06. Najmati

Depuis le début
                                    

Qu'ils brûlent tous en enfer !

Je ne perds pas une minute de plus, et je sors à mon tour. Ma mère derrière moi me hurlait de revenir mais je ne l'écoutais pas. Je courais jusqu'à en perdre haleine et finit par finalement me retrouver là où je me sentais bien.

Jefferson Square Park.

Machinalement je me dirigeais vers notre endroit.

Allongée sur la pelouse j'attendais patiemment qu'il vienne. Je l'avais appelé après cet épisode traumatisant ne sachant pas à qui d'autre le faire. Nous nous retrouvions toujours à cet endroit afin de regarder les étoiles et discuter. La présence de l'autre nous apaisait, et nous faisait oublier notre vie cauchemardesque.

Mes pensées divaguent sur tout et rien. Si je n'avais pas été comme je suis, le monde m'aurait-il accepté ? Si mon père voulait de moi ? Et si ma mère ne me considérait pas comme un fardeau ?

Et si, et encore si, et toujours si..

Les larmes coulaient à flot inondant mes joues. Un raclement de gorge se fit entendre et je me relevai aussitôt. Il est là.

Lorsqu'il comprit mon état, ses yeux s'écarquillèrent et il se rua sur moi.

–Merde, Rosália. Ne pleure pas s'il te plaît, je suis là.

Il me prend dans ses bras, ces même bras dans lesquels je me sens le mieux. Mais surtout ceux auxquels je vais devoir me séparer définitivement. J'étais assise entre ses jambes tandis que ses bras formaient une armure autour de mon corps fébrile. Son dos était posé contre un tronc d'arbre, celui sur lequel nous étions pratiquement tous les soirs.

R + Z.

Nos initiales gravées sur ce même tronc à l'aide d'un couteau suisse qu'il avait ramené le jour où nous avons décidé de faire un pique nique. Le plus beau souvenir de ma vie. Cet endroit nous appartenait, il m'avait aidé à créer un monde dans lequel je me sentais comprise et bien.

Je l'aime. J'étais amoureuse de lui.

Mais l'était-il ? Impossible.

Après lui avoir raconté dans les détails ma soirée, nous restions dans le silence un moment, mes doigts jouaient avec ses mains tandis que lui me laissait des baisés sur le dessus de mon crâne, me chuchotant des mots doux.

"Tu es forte"

Un baiser.

"Tu es magnifique"

Un autre.

أحبك يا روزالي (je t'aime, Rosália)

Un dernier.

Je ne comprenais pas sa langue mais je la trouvais tellement belle. Je lui demandais souvent de la parler, j'aimais sa prononciation et j'aimais l'écouter. Elle résonnait comme une mélodie, et son écriture était encore plus élégante.

La forme de leur police était si complexe mais en même temps si raffinée. Je pourrais l'écouter parler sa langue natale pendant des heures et le regarder l'écrire aussi. L'entendre parler de sa famille ainsi que ses traditions, tout m'intéresse. Il faisait de même avec moi et nous nous faisions voyager à travers nos histoires et nos cultures.

Mais il était l'heure pour moi de mettre fin à ce tour du monde, et partir pour une toute autre vie. Si je voulais avancer je ne pouvais pas rester dans cette ville où mon passé et mon présent bien trop douloureux se mélangeaient.

REVENGE MEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant