- «  Adrik, je suis désolée mais je ne veux pas parler ce soir. Lui dis-je la voix brisée. S'il te plait, je veux juste rentrer chez moi... » j'ajoutais.

Cet homme que je ne sais plus comment considérer soupira légèrement et se résigna.

Je partis prendre mon sac et ma veste puis Adrik ouvrit la porte et nous sortîmes du grand appartement.

Le trajet était silencieux alors que nous roulions en pleine nuit dans les rues entre Korolev et la banlieue pauvre de Moscou.

Aucun de nous deux n'échangea un mot mais je sentais qu'Adrik voulait le faire.

Son regard était fixe sur la route et sa pomme d'Adam ressortait d'avantage qu'habituellement. Ses yeux étaient recouverts d'une couche brillante et on aurait dit qu'il se retenait de pleurer.

De mon coté, j'ai laissé tomber l'option de me retenir car mes larmes coulent à flots sur mes joues et reflètent les lumières de la ville à chaque fois que la voiture passe sous l'une d'entre elles.

À vrai dire, dans cette voiture froide lorsque je regarde Adrik du coin de l'œil, j'éprouve toujours du désir pour lui. Jeune homme aux traits séduisants et aux mille atouts car, après quelques mois je peux me l'avouer, je suis amoureuse d'Adrik Guseva. Mais j'entends malgré tout cette voix dans ma tête qui me dit de prendre du temps pour réfléchir.

En prenant du recul sur les évènements, je me rends compte que je ne le connais pas si bien que je le pensais. Et c'est ça qui fait le plus mal.

Ce passé dont je n'en avais pas la moindre idée est encore à éclaircir et je pense que la meilleure chose pour nous est de prendre le temps qu'il nous faut.

Maintenant, je veux juste rentrer chez moi, dormir une bonne nuit complète pour mettre mes pensées à plat et, demain, nous nous reverrons et peut être que j'aurais le courage d'écouter sa vérité.

Alors que nous nous approchons de mon quartier qui, honnêtement ne fait pas rêver, des gouttes commencent à s'abattre sur le pare-brise de la voiture et leur fréquence s'accélère.

Trois maisons plus tôt, Adrik serre le frein à main et l'habitacle déjà silencieux depuis le début du trajet prend une ambiance tragique. Le bruit de la pluie qui tombe fortement, mon mascara noir qui a coulé sous mes yeux et la tension entre nous.

Il détache sa ceinture et je sens son regard se poser sur moi. Alors je lève à mon tour les yeux et croise les siens, peu certaine de ce dont à quoi je ressemble avec tout ce maquillage bavant et le contour de mes yeux probablement rouges dû à mes pleurs.

Ses iris émeraudes me scrutent en profondeur comme si il tentait de me parler par télépathie car il comprends que je n'ai pas envie de parler de nous pour l'instant. Son regard me supplie de l'écouter mais je ne peux pas. Je ne me sens pas de parler ce soir ou je risque de craquer à nouveau et je ne pourrais plus m'arrêter cette fois ci.

Ses joues et son nez sont rouges à cause du froid et malgré la situation, ça a de l'effet sur moi.

Ce soir, je n'ai pas envie de lui parler mais mon attirance pour lui n'a pas disparue. L'amour ne disparaît pas d'une seconde à l'autre.

J'aimerai l'embrasser à nouveau, goûter ne serait-ce que quelques secondes à ses lèvres pour tout oublier.

Recommencer de zéro cette soirée. Mais je sais que ça ne peut pas marcher ainsi.

Je ne peux pas passer outre sur les révélations qui ont été faites précédemment.

Adrik se rapproche de moi et, en l'espace de quelques micro-secondes, j'ai l'espoir que sa télépathie à fonctionné et qu'il va m'embrasser, mais non, il s'est juste retourné pour attraper un parapluie sur la banquette arrière et me le tendre.

Il regarde le pare-brise où coule la pluie rapidement et j'accepte l'objet en essayant d'esquisser un petit sourire du coin des lèvres en guise de remerciement.

Je prends mon sac à mes pieds et le coince sous mon manteau pour le protéger de la pluie quand je sortirais.

J'échange un dernier regard silencieux avec Adrik et j'ouvre la portière.

Demain, après une bonne nuit, nous prendrons le temps de parler mais pour l'instant, je cours, parapluie ouvert dans ma rue, les flaques m'éclaboussant les mollets. Je cours pour m'éloigner de mes soucis.

M'éloigner de la vérité qui m'attends.

*

ADRIK

La seconde où Nastasya quitta ma voiture, les larmes que je retenaient depuis tout ce temps décidèrent de faire de même et quittèrent mon corps tel un tsunami.

Je tapais ma tête contre le volant et laissais couler ma tristesse sur les tapis de ma voiture.

Pourquoi suis-je si idiot ? Je lui ai caché une partie de mon passé que certes, j'essayais doublier mais, pourquoi ai-je été si bête ?

Une douleur s'est formée dans ma poitrine et je peine à respirer correctement. 

Est-ce donc ça l'amour ?

Ma douleur est profonde et nouvelle.

Mes larmes ne s'arrêtent pas de déferler le long de mes joues pendant un temps que j'ai arrêté de compter.

A vingt huit ans, j'ai trouvé mon premier vrai amour, et comme un idiot, je l'ai fait fuir...

Et si elle décidait de ne pas revenir demain au cabinet?

Elle n'a passé qu'une journée à son nouveau travail mais peut être que c'était son dernier.

Elle se retrouvera sans travail et tout sera de ma faute.

Ses parents l'exploiteront encore plus et Nastasya sera malheureuse à nouveau.

A cause de moi....

Je me sens si mal que je me demande si je serai capable de reprendre la route ce soir.

Je n'ai jamais connu cette sensation et je pense que j'ai vidé plus d'eau que j'en pensais mon corps capable.

Même lorsque mon père est décédé alors que j'étais encore un enfant, je ne me souviens pas d'avoir pleurer de la sorte.

Tu es nul.

Tu n'es pas capable de garder les gens que tu aimes près de toi.

Tu rends tout le monde malheureux Adrik.

Tu ne sers à rien si ce n'est briser des cœurs.

Mère avait raison...

Submergé par les émotions, ma main dévie rapidement vers la boite à gants de ma voiture dans laquelle se trouve une petite bouteille de rhum.

En quelques secondes le bouchon métallique se retrouve au sol et le liquide ambré glisse dans ma gorge.

Ce rhum pur me brûle la gorge mais je n'y prête pas attention. J'ai juste besoin d'oublier dans quel état pitoyable je suis.

Une, deux, trois gorgées, bouteille entamée...

Quatre, cinq, six, à moitié vidée...

Sept, huit, neuf, tombée à mes pieds...

La secrétaire de Monsieur AdrikWhere stories live. Discover now