Chapitre 1

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À peine avais-je mis un pied hors de mon immeuble, que ma mauvaise humeur se rappela à mon bon souvenir.

Qui avait-il de plus déprimant que le mois de décembre ?

Tout, absolument tout, dans cette période de l'année m'horripilait, à commencer par ce froid polaire qui frappait toute la région. Je réajustai mon écharpe autour de mon cou, et je remontai d'un pas pressé l'avenue principale. Tout en affichant une moue blasée, je jetai quelques regards en biais aux vitrines des magasins, décorées aux couleurs de Noël. Je n'avais jamais compris pourquoi les gens développaient une fascination, presque maladive, pour cette fête. Pour ma part, je n'y voyais qu'un moyen détourné de faire dépenser un maximum d'argent à de pauvres imbéciles. Quoi de plus idiot que d'offrir des cadeaux, qui la plupart du temps finissaient au fond d'un placard. Seuls les enfants étaient assez crédules pour attendre l'arrivée de ce vieux bonhomme vêtu de rouge, censé apporter joie et bonheur.

Voilà bien longtemps que je ne croyais plus en la magie de Noël !

Dépitée par le sourire qui illuminait le visage des gens que je croisais, je m'engouffrai prestement chez « Angelo ». Je n'étais apparemment pas la seule à penser qu'il faisait le meilleur café de toute la ville, une file d'attente monstrueuse gravitait devant le comptoir. Je pris mon mal en patience en regardant quelques spécimens masculins, attablés autour de moi. Aucun d'entre eux ne retint vraiment mon attention, jusqu'à ce qu'un timbre de voix, doux et suave, n'agressa délicieusement mes tympans. Je tendis le cou pour en apercevoir le propriétaire, mais je n'aperçus que de larges épaules, mises en valeur par une veste en cuir noire. Je restai à l'affût, afin de vérifier si son physique était aussi attrayant que ses cordes vocales. Justement le voilà qui s'emparait de son café et se dirigeait vers la sortie. Je fis un discret aller-retour sur sa silhouette. Grand, brun, musclé. Pour l'instant, tout me convenait. Dès que mes yeux se posèrent sur son visage, je déchantai aussitôt. Il devait avoir vingt-cinq ans, pas plus.

Comme si tes quarante-et-un ans allaient l'intéresser ! pensais-je d'un air pragmatique.

Pourtant, quand il passa devant moi, son petit sourire en coin me charma. Ses magnifiques yeux bleus me flattèrent avec indécence, ce qui chatouilla, sans prévenir, le bas de mon ventre. Plus sensible que je ne l'aurais prévu, je lui souris mielleusement. Par dessus mon épaule, je le regardai passer la porte. Pour mon plus grand plaisir, il se retourna une dernière fois et m'offrit un sourire des plus éclatants. Cette rencontre fortuite renvoya subitement ma mauvaise humeur au placard. Je trépignai dans la file, pressée de sortir enfin d'ici. Lorsque je fus sur le trottoir, je regardai tout autour de moi. Le beau brun avait disparu.

— A quoi t'attendais-tu, Veronica ? Qu'il fasse le pied de grue pour t'inviter à dîner ? marmonnai-je entre mes dents.

Tout en continuant ma route, je remis mes idées en place. Je m'étais certainement imaginé des choses. Ce jeune homme aurait pu sans aucun doute faire partie de ma progéniture, si progéniture il y avait. Malheureusement pour moi, mon utérus avait fermé boutique depuis longtemps. Il était aussi vide qu'un trou noir, aussi aride que le plus aride de tous les déserts, aussi stérile que la planète Mars. Des kystes aux ovaires m'avaient saccagée toute probabilité de mettre au monde un enfant. Cette nouvelle avait fait fuir beaucoup de mes prétendants. Dans mon cas, il n'y avait pas de dénouement heureux à mes histoires sentimentales. J'avais fait une croix sur ce clap de fin, suivit d'un "Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants". Je ne blâmais pas tous ces hommes. Qui ne rêvait pas d'une vie parfaite ? Une métier valorisant, une belle voiture, une grande maison remplie de cris d'enfants. Plus les années défilaient, plus l'espoir de trouver l'amour s'amenuisait. J'en avais pleuré... énormément, puis je m'étais fait une raison. Au passage, j'avais perdu une bonne partie de ma confiance en moi.

Vieillir entourée de chats, tel serait mon lot de consolation.

Le fabuleux Noël de VeronicaWhere stories live. Discover now