Chapitre 41

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Axel s'éveilla en gémissant, le corps perclus de douleur, une masse lancinante derrière les yeux. Il passa la main sur l'arrière de sa tête, y découvrit une bosse de la taille d'un œuf de pigeon. Les souvenirs revinrent d'un coup : la grotte, le coup qui l'avait assommé. Axel s'assit en se frottant la nuque, la gorge sèche. Combien de temps était-il resté inconscient, pour avoir aussi soif ?

Sa main se porta sur son ventre en un geste instinctif, et il se pétrifia. Sa besace avait disparu. Telclet. On lui avait pris Telclet. Axel déglutit, tâtonna autour de lui. Tout était sombre. S'était-il bêtement cogné ? Si oui, son sac ne devrait pas être loin. Une chose était certaine, Telclet était en vie, parce que dans le cas contraire, il serait déjà mort.

Le sol était froid, inégal, poussiéreux. Où était-il ? Toujours dans la grotte ? Ses perceptions lui disaient que oui, mais il ne se souvenait pas qu'elle ait été aussi sombre. Il ne voyait rien. Axel fit naitre une flamme dans le creux de sa main, plissa les yeux. Oui, ça ressemblait bien à une grotte. Il se traina vers un mur tout proche, prit appui pour se remettre sur pieds et ferma les yeux un instant alors qu'il était pris de vertiges. Du bras, il balaya les alentours. Impossible de voir le reste, la pièce devait donc être assez grande. Gardant une main sur le mur, il le longea, cherchant une sortie. Le terrain montait légèrement, ce qui lui donna espoir. Son estomac gronda et il réalisa qu'il avait faim. La nuit était peut-être tombée...

Quelle idée de s'être bêtement étalé dans la grotte. Et où donc avait bien pu rouler sa sacoche ? Il balaya de nouveau les alentours de la main, espérant éclairer davantage le sol. En vain. Il continua d'avancer, dans la direction d'un léger souffle d'air qui indiquait l'entrée – ou la sortie, question de point de vue – de la grotte. Sur la paroi inégale, il discerna bientôt quelque chose. Axel accéléra, subitement inquiet, jura en découvrant l'ouverture. Un rectangle, soigneusement découpé dans la roche. Une fenêtre, grillagée de lourdes barres de fer.

Son sang se glaça dans ses veines et toutes ses plumes se hérissèrent. Soit il s'était enfoncé bien plus qu'il ne le croyait dans la grotte, soit ce n'était pas la même grotte. Axel poursuivit son exploration, commença à comprendre qu'il tournait en rond, revint à la même fenêtre. Perdu, il regarda sur le sol, puis au plafond, à la recherche d'une trappe, d'une ouverture. Rien.

L'endroit était parfaitement clos, presque circulaire, simplement percé d'une unique fenêtre.

Par Eraïm, comment s'était-il retrouvé là ? Sa besace – et Telclet par extension – se trouvait aux abonnés absents. Axel se rapprocha de la fenêtre. L'espace entre les barreaux était juste suffisant pour qu'il y passe son bras.

Même ainsi, il ne distinguait rien à l'extérieur. Axel refit un tour de la cellule – il ne voyait pas pourquoi l'appeler autrement, accélérant inconsciemment. Un autre, dans l'autre sens, puis encore un autre... Il s'arrêta à cinq, haletant, se laissa tomber au sol en éteignant sa flamme.

Il ne comprenait pas.

Tout cela n'avait aucun sens.

Le temps s'écoula, sans qu'il ne parvienne à le mesurer autrement que par sa soif qui augmentait. Axel rumina ses options. Il n'avait aucune autre alternative que celle d'attendre son geôlier et saisir l'occasion de s'enfuir. Pourquoi lui avait-on laissé son épée et pris Telclet ?

Parce qu'il ne partirait pas sans lui, comprit Axel. Il gémit et enfouit sa tête entre ses bras. Abandonner son Compagnon était inenvisageable.

Un bruit faible lui fit dresser l'oreille. Comme des pas. Il se remit sur pieds, généra une flammèche pour éloigner les ombres. Les pas s'arrêtèrent, firent place à des murmures. Puis une portion du mur vacilla, dévoilant une porte grillagée.

Axel résista à la tentation de courir vers cette porte de sortie.

Car de l'autre côté de la grille, il avait reconnu Solarys, un mince sourire aux lèvres. Et, nouée à sa taille, il y avait sa besace.

La gorge d'Axel se serra et ses poings se crispèrent.

—Ah, tu es enfin réveillé. Je commençais à croire que j'avais mal dosé ma force, dit Solarys.

—Rendez-moi mon sac et laissez-moi partir, croassa Axel.

Solarys secoua lentement la tête.

—Oh non, mon garçon. Je crains que tu n'aies pas bien compris la situation. Tu n'es pas en position de donner des ordres. Tu réalises tout ce que j'ai perdu, à cause de toi ?

Glacé, Axel comprit que sa situation n'avait aucune chance de s'améliorer.

Solarys tapota la besace.

—Ton petit serpent est en sécurité, avec moi.

Les yeux pâles se posèrent sur lui et Axel déglutit.

—Pour le moment.

Eraïm me vienne en aide, songea Axel, au comble du désespoir. Il était vaincu avant même d'avoir pu lutter. Que pouvait-il faire ?

—Par précaution, je vais te laisser mariner encore quelques temps. Et quand je reviendrai... tu me supplieras de servir.

—Attendez ! protesta Axel alors même que la grille disparaissait sous son camouflage. Vous ne pouvez pas me laisser ici ! Solarys ! Revenez !

Mais Solarys ne répondit pas.

Axel se retrouva seul, plus inquiet que jamais sur son avenir.


Les Vents du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant