CHAPITRE TROIS

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Le jour de mon mariage était pour le lendemain. Je faisais les derniers essayages pour ma robe de marié. J'étais terrifiée, mais je ne montrais rien. Je ne voulais pas affronter la pitié des servantes, je ne supportais pas que le monde me prenne en pitié.

« Tu es forte, princesse Annie. » Me disaient-elles.

Non, je ne le suis pas. Dans mon monde, une femme telle que moi ne pouvais pas être forte. Dans mon monde, une femme telle que moi devais se tenir, et être une bonne épouse.

J'avais réussi à m'éclipser pour aller dans la cours. Je marchais lentement, observant les diverses plantes qui poussaient. Il y avait beaucoup d'Achillée millefeuille. C'était une plante comestible, et elle était utilisée couramment de l'art de guérir. Il y avait également énormément de Lin raide. Cette plante avait une tige étroite et érigée et portait des feuilles linéaires à extrémité effilée. D'une hauteur qui variait entre un et huit (1), elle avait des petites fleurs jaunes qui étaient groupées en cymes.

« Tu aimes les fleurs, conteuse d'histoire ? » Retentis la voix d'un garçon.

Je sursautai en entendant et en reconnaissant cette voix : c'était celle du prince Nicias de Sparte. J'eus instantanément le réflexe de camoufler mon visage à l'aide du foulard que j'avais sur les cheveux. Je me mis dos à lui pour être certaine qu'il ne voit pas mon visage : si mon père arrivait à ce moment précis, il allait me tuer.

« Je... Oui... »

Je me maudis de l'intérieur pour ne pas être capable de répondre correctement à une simple question. Je fronçai soudain les sourcils :

« Comment m'as-tu appelé ? »

« Conteuse d'histoire. »

« Pourquoi ? » Demandais-je, fronçant davantage les sourcils.

« Il parait qu'hier, tu as réussi à réunir une dizaine de serviteurs rien qu'avec ta voix et tes histoires sur Bellérophon et la Création du Monde. »

Je ne répondis pas, légèrement gêné par la situation. Je n'étais pas une conteuse d'histoire, juste une fille qui aimait faire rêver ses petits frères en leur racontant les exploits du passé.

« Tu n'aurais pas une histoire à me raconter ? »

« Que veux-tu que je te raconte, prince Nicias ? Tu dois déjà tout connaître. »

« Je ne connais pas réellement l'histoire de ta famille. Je sais que vous descendez de Jason et de Bellérophon, mais c'est tout. Alors que les gens connaissent presque toute l'histoire de la famille de Sparte. »

Il était vrai que je connaissais, dans les grandes lignes, l'histoire de la famille de Sparte. C'était une grande famille très compliquée. Tout s'était compliqué avec l'arrivée des Atrides.

« Tu descends directement de Hélène de Troie, car Hermione, fille d'Hélène et de Ménélas, s'est marié avec son cousin Oreste, fils de Clytemnestre et d'Agamemnon. » Dis-je, me tournant légèrement vers lui.

« Et donc, qui sont Jason et Bellérophon pour toi ? »

« Pour mon père, ils sont nos grands-pères ou nos arrièrs-grands-pères, j'imagine. Mais pour moi, ils ne sont rien. Leurs sangs ne coulent pas dans le mien. Mais le sang de Chariton, fils de Glaucé et Eurymède, frère de Bellérophon et Deliadès, coule dans le mien. »

« Je comprends mieux. Ton père est là parce que Bellérophon a tué un homme. »

« Oui. Mais mon père nous dit que ça ne s'est jamais passé. Il dit que les esprits de Jason et Bellérophon lui parlent la nuit. Personnellement, je pense juste qu'il est fou. »

Chroniques des Mythes Oubliés Tome 1 : La Fille des GuerriersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant