arrive, au moins, ils ne sont pas tristes, c'est tellement plus agréable que des gens qui se plaignent pour rien, des petits tracas de la vie, ici, ça n'existe pas.

Dans mon observation de la pièce, car j'ai l'impression d'être invisible et je ne supporte pas ça, je m'approche des enfants, ils sont excités et ils parlent beaucoup, dans la fenêtre le reflet de géant vert me scrute avec un air étrange, je ne vais bien-sûr pas m'écraser, et le fixe de mon côté, il doit avoir un sérieux souci ce gars à regarder les gens comme ça. Ça me fait penser, je n'ai pas regardé ses mains, j'aime beaucoup cette partie du corps, elles disent beaucoup de choses des gens, si elles sont soignées, rugueuses, calleuses, ou encore abîmées, ridées, les ongles propres ou non, il ne faut pas croire, mais beaucoup de personnes ont les ongles sales et pas entretenues. Je déteste les gens qui se rongent les ongles, c'est crade et ça les abîme.
Ma grand-mère m'a toujours répété que les ongles ne disparaissent jamais de l'organisme, et qu'elles peuvent faire des dégâts, comme griffer la gorge ou attraper des maladies.

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