Chapitre 1

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Aux fin fonds de l'épaisse forêt vierge, alors que le voile de la nuit s'abattait sur l'horizon lointain, un homme encapuchonné était aux prises avec un shamu. L'ignoble créature mauve à deux têtes tentait vainement d'atteindre son cou pour le tuer, mais l'humain s'avérait plus agile que ses proies habituelles. Il faisait presque la même taille que le monstre et son corps, dissimulé sous des vêtements épais, semblait harmonieusement musclé. Il tenait fermement dans sa main droite, un impressionnant couperet partiellement rouillé mais à la lame parfaitement aiguisée. La bête n'en avait cure. La seule chose qui lui importait était d'enfin immobiliser cet appétissant dîner.

L'homme en face était loin d'être stupide. Il n'y avait qu'une seule façon de se débarrasser de son prédateur sans magie. Et ce monstre ayant deux têtes, le vaincre s'avérait encore plus compliqué. Il ne se laissa cependant pas intimidé et esquiva d'un pas léger la mâchoire qui frôla sa gorge. Il profita de cette opportunité pour prendre appuis sur la tête de la créature et sauter jusque sur son dos. La deuxième face monstrueuse eût à peine le temps de se retourner que la lame rouillée traversa son long cou comme s'il s'agissait d'une motte de beurre. L'autre poussa un cri de rage et de douleur. Malgré l'absence de l'un des cerveaux, le corps se rua avec colère dans l'espoir de faire tomber sa proie. Mais l'homme s'agrippa fermement à une oreille. Lorsque son arme décapita la tête restante, il chuta avec le corps encore remuant et roula sur quelques mètres. Il dû tout de même éviter une des quatre pattes griffues, que les nerfs continuaient de balancer malgré la mort indéniable de la bête.

L'homme se releva en grognant et épousseta ses vêtements pourtant déjà crasseux et déchirés depuis longtemps. Il posa sa main droite sur son épaule gauche pour s'étirer. Cette bête ne lui avait laissé que peu de répits, mais il aurait au moins de quoi manger pour quelques jours.

« Eh bien, eh bien, ça pour une surprise. »

L'individu se remis aussitôt en garde et regarda partout autour de lui. Personne. Qui avait parlé ?

« Lève la tête, nigaud. »

L'homme obéis et regarda en direction de la cime des arbres.

Perché sur une branche se trouvait un autre homme, encapuchonné lui aussi. Le chasseur ne sut pas quoi dire en le voyant. Les vêtements qu'il portait ne semblaient pas faciliter l'escalade d'un arbre. Une tenue ample, un kimono de l'empire Warene, par-dessus lequel il portait une cape.

Mais ce qui interloqua le plus l'homme au sol, c'était que chaque parcelle de tissus semblait refléter le ciel étoilé. Ou même tout simplement qu'il avait été cousu dans le ciel lui-même. A regarder plus attentivement, les quelques mèches de cheveux dépassant de la capuche semblaient avoir la même particularité. Si la nuit avait été entièrement là, l'étranger aurait parut presque invisible. Sous la capuche, il put cependant voir ses lèvres s'étirer en un sourire.

« Et bien, lança l'homme perché d'un ton moqueur, tu as perdu ta langue ? Est-ce que le shamu te l'a arrachée ?

—Qui êtes-vous ? Parvint à articuler le chasseur.

—Oh ! Il sait parler !

—Qui... ?!

—Inutile de répéter ta question, je ne suis pas sourd. »

L'homme au sol était perplexe. Cet inconnu était clairement un magicien mais son franc parler et la familiarité dont il faisait preuve ne correspondait en rien aux habituelles nobles familles douées de magie.

« Laisse-moi te retourner la question, lança le mage. Je serait curieux de savoir comment un nogicien a pu vaincre aussi aisément une créature aussi rusée et fourbe qu'un Shamu. Sans magie, c'est presque impossible de les vaincre.

C.H.A.R.M.E.Where stories live. Discover now