Chapitre 43

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Axel roula sur le côté en gémissant. Il avait si soif ! Sa gorge était sèche, il avait l'impression que sa langue avait doublé de volume et la soif avait pris le pas sur la faim qui lui tordait les entrailles.

Il aurait tué pour un verre d'eau. Parfois, il essayait de réfléchir aux motivations de Solarys, mais ses envies d'eau coupaient systématiquement court à toutes ses réflexions.

Il avait même été jusqu'à lécher les murs frais, espérant récupérer un peu d'humidité. En vain.

Il avait froid, n'arrivait plus à se concentrer suffisamment pour générer ses flammes. Il aurait été prêt à boire son urine, dans son désespoir, mais le précieux liquide avait été comme absorbé par le sol. Axel se souvenait d'être répandu en imprécations. Maudit Solarys !

Un grincement lui fit lever la tête. La grille... elle s'ouvrait ?

—Eh bien... en quel état tu es, mon garçon !

Solarys. Axel ferma les yeux. Ce n'était donc pas un cauchemar.

—Tiens. Voilà un verre d'eau pour toi.

Oubliant toute autre considération, Axel se précipita vers le gobelet salvateur. Les mains tremblantes, il s'obligea à avaler à petites gorgées, refusant de gâcher la moindre goutte. Le verre se vida bien trop vite. Il avait encore soif.

—Encore, croassa-t-il.

Solarys sourit.

—Deviendrais-tu raisonnable ?

Et il posa un deuxième gobelet de bois sur le sol. Cette fois, Axel le vida d'un trait, revigoré par la fraicheur qui coulait dans sa gorge.

—Maintenant, reprit Solarys, tu vas faire quelque chose pour moi.

—Jamais, dit Axel, mais même lui trouvait que sa voix manquait de conviction.

—Tu vas le faire ou ta bestiole va mourir.

Axel se glaça. Si Telclet mourait, il mourrait aussi. C'était toute la force du lien qui les unissait.

Réveille-toi, Telclet ! envoya-t-il avec toute la force qu'il put réunir. Réveille-toi et mords-le !

Mais le serpent des vents resta silencieux, plongé dans le lourd sommeil de l'hibernation, et malgré la douceur de sa présence dans son esprit, Axel se sentit désespérément seul.

Il déglutit, puis demanda à contrecœur :

—Qu'est-ce que vous voulez que je fasse ?

L'air satisfait de Solarys le rendit malade.

—D'abord, tu vas jurer de ne pas libérer ton serpent. Ensuite, tu vas jurer de ne pas t'échapper... non, de m'obéir.

—Pourquoi faites-vous ça ? demanda Axel, sonné.

—Parce que je veux ton pouvoir. Alors ?

Fébrile, Axel considéra ses options. Il avait soif. Il avait faim. Nicoleï ne savait pas où il était. S'il refusait... s'il refusait, Solarys tuerait Telclet.

Axel plissa les yeux. S'il tuait Telclet, et Axel, de fait, Solarys n'obtiendrait jamais ce pouvoir qu'il convoitait tant.

Axel s'en serait débarrassé avec plaisir pour sauver son Compagnon. Tout ce qu'il souhaitait, c'était le libérer de Solarys.

—Je vous obéirai, céda Axel.

Tant que je n'aurai pas d'autre choix, ajouta-t-il pour lui-même.

Un profond dégoût l'envahit et il frissonna.

—Je ne libèrerai pas Telclet, poursuivit Axel.

Eraïm, faites qu'il se réveille et se sauve lui-même...

—Excellent, sourit Solarys. Reste là.

Et la porte s'ouvrit.

Axel serra les poings, furieux contre lui-même. Un serment prêté sous la contrainte n'avait aucune valeur, même s'il était connu qu'un Massilien ne trahirait jamais sa parole. Solarys le savait-il ?

S'il avait pensé être plus rapide que Solarys, il l'aurait tué là, tout de suite. Mais il se méfiait. Solarys avait toujours un coup d'avance.

—Tu vas commencer par me débarrasser de ton copain Mecer.

Axel ravala sa salive. Nicoleï. Réussirait-il à lui faire comprendre qu'il devait fuir ? Solarys n'avait pas explicitement dit qu'il devait le tuer. Mieux valait jouer sur les détails auxquels il n'avait pas encore pensé. Il hocha la tête, s'efforça de paraitre résigné.

Par Eraïm, comment allait-il se sortir de là ?

D'abord, trouver Telclet, songea Axel en emboitant le pas à Solarys. Les couloirs s'enchainaient, labyrinthiques, et malgré ses efforts pour se repérer, Axel se trouva bientôt désorienté. Perdu. Machinalement, il porta la main à son front. Il avait chaud, maintenant. Un long frisson descendit le long de son échine. De temps à autre, Solarys se retournait, avec un demi-sourire qui ne faisait que l'angoisser davantage. Pourquoi ne l'attaquait-il pas, d'ailleurs, avant de l'obliger à lui dire où se trouvait son Compagnon ?

—Tu ne me feras pas de mal, dit doucement Solarys.

Et Axel se retrouva incapable de chercher à poser la main sur son épée.

—Tu croyais vraiment que je t'exposerai mon dos sans prendre mes précautions ? se moqua Solarys.

Axel grimaça. Il s'était encore fait piéger. Ce devait être l'eau. Il avait dû y mettre quelque chose. Un sentiment glacé le saisit. De l'amphigor ? Non, ses souvenirs étaient intacts. Existait-il une plante qui oblige ainsi à obéir ?

Car il l'avait clairement senti. Quand il avait prononcé les mots que Solarys avait exigés, quelque chose s'était noué en lui.

On disait que les Massiliens tenaient toujours leur parole ; s'il était vrai qu'ils ne pouvaient mentir, seul leur honneur les engageait sur leurs promesses. Alors que là, il avait été physiquement empêché de tenter quoi que ce soit contre Solarys.

Axel frissonna.

Il aurait donné cher pour connaitre les secrets de Solarys.


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