3. Le nouveau monde 🗝

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Clouds - Before you Exit
Dandelions - Ruth B.


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Le milieu de l'océan se mélange souvent avec l'horizon dans un espace de pureté, au moment même où le ciel et la terre se confondent, au moment même où l'on est en son centre et que l'on observe l'immensité autour de soi, si l'on tourne à 180 degrés sur soi-même et que l'on embrasse l'air, les bras grand ouverts.

Si l'océan et la mer avaient une émotion, ce serait sûrement celle de la sérénité. Cette émotion qui faisait partie de la "joie" dans la roue des émotions que Taetae avait appris à décoder. [les principales émotions sont la peur, la tristesse, la surprise, le dégoût, la joie et la colère]

L'océan se mêle aussi aux odeurs. Elles sont faites d'émanations volatiles, captées par notre appareil olfactif. C'est ce qu'on ressent souvent lorsqu'on est au centre de l'océan et du monde. Et puis à un moment donné, on finit par se rapprocher de la terre, et le contraste entre l'air marin et les effluences de la terre est très marqué. Cependant l'odeur la plus spéciale reste certainement celle, envoûtante, de la terre humide à l'approche de la côte au lever du soleil, à l'aurore, quand le vent vient du littoral. Après une longue période en mer, les premières minutes de ce mélange riche de végétation, de terre, d'embruns sont quelque peu troublantes.

Si l'on se concentrait bien, le silence était d'or dans ce bleu turquoise alentour. Ce bleu mêlé d'or se mélangeant dans un orangé divin, à la lueur du jour se levant au petit matin, devant des yeux émerveillés.

Et pourtant,

le bruit était là,

dans ce silence.

Le moteur du bateau, la proue déferlant dans les vagues se fracassant sur sa tôle, le chant des mouettes et les chuchotements des voyageurs admiratifs.

Le silence n'était donc pas forcément d'or dans cette immensité et les profondeurs, dans lesquelles finalement nous n'étions jamais seuls, pensa Jungkook. Les poissons, les coraux, le plancton n'étaient-ils pas les premiers habitants des abysses? On ne connaissait d'ailleurs qu'une part infime de la vie océanique, les fonds abyssaux abritant des espèces aux formes inconnues, habituées au noir complet, un drôle de peuple qui effectuait un voyage vers la surface, comme le faisait le plancton végétal.

Mais les humains n'étaient jamais dans le noir complet, comme ces espèces des profondeurs marines à la bioluminescence si particulière. En apparence, les humains pouvaient l'être, lorsqu'aucune lumière autour ne venait les faire briller. Et pourtant, il y avait toujours cette étincelle à l'intérieur de soi qui ne demandait qu'à scintiller.

Quelquefois on la cherchait, parce qu'on avait peur qu'elle s'éteigne, parce qu'il y avait des moments si durs dans la vie qu'on aimerait juste que le noir de nos yeux se confonde avec le noir intérieur de notre âme, et que plus rien n'insuffle même une goutte de cet afflux sanguin qui fait vivre et alimente notre cœur.

Le noir des abysses n'était donc pas si terrifiant, se disait Jungkook en regardant l'horizon et la terre ferme qu'il voyait au loin, et que bientôt il foulerait de ses pieds.

Il y avait toujours de la vie, cette étincelle qui ne demandait qu'à illuminer les fonds marins,

ainsi que son âme.

C'est tout ce à quoi il pensait, accoudé au ponton du ferry, ses deux aînés à ses côtés et Ji-An accrochée à lui dans son porte-bébé face à la mer.

Dans ce silence mugissant et odorant.

Au loin, Jeju et ses nouvelles sensations. Derrière eux, leur ancienne vie.

You are my Lie {Jikook}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant