22 Dans le cœur d'Émilie

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 ... En effet, le cœur d'Émilie s'était envolé par delà les forêts et les champs, là où l'attendait, fébrile, l'amoureux Stéphane Barry.

Le lendemain de leur dîner romantique, Stéphane avait eu la bonne surprise de retrouver Émilie à sa porte, vers 22 heures après la sortie de son travail, en ce premier vendredi de juillet.

Émilie arborait ses lunettes bleues, un grand sourire. Ils se firent timidement la bise et il l'invita à entrer. Autour d'un verre, ils bavardèrent et au deuxième, ils se tutoyaient, complices. Ainsi, ils ne virent pas le temps passer quand minuit sonna à la vieille pendule de Stéphane, héritée de sa grand-mère.

Émilie regardait l'heure et prenant les mains de Stéphane dans les siennes, elle se lança :

« Stéphane, tu sais que je pars en camp lundi pendant dix jours et ce week-end, je ne t'ai pas dit, je retourne dans ma famille où mes parents fêtent leurs trente ans de mariage. Je, excuse moi, je dois rentrer... J'ai de la route à faire demain et je compte me lever tôt.»

Elle avait parlé d'un trait et Stéphane l'écoutait attentivement. Elle se leva en même temps que lui et reprit :

« J'ai très envie de te revoir... »

Émilie n'avait pas lâché ses mains et s'approchant soudain de plus près, elle l'embrassa avec flamme et douceur, tout cela à la fois. Stéphane, tremblant d'émotion, lui ouvrit les bras où elle se blottit avec délice et ils restèrent silencieux quelques instants. A la fin de cette étreinte, Stéphane sourit et chuchota à son oreille :

« J'attendrai le temps qu'il faudra. »

Un court silence encore, puis il reprit :

« Tout de même, il me tarde de te retrouver... »

Il enveloppa délicatement son visage dans ses mains et y déposa deux baisers. Le premier sur le front et le second sur les lèvres tressaillantes d'Émilie. Elle y répondit avec passion, le cœur fondant tandis que ses bras s'abandonnaient le long du corps puis elle s'écarta, les lèvres à portée d'un baiser et murmura dans un souffle :

« Il faut vraiment que j'y aille ! »

Émilie s'esquiva alors, tandis que Stéphane l'observait. A la porte, elle lui glissa deux mots à voix basse, comme susurrés, mais dans un élan d'amour. Le cœur de Stéphane était conquis pour la seconde fois de sa vie et il s'assit en rêvassant. Le bonheur et de nouveau l'attente. Mais qu'importe, son âme brûlait.

Le matin du retour, Fred prit le volant pour la première partie du voyage et Émilie en profita, plongée dans ses pensées, rouge passion, tout comme ses lunettes du jour.

Les kilomètres défilaient, jusqu'à la pause casse-croûte. Émilie proposa alors de conduire à son tour, ce qu'accepta volontiers Fred qui avait en général les paupières lourdes en même temps que l'estomac.

« Et c'est reparti, dernière ligne droite avant... », se dit Émilie. Tout à son homme qui l'attendait, elle volait vers son amour.

Fred eut un sourire crispé et il tempéra l'élan de la jeune femme :

« Heu, je comprends ton enthousiasme, mais comment dire Émilie, ..., il me semble que tu vas un peu vite. Ton professeur d'école attendra ! Tout comme ma femme et mes enfants que j'ai pourtant hâte de retrouver... »

« Au secours, c'est Émilie qui conduit ! » clama à son tour Eliott depuis le fond du véhicule.

Et ce furent ensuite tous les enfants qui entonnèrent gaiement :

« Émilie, si t'es championne, appuie, appuie, ... »

« Bon, ok, ok, je ralentis les enfants... »

En chœur : « Oh, non !!! »

Les paysages se succédaient, les pins laissant la place à une forêt de hêtres et de bouleaux puis à de grandes étendues de tournesols en fleur. Les chansons fusaient allègrement et le fourgon finit par se garer à bon port, où Claire les attendait. Pour certains alors, la vie à Sainte Clotilde reprenait son rythme, quand d'autres regagnaient leur demeure. Charline et Mathias furent déposés dans leur famille, Fred rejoignit son doux foyer.

Émilie déboula chez elle, telle un ouragan. La tempête Émilie balaya la pièce, dispersa les vêtements jetés à la hâte, le chat Clotaire récolta la déferlante de croquettes semées à la volée, et sous la douche un déluge bienfaiteur.

Fraîche et pimpante, Émilie chaussa à nouveau ses lunettes rouges.

Son cœur aspire, il chavire, d'amour, elle court...

A quelques lieux de là, Stéphane avait préparé un dîner, il s'était surpassé et avait mis les petits plats dans les grands. Le cœur palpitant, il laissait libre cours à ses pensées...

... Et un peu plus loin, comme dans un songe, résonnait les vers d'Eliott :


Sous le regard d'Émilie,

Je fonds, je meurs et je vis,

Un mélange de couleurs,

Embaume de joie mon cœur,

En rouge, vert ou en bleu,

Il rayonne à mille lieues !


Dans la vie d'Émilie, Stéphane était devenu une évidence. Une porte s'ouvrit sur des cris de joie, ils s'enlacèrent et leur deux âmes s'embrasèrent. L'ouragan Émilie n'en avait pas fini de rugir...

Au secours, Émilie !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant