Chapitre 5

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La première nuit que Macao passe dans l'immense demeure où elle restera désormais sa vie entière, Macao dort très mal. Bien que la porte qui sépare sa "niche" de la chambre du jeune Racé soit fermée, savoir le garçon à quelques mètres d'elle l'angoisse. Durant la journée, les moments paisibles sont ceux où elle se retrouve avec les autres bâtards.

Devoir passer la nuit entière en présence de la personne auprès de qui l'erreur n'est pas permise, au contraire, n'est pas très reposant. Pourtant, elle n'a pas à se plaindre de sa chambre privée. Les murs ronds de la tour sont originaux et le mobilier élégant, le lit est agréablement ferme, les coussins et oreillers tous plus nombreux les uns que les autres - le Racé lui a expliqué la différence entre les deux mais elle n'est plus très sûre de ce dont il s'agit.

Et puis il y a autre chose qui la dérange vraiment, en plus de la présence du Racé, c'est le silence. Il n'y a pas un bruit, pas un cri, pas un seul bruit de pas. Pas même un souffle d'air. La nuit, dans la Ville, c'est l'immobilité totale. Les yeux grands ouverts, elle regarde longuement les lumières au bout de la propriété. Devant ces dernières, elle devine des arbres immenses comme il n'en existe pas dans la Périphérie, parfois subrepticement des ombres d'animaux nocturnes. eux non plus, ne mettent pas les pieds hors de la Ville. Dans la Périphérie, il n'y a que des rats et des insectes répugnants, qui transportent quantités de maladies. Mais ça, c'est fini, se dit-elle en fermant les yeux.

Quand son réveil se déclenche, une petite musique montant de l'appareil que Phoebus a réglé pour elle, Macao est déjà réveillée depuis bien longtemps. Le soleil n'est pas encore levé, loin de là, mais elle était bien trop angoissée à l'idée de rater le rappel pour dormir plus longtemps. Elle éteint aussitôt l'horloge électronique et se lève rapidement. Elle récupère les vêtements pliés sur une chaise qu'elle a gardés de la veille et déverrouille la petite porte. Elle sait comment marcher sans un bruit, ce n'est pas une compétence à acquérir pour elle. Cependant, elle se montre tout de même très appliquée à se glisser dans la chambre du Racé sans un frémissement, longeant les murs pour sortir sans le réveiller.

Elle quitte les appartements du garçon et rejoint les quartiers des bâtards dans le sous-sol de la maison. Là, Phoebus et Mimosa sont déjà aux fourneaux. Macao les salue et continue son chemin jusqu'au douches, où déjà deux personnes attendent leur tour. Douce, une des bâtards rencontrés la veille, sourit en voyant Macao.

- On partage la douche ? propose-t-elle

- Ça marche, fait la jeune fille.

Les habitudes ont la vie dure. Bien que l'eau ne soit pas en quantité limitée, tous les employés ont l'habitude de régulièrement partager les temps de bain. Pendant que l'un se mouille, l'autre se savonne, et inversement. Si l'économie d'argent n'est pas une question, il est vrai que c'est, pour les bâtards, un gain de temps bienvenu.

Une fois propres, tous avalent leur petit-déjeuner rapidement. Habituée au manque de ressources de la Périphérie, à peine sa pomme finie, Macao n'a déjà plus faim. Phoebus insiste tout de même pour qu'elle avale au moins une tranche de pain recouverte d'une fine pellicule de beurre. Bien que ce soit peu, la nouvelle recrue savoure les myriades de goûts que la Ville propose à chaque bouchée de chaque repas.

Elle suit ensuite docilement les indications des autres bâtards pour préparer un déjeuner digne du nom des Birmans. Sous l'œil attentif de Phoebus, elle réalise le café de son jeune maître puis tous grimpent les marches de la cuisine pour installer les derniers éléments sur la table à manger. Après quoi ils s'installent le long du mur, dos à celui-ci, de justesse avant que les Racés ne quittent leurs appartements pour commencer leur journée.

Assis à table devant eux, Macao ne peut s'empêcher de remarquer le comportement de son maître par rapport à ses parents. Bien que ces derniers semblent tenter de mener une conversation avec leur fils, celui-ci se contente de réponses fermées et peu intéressées et, dès que Marie entre avec les journaux du jour, il se précipite dessus pour s'y plonger immédiatement, s'isolant définitivement de toute conversation de famille. Ce n'est que lorsque le père de famille remarque qu'aujourd'hui est le jour où Macao a rendez-vous pour un check-up complet chez le médecin, qu'Arun lève la tête de son article et pose sa tasse de café avec agacement.

La RaceWhere stories live. Discover now