Chapitre 7 - 22 !

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— Oh bon sang, gémit Rodrigo, ils ont envoyé de vrais flics, pas des bots !

— Lilia, conseilla Gaétan, laisse nous parler.

Arrivés à leur niveau, les policiers les saluèrent brièvement et se présentèrent comme officiers Blanchard et Coret. Aucun d'eux n'avait de masque ni n'était accompagné de robot volant. Coret, un homme aux petits yeux gris et au tatouage de dauphin sur l'avant-bras, sortit un écran plié en quatre de son uniforme. Il le déplia pour former une surface d'une trentaine de centimètres de long. Son comparse — qui arborait une moustache particulièrement fournie et du rouge à lèvres mauve — dégaina un boîtier ressemblant à un taser. Il agita l'appareil devant le visage de Lilia devenu rouge d'appréhension. Une lumière quadrillée l'éblouit avant de s'évanouir un instant plus tard. Blanchard se pencha par-dessus l'épaule de son collègue et fronça les sourcils.

— Un problème, officiers ? demanda Gaétan.

— Nous avons reçu trois signalements contre votre amie, annonça-t-il en désignant Lilia, mais les photos transmises n'ont aucune correspondance. Et maintenant, l'analyse morphique ne fournit pas plus de résultats dans notre base de données.

— C'est une amie de la famille, avança Rodrigo, elle vient d'une île du Pacifique, ils sont un peu arriérés en matière de technologie là-bas.

Blanchard frotta le bout de ses moustaches, puis agita son espèce de taser devant le visage des deux hommes.

— Toute personne entrant sur le territoire est inscrite dans le registre du pays... Tiens, tiens... Rodrigo Sanchez, deux cent soixante signalements IRL, quarante-deux révocations, trente-huit stages d'éclaircissement et... deux ans de prison pour avoir tenté de pirater le registre national. Gaétan Cardon... Huit signalements. Exemplaire. C'est louche. Vous allez nous suivre, tous les trois.

Lilia jeta un regard paniqué vers Rodrigo qui se contenta de hausser les épaules.

— De toute façon, tout ça n'existera bientôt plus.

Les policiers se tendirent, pensant à une menace. Ils les menottèrent tous les trois sans ménagement — non sans les avoir prévenus en avance qu'un contact physique serait inévitable — et les embarquèrent dans leur voiture. L'anxiété de Lilia avait fait place à une humeur plus placide, les derniers mots de Rodrigo résonnant dans sa tête. Bientôt, elle serait de retour dans son époque et ce futur aurait disparu. Elle pouvait insulter les policiers, se mettre nue, danser la macarena : tout ceci n'aurait aucune importance ni conséquence.

— J'aurais préféré que ces dernières heures de voyage se passent différemment, chuchota Gaétan à côté d'elle. Je voulais t'amener faire un tour à la Cité des sciences alternatives, mais en fin de compte, tu as la meilleure expérience possible.

Sur la banquette d'en face, les policiers surveillaient leurs moindres faits et gestes pendant que le véhicule suivait la route programmée dans son logiciel. Moins de dix minutes plus tard, ils furent escortés à l'intérieur d'un immeuble aux vitres fumées et conduits dans une pièce sans fenêtre.

Depuis qu'elle avait pris conscience que rien n'avait d'importance, les épaules de Lilia s'étaient relâchées et elle observait son entourage avec désinvolture. Elle entendit Blanchard demander à un de ses collègues un donut sans gluten avant de refermer la porte derrière lui.

— Alors, commença l'officier Coret, vous pouvez nous expliquer pourquoi vous n'apparaissez pas dans le système. Vous êtes ici clandestinement ?

— En quelque sorte, osa Lilia. Et eux, ce sont mes passeurs.

Elle se sentit jubiler, comme une adolescente rebelle. Jusqu'alors, elle avait toujours respecté l'autorité. La seule fois où elle avait été interpellée, elle avait quatorze ans et venait de voler un album de Nickelback dans un magasin. Finalement, le pire n'avait pas été les remontrances des policiers, mais le regard déçu de son grand frère, fan du rock des années soixante, quand il avait vu l'objet de ses méfaits.

Lilia en décon-futur [Nouvelle]Tahanan ng mga kuwento. Tumuklas ngayon