Arrivée dans le jeu

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Maintenant qu'elle est partie, tu prends le temps d'observer l'endroit dans lequel tu te trouves. 

En face de toi se trouve une porte massive en bois sombre ornée de gravures.

Alors que tu tournes doucement sur toi-même, tu balayes la pièce de ton regard remarquant des murs bleus canard sur lesquels sont accrochées de multiples avancées et moulures en bois de la même teinte que celui de la porte.

Tu remarques que certains de ces morceaux de bois forment des arques, des colonnes et même des visages de ce qu'il semble être des chérubins. Toutes ces sculptures, ainsi que quelques touches dorées ajoutées parmi elles, donnent un aspect ecclésiastique à cet endroit. Elles ne sont, bien sûr, qu'un avant-goût des multiples autres qui sont réparties dans l'entièreté du manoir.

Tu sursautes en sentant une main t'agripper le poignet. C'est celle de Julia, elle fixe quelque chose face à elle et ne semble pas rassurée. Tu suis avec appréhension la direction qu'indique son regard... Un frisson te parcours le dos lorsque tu découvres le reste de la salle.

Tous les groupes d'invités sont tournés vers vous, silencieux, un sourire peu inquiétant plaqué sur leurs visages. Figés de la sorte, ils se semblent être que de vulgaires pantins avec des manivelles dans leurs dos : chacun a sa propre action. Certains dansent, parlent, rient, boivent, et dès qu'ils s'arrêtent, il est alors temps de tourner cette manivelle à nouveau pour qu'ils répètent la même action encore et encore.

Une très longue minute passe avant que le son d'un piano ne se fasse entendre au loin, jouant un air classique et doux. En l'entendant ils s'éveillent et clignent des yeux subitement, cette mélodie est leur manivelle. Tous en cœur, ils poussent un soupir de soulagement et rigolent ensemble, comme si c'était une situation aussi anodine et habituelle qu'une panne de courant.

Si ton cœur avait un rythme normal jusqu'à maintenant, et bien ce ne fut plus le cas, lorsque chaque invité fondit un par un sur les joueurs comme un rapace sur sa proie. Tout comme les autres ton cavalier vint à ta rencontre, te saisit le poignet et t'emmena plus loin dans la salle.

- Dame Abby, je présume. Il t'adresse un regard envoûtant avant de déposer un baisemain sur ta main gauche qu'il détient encore. 

Comme la bienséance l'exige : tu sens ses lèvres entrer délicatement en contact avec le dos de ta main, dans un chaste et respectueux baiser. Elles sont accompagnées de son souffle chaud, ces deux sensations te sont retransmises grâce à ta combinaison. 

- Sir Thomas, c'est un plaisir.

Tu veux parler, mais seuls quelques mots incompréhensibles arrivent à s'extirper de ta bouche, tu finis par réussir à lui répondre "plaisir partagé", ce qui provoque chez lui un faible sourire.

Ce qui semble être un duo de violons rejoint le piano en fond et tous trois jouent une mélodie douce, bien que plus enjouée que la précédente. Ton cavalier t'annonce que la première danse va débuter et tend sa paume vers toi en te demandant « puis-je ? ». Tu es tentée de refuser, ne voulant pas te ridiculiser devant les autres joueurs au vu de tes piètres talents de danseuse, mais sa main attire la tienne comme un aimant et tu es contrainte de le suivre.

Du coin de l'œil tu observes les autres et pousses un soupir de soulagement en remarquant que la plupart ont l'air tout aussi réticents que toi.

Une fois arrivés au centre de la salle de bal, ton cavalier entrelace vos doigts piégeant ainsi ta main droite et obligeant ton bras à rester tendu. Il pose ensuite sa main sur ton dos, à l'exact endroit qui sépare ta peau dénudée et ta robe, tout en te rapprochant de son torse, t'incitant ainsi à poser ta main gauche sur son épaule. Tu relèves la tête et au moment précis où vos regards se rencontrent, l'entièreté de ton corps se paralyse. Là où certains ont dû penser que c'était totalement normal, toi tu paniques.

Les morts aussi savent danserOù les histoires vivent. Découvrez maintenant